Le gouvernement Marois estime que la Coalition avenir Québec (CAQ) a dérapé dans ses déclarations sur André Boisclair et exhorte le parti à confirmer qu'il imitera l'ex-ministre péquiste en défrayant ses honoraires d'avocats.

Selon la première ministre Pauline Marois, les partis d'opposition se sont transformés en «justiciers» dans leurs questions adressées à l'endroit de M. Boisclair, temporairement relevé de ses fonctions de délégué général du Québec à New York.

«Ce n'est pas leur rôle, a dit Mme Marois, en marge d'une annonce économique, lundi, à Montréal. Il y a des institutions qui ont été créées pour ces dossiers, il s'agit de l'UPAC et la commission Charbonneau.»

«C'est inacceptable qu'ils (les partis d'opposition) aient décidé de faire leur propre enquête», a-t-elle ajouté.

Selon la première ministre, M. Boisclair a pris la «bonne décision» en se retirant temporairement de ses fonctions afin de se concentrer à défendre sa réputation.

La semaine dernière, le député caquiste Jacques Duchesneau a évoqué la possibilité d'un lien entre une subvention accordée en 2003, à quatre jours des élections, au projet de restauration de l'église St. James piloté par l'entrepreneur Paul Sauvé, l'infiltration de l'entreprise de ce dernier par le crime organisé et la consommation passée de cocaïne de M. Boisclair.

Le chef de la CAQ, François Legault, a refusé de parler d'un «dérapage» de la part de son député, remettant plutôt en question la réaction de la première ministre.

«Moi, ce que je veux surtout savoir, c'est quelle est la position de Mme Marois. La semaine dernière, elle a refusé d'appuyer ou de désavouer André Boisclair. Est-ce qu'elle est d'accord avec ce contrat-là de 2,6 millions de dollars? C'est ça qu'on veut savoir», a-t-il déclaré lundi, à Laval, à l'issue d'un discours à teneur économique.

«Mais pour ce qui est des échanges entre M. Boisclair, M. Duchesneau, moi et la Coalition, c'est devant les tribunaux alors on ne peut pas faire de commentaires», a-t-il tranché, sans préciser si des preuves soutenant les allégations de M. Duchesneau allaient être déposées devant les tribunaux.

Le ministre des Relations internationales, Jean-François Lisée, a demandé lundi à la CAQ de confirmer que les contribuables n'auront pas à payer pour les honoraires d'avocats de François Legault et du député Duchesneau.

La veille, M. Boisclair avait annoncé qu'il avait donné des instructions à ses avocats pour intenter des poursuites judiciaires contre MM. Legault et Duchesneau pour atteinte à sa réputation.

L'ex-ministre péquiste assumera lui-même ses honoraires d'avocats puisqu'il entreprend cette poursuite à titre personnel.

«Est-ce que les fonds publics vont être correctement utilisés s'ils servent à défendre MM Legault et Duchesneau, qui sont les responsables de cette affaire et qui ont fait des déclarations injustifiées?» s'est questionné M. Lisée.

«Moi je les appelle à annoncer qu'ils vont eux-mêmes assumer leurs frais d'avocats, a martelé le ministre. Comme cela, ça ne sera pas aux contribuables d'assurer la défense de gens qui ont tenu des propos inacceptables.»

Le chef caquiste serait-il à l'aise à l'idée que les fonds publics servent à éponger la facture des avocats qui assureront leur défense? En point de presse, François Legault y est allé d'une réponse évasive.

«C'est ce qui est prévu pour les partis. C'est ça qu'on est en train de regarder. (...) Je n'ai pas la réponse encore», s'est-il contenté de répliquer.

«Moi, je n'ai pas demandé à être poursuivi; c'est M. Boisclair qui nous poursuit», a-t-il par ailleurs plaidé.

Le gouvernement Marois a l'intention d'utiliser M. Boisclair dans d'autres fonctions, sans toutefois préciser lesquelles, jusqu'à ce que les procédures judiciaires soient terminées, a indiqué Jean-François Lisée.

«Il n'est pas question de laisser un homme de cette qualité à ne rien faire, a dit le ministre des Relations internationales. Les fonds publics vont être protégés dans notre façon de gérer cette situation.»

Quant à savoir qui remplacera M. Boisclair comme délégué général du Québec à New York, le gouvernement ne semble pas avoir tranché dans ce dossier.

«Nous allons évaluer toutes ces questions-là dans les semaines qui viennent», s'est contenté de dire Mme Marois.

Dans ses nouvelles fonctions, M. Boisclair conservera vraisemblablement les mêmes conditions que celles qu'il avait à New York, ce qui dérange le porte-parole libéral en matière de sécurité publique, Robert Poëti.

«C'est surprenant qu'il conserve ses avantages, a-t-il dit, en entrevue. Son salaire devrait être revu à la baisse selon le travail qu'il fera. Là, M. Boisclair aura le même salaire, il ne sera juste plus assis à New York.»