À compter de 2011, les industriels québécois devront acquitter une redevance annuelle totalisant 8,8 millions de dollars sur le prélèvement de l'eau, a annoncé, mardi, la ministre du Développement durable, Line Beauchamp.

«À notre connaissance, le Québec sera la province canadienne qui imposera les redevances les plus élevées et surtout qui rapporteront le plus», s'est félicitée la ministre, en conférence de presse à Québec.

À l'exception notable des exploitations agricoles, toutes les entreprises industrielles et commerciales puisant 75 mètres cubes d'eau ou plus par jour -l'équivalent de deux grosses piscines- seront tenues d'acquitter cette nouvelle taxe sur l'eau.

Comme en Ontario, le projet de règlement de la ministre Beauchamp introduit deux taux distincts de redevance sur la ressource.

Le plus modeste, à 2,50 $ le million de litres d'eau, s'appliquera aux industries qui retournent dans l'écosystème la majeure partie de l'eau puisée.

Le taux le plus élevé, à 70 $ le million de litres, touchera les entreprises d'embouteillage et les fabricants de boisson et de produits chimiques.

Pourquoi deux niveaux de redevance? «Parce que nous devons refléter le type d'utilisation qui est fait de l'eau et l'impact sur le milieu naturel», a expliqué la ministre.

Ainsi, la redevance est moindre pour les industries comme les pâtes et papiers, la métallurgie et les mines parce que l'eau qu'elles utilisent dans leur processus de production retourne pour l'essentiel dans le milieu naturel.

Ce n'est pas le cas pour les embouteilleurs, les fabricants de jus, de bière, de marinade et de produits chimiques, qui incorporent l'essentiel de l'eau prélevée à leurs produits.

À 70 $ pour chaque million de litres, la redevance québécoise est 20 fois supérieure à celle imposée en Ontario, a fait valoir Mme Beauchamp. Le taux de 2,50 $ est pour sa part trois fois plus élevé que celui en cours dans la province voisine.

Même si elles devront absorber une ponction plus considérable que celle de leurs compétitrices ontariennes, les entreprises québécoises demeureront concurrentielles, pense la ministre.

«J'estime que malgré un taux 20 fois supérieur à l'Ontario, les entreprises et les commerces québécois sont capables d'intégrer ce coût dans leurs produits sans que cela vienne compromettre leur compétitivité avec les entreprises de l'Ontario», a-t-elle dit.

Plus précisément, la redevance québécoise ne représentera qu'un demi-cent pour une caisse de 24 bières, a illustré Mme Beauchamp.

Comme il ne s'agit pas d'une mesure de nature financière mais plutôt d'une «mesure environnementale», l'argent des redevances sera versé au Fonds vert pour des projets reliés à la protection de l'eau, a ajouté la ministre.

Fait à souligner: le gouvernement Charest a cru bon d'épargner les entreprises agricoles, notamment les porcheries, de la nouvelle réglementation.

La raison invoquée est que très peu d'exploitations agricoles puisent le niveau d'eau minimum requis pour verser une redevance.

En ce sens, les revenus prélevés en redevance dans ce secteur auraient été marginaux, a relevé Mme Beauchamp.

Le Regroupement des organisations de bassin versant du Québec a accueilli avec satisfaction l'annonce de la ministre.

Même si le montant qui sera récupéré par les redevances est somme toute modeste, l'initiative de Québec a le mérite de signifier que l'on ne peut pas exploiter la ressource impunément, s'est réjoui Jean Landry, président de l'organisme.