Un observateur, membre du nouveau Bureau civil de surveillance, sera mandaté pour vérifier chaque enquête où des policiers auront à se pencher sur les interventions de leurs pairs ayant débouché sur une mort ou une blessure grave.

Cet observateur sera «les yeux de la population» sur ces enquêtes dont l'impartialité est mise en doute parmi les citoyens, a expliqué le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil, après avoir déposé le projet de loi 46 à l'Assemblée nationale.

Sur le terrain, toutefois, les enquêtes continueront d'être réalisées par des policiers issus d'un corps différent de celui des agents impliqués dans les incidents. Le gouvernement rejette ainsi la recommandation de la protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain, qui a proposé la création d'une escouade d'enquêteurs civils.

Dans son constat, Mme Saint-Germain a souligné que confier les enquêtes à des policiers «mine à la base même l'indépendance de ces enquêtes».

Jean Charest s'est fait rassurant. «Le gouvernement en est venu à la conclusion qu'avec une instance de surveillance, et en permettant aux policiers de faire leur travail - parce que ce sont eux qui sont formés pour faire le travail d'enquête -, on se donnait l'assurance que ces enquêtes allaient se faire correctement», a dit le premier ministre.

Le Bureau de surveillance sera composé de huit membres et doté d'un budget annuel de 1,5 million. On recrutera des magistrats à la retraite ou des avocats admis au Barreau depuis plus de 10 ans.

Le projet de loi répond aux attentes du milieu policier. «Les enquêtes relèvent toujours de policiers d'expérience. On aura la meilleure formule au Canada. On a toujours été conscients des problèmes de perception quant à l'impartialité de ces enquêtes», a souligné Denis Côté, président de la Fédération des policiers municipaux.

Pas un compromis

Le ministre Dutil se défend d'avoir été perméable aux lobbies policiers. La formule choisie, selon le gouvernement, est «la plus efficace», a-t-il affirmé. Il fallait selon lui que les enquêtes soient toujours menées par des policiers, qui possèdent l'expertise nécessaire. Mais il fallait ajouter un encadrement qui rassure la population quant à l'impartialité de ces enquêtes, a-t-il expliqué. La décision n'est pas le fruit d'un compromis: «Je n'ai pas coupé la poire en deux», a-t-il lancé.

La Ligue des droits et libertés dénonce le projet de loi et demande une consultation parlementaire pour en débattre. L'organisme réclame une formule d'enquête totalement indépendante. «Est-ce que les résultats de ces enquêtes seront publics? C'est un point essentiel pour nous», indique Nicole Fillion, coordonnatrice de la Ligue qui tiendra une conférence de presse dans les prochains jours, appuyée par une trentaine d'organismes mécontents.