Après presque deux ans de débats, Québec resserre les normes de qualité et de sécurité dans les résidences privées pour personnes âgées.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Réjean Hébert, a dévoilé mercredi un nouveau règlement sur la certification de ces 2000 résidences, qui accueillent 113 000 aînés. Il a été condamné aussitôt par le Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA), qui accuse le gouvernement d'acculer plusieurs de ses membres à la faillite.

« Je préfère que les résidences ferment que de laisser des personnes âgées dans des milieux qui ne correspondent pas à nos normes », a répliqué M. Hébert en conférence de presse.

Le règlement définit deux catégories de résidences - pour personnes autonomes et semi-autonomes - et précise les normes qui s'y appliquent. Il fixe le nombre minimal d'employés qui doivent être présents en tout temps - de un à trois, selon la catégorie et la taille de la résidence. Il introduit pour les préposés deux formations obligatoires qui totalisent 66 ou 210 heures selon qu'ils travaillent dans une résidence pour personnes autonomes ou pour personnes semi-autonomes. « Il n'y en a pas encore assez à mon goût, je peux vous le dire, mais c'est une première étape, a dit Réjean Hébert. On ira bonifier cette formation-là au fil du temps. » Québec alloue 15,3 millions de dollars en trois ans pour financer cette formation.

De plus, les résidences devront vérifier les antécédents judiciaires de leurs employés, mettre en place un système d'appel à l'aide et tenir un registre des incidents et des accidents. Elles devront conclure une entente avec un centre de santé et de services sociaux pour définir les soins à donner aux résidants.

La signature d'un bail sera désormais obligatoire, et les résidences devront maintenir les services et les prix qu'il prévoit jusqu'à la fin du bail. « On veut éviter la surfacturation », a souligné Réjean Hébert.

Le règlement entrera en vigueur le 13 mars, mais le ministre accorde un délai aux résidences pour se conformer à certaines normes. Par exemple, elles ont jusqu'en juin 2014 pour respecter le seuil de personnel et installer un système d'appel à l'aide, et jusqu'en novembre 2015 pour que tous les préposés soient formés. Un processus de reconnaissance des acquis est prévu.

Malgré ces accommodements, le RQRA est «extrêmement déçu» du nouveau règlement. «L'objectif est louable mais, en pratique, c'est inapplicable», a tonné son président, Yves Desjardins. Selon lui, «l'imposition de nouvelles règles va avoir un impact sur les loyers». Réjean Hébert ne croit pas à une hausse des prix. «Les lois du marché vont d'appliquer. Il y a plus d'offre que de demande. Alors ça va limiter l'appétit des propriétaires des résidences», a-t-il soutenu.

Selon M. Desjardins, le quart des résidences ont des ennuis financiers: «Plusieurs ne pourront pas finir l'année», soutient-il. Les nouvelles normes risquent, selon lui, d'empirer la situation.

L'Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraités ne craint rien pour les aînés qui verraient leur résidence fermer ses portes. «Il y a les CSSS, il y a un système, et elles vont être déménagées. Il y a beaucoup de résidences, il y a plus de places que de besoins», a affirmé sa porte-parole, Judith Gagnon. Elle se dit satisfaite du règlement. «Beaucoup de propriétaires ne sont pas conscients qu'ils ont une mission. Ce n'est pas comme vendre des chapeaux ou des chocolats. C'est transiger avec des humains. Ils vont s'adapter parce qu'il en faut, des critères. Sinon, qu'est-ce qu'on vaut, comme société, si on n'est pas capable de tracer des balises pour des gens qui sont vulnérables?»

Le règlement découle d'une loi déposée par le gouvernement Charest en mai 2011 et adoptée en novembre de la même année. La première mouture du règlement faisait l'objet de consultations depuis mai 2012.