Les Canadiens pourront consommer du cannabis à des fins récréatives en toute légalité à partir du 17 octobre, a annoncé mercredi le premier ministre Justin Trudeau à la Chambre des communes. La légalisation de la marijuana surviendra donc deux semaines environ après la tenue des élections provinciales au Québec, prévues le 1er octobre.

Mardi soir, le Sénat a décidé de ne pas tenir tête au gouvernement Trudeau en votant en faveur du projet de loi C-45 visant à légaliser la marijuana même si ce dernier a rejeté les amendements que plusieurs sénateurs jugeaient essentiels.

L'un de ces amendements aurait permis aux provinces de prohiber la culture du cannabis à domicile, comme le réclamaient le Québec et le Manitoba. La loi fédérale permettra à une personne de cultiver jusqu'à quatre plants de marijuana à son domicile. La loi québécoise interdit toute culture à domicile.

Selon le premier ministre Justin Trudeau, la date du 17 octobre vise à donner aux provinces le délai nécessaire pour assurer une transition en douceur entre le régime de prohibition en vigueur depuis 95 ans et la nouvelle réalité de la légalisation.

En matinée, la ministre de la Justice Jody Wilson-Raybould a par ailleurs prévenu les Canadiens qu'ils doivent s'abstenir de consommer de la marijuana avant l'entrée en vigueur du décret du cabinet mettant cette mesure en oeuvre.

«Le projet de loi C-45 doit encore franchir quelques étapes avant de devenir loi, et il est important d'être clair là-dessus: le cannabis à des fins non médicales n'est pas encore légal. La loi reste la loi», a insisté la ministre de la Justice.

Cette mesure législative «représente un virage majeur par rapport à la façon dont notre pays approche le cannabis. Il laisse derrière un modèle de prohibition qui a échoué, un modèle qui a enrichi le crime organisé et qui rendait nos jeunes vulnérables», a-t-elle ajouté.

Pour sa part, la ministre de la Santé, Ginette Petitpas Taylor, a invité les Canadiens «à se renseigner sur ce qui sera légal ou non dans la province où ils résident». Elle a soufflé le chaud et le froid lorsqu'est venu le temps de dire quelle loi les Québécois devront respecter pour la culture de pot à domicile.

À ses côtés, dans le foyer de la Chambre, la ministre Wilson-Raybould a réitéré qu'il n'est pas dans les plans d'Ottawa de contester la loi du Québec, mais que des démarches judiciaires citoyennes peuvent, en revanche, être entamées.

Elle a plus tard assuré qu'il ne fallait pas y voir une façon d'encourager les citoyens à s'adresser aux tribunaux - ce que lui avait précisément reproché en avril dernier le ministre québécois responsable des Relations canadiennes, Jean-Marc Fournier.

Après la conférence de presse des ministres fédéraux, le gouvernement Couillard a voulu dissuader tout Québécois de faire la culture du cannabis à domicile.

«Je dis aux citoyens: soyez vigilants. C'est la loi du Québec qui prévaut. D'ailleurs, la ministre de la Justice, après plusieurs questions là-bas au parlement fédéral, a fini par dire qu'(Ottawa) n'avait l'intention de contester les lois provinciales», a affirmé la ministre déléguée à la Santé publique, Lucie Charlebois. Québec n'entend pas non plus initier un recours juridique contre la loi fédérale.

«C'est le citoyen qui va initier» et «ça va (lui) coûter un bras (...). C'est le citoyen qui est impacté (sic) par le flou que laisse le fédéral. Malheureusement, ce seront les citoyens qui vont faire les frais de ça.»

Elle rappelle que la loi québécoise fera l'objet d'une révision dans trois ans et que, par conséquent, «il y aura toujours lieu de revoir la position».

En point de presse, mercredi, le député conservateur Tony Clement a indiqué que sa formation politique n'a pas l'intention de ramener la prohibition si le Parti conservateur prend le pouvoir aux prochaines élections, affirmant qu'il sera impossible de revenir en arrière une fois que la consommation de la marijuana sera légalisée au pays.

- Avec Tommy Chouinard et la Presse canadienne