«La ligne de défense libérale vient de tomber. Nous avons gagné une forteresse», s'est exclamée Pauline Marois, lundi en fin de soirée, dans un local du Parti québécois survolté.

Les citoyens de Kamouraska-Témiscouata venaient de «sanctionner» les libéraux en élisant le péquiste André Simard. Une victoire obtenue à l'arraché, par seulement 196 votes. Encore moins que les 296 bulletins rejetés.

«Il faut accepter le résultat», a déclaré Jean Charest. Malgré tout, il n'exclut pas de demander un second dépouillement. «Nous allons analyser la situation (mardi matin)», a indiqué le porte-parole de la campagne du Parti libéral du Québec, Nicolas Rochette.

M. Simard, politicien néophyte, a obtenu 36,85% des votes. Suivent la libérale France Dionne (35,85%), l'adéquiste Gérald Beaulieu (23,03%) et Serge Proulx de Québec solidaire (2,67%).

«Il paraît que c'était un test. Et ça a l'air que je l'ai passé», a lancé Mme Marois, en défiant ceux qui critiquent son leadership.

Elle a eu des sueurs froides pendant plusieurs heures, voire plusieurs semaines. Durant toute la campagne, PQ et PLQ étaient presque à égalité dans les sondages. Le PLQ menait, mais son avance était inférieure à la marge d'erreur. La semaine dernière, Mme Marois justifiait déjà une éventuelle défaite, en rappelant que les libéraux détiennent la circonscription depuis 25 ans et que le regretté Claude Béchard était très populaire dans la région.

Lundi soir, la lutte était si serrée qu'un militant criait les plus récents résultats à chaque minute environ. Vers 21h15, alors que moins de 100 votes séparaient le PLQ du PQ, des députés péquistes expliquaient déjà qu'une deuxième place serait «quand même une victoire».

Ils ont réellement gagné. «C'est la victoire de l'intégrité», a dit M. Simard, qui devient le 52e député du PQ. «Vous avez rejeté le cynisme. (...) Vous avez exprimé la volonté de tous les Québécois», a ajouté Mme Marois, avant d'être enterrée par l'inévitable Gens du pays de Gilles Vigneault.

La semaine dernière, seulement un Québécois sur six disait faire confiance au gouvernement Charest. Il s'agit du plus faible taux enregistré depuis l'arrivée au pouvoir de M. Charest, en 2003.

«Nous avons fait une performance remarquable dans les circonstances», a déclaré la vice-première ministre, Nathalie Normandeau.

Ancien directeur de l'Institut de technologie agroalimentaire, M. Simard a quitté sa retraite cet automne pour devenir militant puis candidat péquiste.

Le PQ pressentait qu'il pouvait enfin remporter la circonscription. Mme Marois a visité six fois la région pour épauler son candidat. Plus de 25 députés du PQ ont sillonné lundi la trentaine de municipalités de la circonscription pour inciter les sympathisants péquistes à voter.

Le PQ est habituellement avantagé lorsque le taux de participation est élevé. C'était le cas lundi. Certes, le taux de 52% peut sembler faible. Il est même inférieur au creux historique de 57,43% des dernières élections générales.

Mais pour une élection partielle, le taux enregistré lundi est important. C'est deux fois plus que la participation aux deux dernières élections partielles (29,25% à Vachon en juillet et 21,65% en septembre à Saint-Laurent).

Après sa victoire, M. Simard a eu une pensée pour son regretté prédécesseur. «Claude, tu peux reposer en paix. Le comté que tu aimais tant est entre bonnes mains», a-t-il déclaré.

Retour aux sources

La libérale France Dionne essayait de succéder à Claude Béchard, décédé en septembre dernier. Mme Dionne a été députée de Kamouraska de 1985 à 1997 avant de céder sa place à M. Béchard. En 2004, elle a été nommée déléguée du Québec à Boston. Pour reprendre son siège à Québec, elle a fait campagne sur des enjeux locaux. Ce qui intéresse les électeurs, c'est «le pain et le beurre», martelait-elle.

L'élection d'lundi était aussi un test pour l'ADQ. Elle avait terminé deuxième lors des trois dernières élections. En 2007, M. Beaulieu avait récolté seulement 752 votes de moins que M. Béchard. Il n'avait pas présenté de programme, et il n'en a pas présenté pour cette élection. Après une très difficile année 2009, l'ADQ a réussi à légèrement améliorer son résultat. Ses 23,03% sont un peu supérieurs aux 21,56% enregistrés en 2008, mais nettement sous les 36,68% récoltés en 2007, alors que le parti dirigé par Mario Dumont formait l'opposition officielle.

Chaque parti se lance maintenant dans sa seconde campagne, celle visant à donner son éclairage aux résultats. Elle aussi s'annonce intéressante.

- Avec La Presse Canadienne