Pour la première fois depuis que les militants néo-démocrates ont exigé son départ en avril 2016 à Edmonton en se prononçant pour la tenue d'une course à la direction, Thomas Mulcair laisse entendre publiquement qu'il pourrait quitter la politique avant les prochaines élections fédérales prévues en octobre 2019.

M. Mulcair, qui assure malgré tout l'intérim à la tête du NPD d'ici à l'élection du prochain chef en octobre, s'est montré équivoque au sujet de son avenir alors qu'il faisait le bilan de la dernière session parlementaire à Ottawa mercredi.

Interrogé par La Presse qui lui demandait s'il comptait terminer son mandat de député d'Outremont une fois que les militants du parti auraient jeté leur dévolu sur un nouveau chef, M. Mulcair a affirmé que sa décision n'était pas prise pour le moment, mais qu'il avait eu des discussions avec certaines universités pour passer dans le monde de l'enseignement.

« Les gens d'Outremont m'ont élu comme député d'abord et avant tout. Et je prends cela très au sérieux parce que même quand j'ai quitté le Conseil des ministres à Québec, à cause du dossier du mont Orford, il me restait un an, à ce moment-là, et j'ai terminé mon mandat. Donc, pour moi, c'est une obligation importante qui va toujours peser lourd dans les décisions que j'ai à prendre, a d'abord indiqué Thomas Mulcair. Pour l'instant, la seule chose que j'ai annoncée, parce que c'est la seule décision que j'aie prise, c'est que je ne me représenterai plus en politique, donc je ne serai pas candidat en 2019. »

« Pour le reste, je suis en conversation avec des universités. Il y a des choses intéressantes qui se profilent à l'horizon pour moi. Je serai là pour passer le flambeau à l'automne et je vais entre-temps continuer de faire ce que le caucus m'a demandé de faire, soit continuer de demander des comptes au gouvernement de Justin Trudeau », a-t-il ajouté du même souffle.

Une fenêtre pour Yolande James?

Le départ éventuel de Thomas Mulcair pourrait préparer la voie à un retour en force du Parti libéral dans la circonscription d'Outremont. Son départ pourrait aussi permettre à l'ancienne ministre du gouvernement Charest Yolande James de tenter à nouveau de sauter dans l'arène fédérale.

Mme James avait été candidate à l'investiture libérale dans la circonscription de Saint-Laurent, devenue vacante en janvier après l'évincement de Stéphane Dion du cabinet fédéral par Justin Trudeau, mais elle a mordu la poussière aux mains d'Emmanuella Lambropoulos. Cette dernière a été élue députée libérale lors d'une élection partielle qui a eu lieu le 3 avril.

Mme James était la candidate de choix des proches collaborateurs de Justin Trudeau durant l'assemblée d'investiture, mais les militants libéraux de Saint-Laurent se sont rebiffés en choisissant Mme Lambropoulos, enseignante de 26 ans dans une école secondaire, qui était peu connue avant sa victoire.

« Si Thomas Mulcair devait quitter son siège avant les élections générales, ça pourrait être un gros défi pour le NPD de conserver Outremont durant une élection partielle », laisse entendre une source dans les rangs néo-démocrates.

Contre toute attente, Thomas Mulcair a remporté la circonscription d'Outremont, bastion libéral depuis des décennies, à la faveur d'une élection partielle en septembre 2007. Il a par la suite remporté aussi la victoire aux élections de 2008, devenant ainsi le premier néo-démocrate à se faire élire au Québec lors d'un scrutin général. Il a aisément remporté la victoire en 2011, durant la vague orange, et a maintenu ses acquis dans Outremont en 2015, alors que les libéraux de Justin Trudeau faisaient une solide remontée au Québec en remportant 40 des 78 sièges que compte la province à la Chambre des communes.

Un chef redoutable

« Ma décision n'est pas prise. C'est la simple vérité. Je suis élu comme député. Les gens d'Outremont m'ont fait confiance. C'est un honneur de continuer de les servir. C'est une discussion qui va avoir lieu au cours des prochains mois », a encore dit M. Mulcair, qui avait été décrit comme le chef de l'opposition officielle le plus redoutable depuis John Diefenbaker par l'ancien premier ministre progressiste-conservateur Brian Mulroney.

Malgré le camouflet que lui ont infligé les militants du parti, l'an dernier, M. Mulcair n'a pas perdu sa fougue parlementaire à la Chambre des communes, s'avérant une véritable épine dans le pied du gouvernement Trudeau en relevant les promesses libérales qui ont été larguées au cours des derniers mois, notamment celle visant à réformer le mode de scrutin.