Le Nouveau Parti démocratique (NPD) a demandé, hier, à la commissaire à l'éthique et aux conflits d'intérêt Mary Dawson de mener une deuxième enquête sur le ministre des Finances Bill Morneau, cette fois sur la vente d'une partie de ses actions dans Morneau Shepell, l'entreprise qu'il dirigeait avant de faire le saut en politique.

Le NPD a envoyé une missive à ce sujet à Mme Dawson en fin de journée, après que le Parti conservateur eut mitraillé le ministre Morneau de questions à la Chambre des communes relativement à la vente de 680 000 actions de Morneau Shepell, à la fin de novembre de 2015.

La vente de ces actions, dont la valeur totale dépassait les 10 millions de dollars, est survenue environ une semaine avant que le ministre des Finances annonce un train de mesures budgétaires visant à réduire le fardeau fiscal des contribuables de la classe moyenne tout en augmentant celui des contribuables les mieux nantis- une promesse phare des libéraux durant la dernière campagne électorale.

Le Parti conservateur a affirmé aux Communes que les mesures budgétaires déposées en décembre 2015 avaient contribué à une baisse de 5% de la valeur des actions de Morneau Shepell.

500 000 $ économisés

Bill Morneau est dans la ligne de mire des partis de l'opposition depuis qu'il a été révélé qu'il n'avait pas placé ses avoirs dans une fiducie sans droit de regard, comme il s'était engagé à le faire après sa nomination au cabinet. Il a indiqué avoir vendu une partie de ses actions de Morneau Shepell quelques semaines après avoir été nommé ministre des Finances.

Aux Communes, le critique conservateur en matière de finances, Pierre Poilievre, et son collègue Gérard Deltell ont demandé à au moins une douzaine de reprises au grand argentier du pays s'il était effectivement «la personne» à l'origine de la vente des 680 000 actions de Morneau Shepell survenue une semaine avant le dépôt des mesures budgétaires.

«Cette personne aurait sauvé un demi-million de dollars en évitant la baisse de valeur des marchés qui a suivi l'introduction de mesures fiscales à la Chambre des communes», a affirmé M. Poilievre.

«Était-ce seulement une coïncidence que ces deux transactions aient été alignées si méticuleusement, ou est-ce que le ministre a bel et bien agi prématurément en vendant ses actions avant d'introduire ses mesures fiscales?», se demande M. Poilievre.

Le député de Carleton a ajouté que c'était la responsabilité du gouvernement de s'assurer qu'aucun ministre n'utilise ses «connaissances privilégiées» pour réaliser des gains dans les marchés financiers. Plusieurs de ses interventions ont été soulignées par des cris d'encouragement de ses collègues.

«Cela fait des mois que nous répétons que le ministre des Finances est en conflit d'intérêts, a quant à lui lancé Gérard Deltell. Le conflit d'intérêts est gros comme un éléphant. Le ministre peut-il nous dire qui a vendu les actions de Morneau Shepell quelques jours avant que le ministre des Finances dépose une politique fiscale qui a fait perdre 5% de la valeur?»

Morneau refuse de répondre

Malgré l'insistance du Parti conservateur, Bill Morneau n'a jamais accepté de dire s'il avait oui ou non vendu ce bloc d'actions avant de déposer ses mesures budgétaires. Il a plutôt opté pour défendre le bilan économique du gouvernement Trudeau depuis son arrivée au pouvoir. Plusieurs de ses confrères étaient visiblement mal à l'aise devant les allégations du Parti conservateur, qui semble avoir trouvé de nouvelles munitions pour mettre en doute la crédibilité - et l'éthique - du ministre des Finances.

La commissaire à l'éthique et aux conflits d'intérêts a déjà lancé une première enquête le mois dernier, à la demande du NPD, afin de déterminer si M. Morneau s'est placé dans une situation de conflit d'intérêts en présentant le projet de loi C-27 en octobre 2016, lequel ouvre la porte à des modifications dans les régimes de pension. Le NPD soutient que ces modifications, qui sont toujours à l'étude aux Communes, auraient pu profiter à Morneau Shepell. Ce groupe est l'un des plus importants gestionnaires de régimes de retraite au pays.