Dans la foulée de l'attentat terroriste survenu dans deux mosquées de la Nouvelle-Zélande, qui a fait 50 morts vendredi dernier, le premier ministre Justin Trudeau lance un message sans équivoque aux dirigeants de ce monde: ils portent «une part de responsabilité» dans la multiplication des «massacres» qui font des victimes innocentes partout sur la planète.

«Des grandes tueries. Des massacres qui ciblent les communautés religieuses. Des attentats terroristes. C'est une honte. Et malheureusement, les dirigeants du monde portent une part de responsabilité. Une responsabilité que nous ne pouvons plus nier simplement en pointant les autres du doigt», a dénoncé le premier ministre dans un discours au ton solennel à la Chambre des communes, après la période de questions.

Alors que la Nouvelle-Zélande amorce son deuil et que les Pays-Bas ont aussi été bouleversés par une fusillade lundi matin, Justin Trudeau dit être exaspéré d'envoyer «ses prières et ses pensées» aux victimes et à leurs proches. Il a aussi rappelé la tragédie survenue à la grande mosquée de Québec, il y a deux ans, alors que six hommes sont tombés sous les balles alors qu'ils priaient.

M. Trudeau reproche à certains politiciens de se contenter de dénoncer du bout des lèvres ces attaques meurtrières qui visent des communautés religieuses.  

«L'enjeu, ce n'est pas seulement que les politiciens ne dénoncent pas cette haine. C'est que dans bien des cas, ils courtisent ceux qui tiennent des propos haineux. J'aimerais dire ceci aux politiciens et aux leaders du monde: la politique tendancieuse, la facilité avec laquelle certains choisissent de s'approprier des idées extrémistes - il faut que ça arrête», a-t-il plaidé.

M. Trudeau n'a pas nommé de leaders en particulier. Toutefois, ses propos semblent faire échos aux critiques du président des États-Unis Donald Trump, vilipendé dimanche pour son «silence» au sujet du danger de la montée des suprémacistes blancs aux États-Unis, en plein débat politique houleux sur la religion et l'intolérance après les attentats meurtriers contre deux mosquées en Nouvelle-Zélande.

«D'une année à l'autre, d'une décennie à l'autre, on pleure la perte de ces innocents-ci dans ce pays-là, et on promet de faire mieux. Mais ensuite le cycle se répète. Les leaders décident que la haine est un sentiment qu'ils peuvent exploiter. Que la colère insatiable les aidera à accéder au pouvoir. En tant que société, en tant que communauté mondiale et êtres humains, est-ce qu'on n'a vraiment rien appris ?

«Pour être honnête, je suis tanné de ça. Je suis tanné d'envoyer "nos pensées et nos prières". Et si moi je suis tanné, je peux à peine imaginer comment doivent se sentir ceux et celles qui sont touchés par la violence chaque jour», a-t-il dit.

Dans son discours, M. Trudeau s'est également élevé contre la haine qui pullule sur les réseaux sociaux. «La rhétorique toxique s'est installée dans la vie courante. Que ce soit antisémite, islamophobe, contre les Noirs, contre les Autochtones, contre les femmes ou contre les gais. La liste est longue, très longue. Cette rhétorique est dangereuse, haineuse et vile. Elle foisonne sur la toile, se répandant dans le vrai monde avec des conséquences meurtrières».

Nouvelle croisade

Justin Trudeau promet maintenant de porter «ce message» sur la scène internationale pour lutter contre le racisme et l'intolérance. «C'est un combat important. J'en appelle aux politiciens de tous les partis de s'inspirer des bonnes personnes que nous servons et faire ce qu'il faut. Nous devons contrer cette haine et ensemble, nous le ferons», a martelé M. Trudeau, sous des applaudissements nourris.

Le premier ministre a rappelé que le Canada avait déjà pris «des mesures importantes» pour lutter contre la discrimination et la haine, comme d'intensifier les enquêtes visant les groupes de propagandes haineuses et l'augmentation du financement pour assurer la protection des lieux de culte. M. Trudeau a aussi cité le projet de loi C-71 visant à resserrer le contrôle des armes à feu au pays.