Le cas de Tony Accurso incite la ministre du Travail, Lise Thériault, à revoir la loi. Elle s'engage à «examiner toutes les possibilités» pour combler un trou dans la récente loi destinée à combattre la fraude dans l'industrie de la construction. Un nouveau projet de loi pourrait «éventuellement» être déposé.

Elle a commencé à travailler en ce sens il y a quelques semaines, a-t-elle assuré hier à La Presse. «Mon objectif, c'est de sortir les entrepreneurs malhonnêtes de l'industrie de la construction», a-t-elle affirmé, sans faire référence à un individu en particulier.

La Loi visant à prévenir, combattre et sanctionner certaines pratiques frauduleuses dans l'industrie de la construction a été adoptée en décembre dernier. Elle interdit pendant cinq ans à une entreprise reconnue coupable de fraude fiscale de soumissionner des contrats publics. Cette loi ne cible que les détenteurs d'une licence de la Régie du bâtiment (RBQ), tant les entreprises que leurs administrateurs. Elle ne touche pas les commanditaires de ces entreprises, soit ceux qui les financent et récoltent un dividende sans siéger à leur conseil d'administration.

Société en commandite

En décembre 2010, Simard-Beaudry Construction (SBC) et Construction Louisbourg, entreprises de Tony Accurso, ont plaidé coupable à deux accusations de fraude fiscale de 4,1 millions de dollars. Elles ont donc perdu leur licence. Mais pendant qu'elle faisait l'objet d'une enquête, SBC a acheté une PME en faillite, Réseaux Simpler. C'est ainsi qu'a été créée Louisbourg SBC. Cette nouvelle société appartient au groupe Accurso. Mais elle est seulement commanditée, et non administrée, par M. Accurso. Elle échappe ainsi aux dispositions de la loi contre les pratiques frauduleuses dans l'industrie de la construction, ce qui lui permet d'avoir une licence.

Depuis décembre 2010, cette nouvelle société a obtenu pour 180 millions de dollars de contrats du ministère des Transports. Sa soumission à un contrat de 12 millions de dollars lié au Centre universitaire de santé McGill a en outre été la plus basse.

Le Parti québécois et la Coalition avenir Québec ont vertement dénoncé ces contrats. Selon eux, cela bafoue le principe de la loi.

Mme Thériault ne dit pas le contraire. Elle y voit un exemple de «contamination d'une entreprise par une société en commandite». «C'est sûr qu'on est en train de regarder ce qu'on peut aller chercher pour fermer les portes», dit-elle.

Pourquoi ne pas avoir fermé cette porte dans la loi? La ministre soutient que cette pratique n'était pas fréquente lors de la rédaction du projet de loi. Elle ajoute que, en commission parlementaire, l'opposition non plus n'avait pas anticipé ce problème.

Depuis l'opération Gravier de l'Unité permanente anticorruption, le mois dernier, six chefs d'accusation au criminel pèsent sur M. Accurso. S'il est reconnu coupable, il ne pourra plus être commanditaire de la nouvelle société Louisbourg SBC.