Le projet de loi du gouvernement contre la discrimination fondée sur l'identité et l'expression de genre a été adopté aux Communes et est maintenant entre les mains des sénateurs.

La mesure législative C-16 a passé l'étape de la troisième lecture aux Communes, vendredi après-midi, à la satisfaction de la ministre de la Justice du Canada, Jody Wilson-Raybould.

«Tous les Canadiens devraient se sentir en sécurité en étant eux-mêmes. Notre force en tant que nation repose sur notre diversité et notre inclusivité», a-t-elle déclaré par voie de communiqué.

«C'est notre responsabilité de reconnaître et de réduire la vulnérabilité des personnes transgenres et de diverses identités de genre à la discrimination, à la propagande haineuse et aux crimes motivés par la haine, et d'affirmer leur égalité dans la société canadienne», a enchaîné Mme Wilson-Raybould.

Dans les dernières minutes du débat en Chambre, vendredi matin, la députée conservatrice Michelle Rempel avait exhorté ses collègues de l'aile droite sociale à mettre de côté leur dogmatisme et à appuyer le projet de loi.

Son appel, livré dans un discours convaincu, semble avoir été entendu par les élus puisqu'il n'y a pas eu assez de députés conservateurs pour bloquer le cheminement de C-16, ni même le retarder en forçant un vote en troisième lecture.

L'élue albertaine avait plaidé qu'il fallait opter pour «l'égalité plutôt que le dogme» et affirmé que son parti devait prouver aux Canadiens qu'il est capable de «faire preuve de compassion», réfutant «l'argument selon lequel ce projet de loi empiéterait sur la liberté religieuse».

Et à ceux qui «portent des jugements de valeurs» en insinuant que les transgenres «sont les prédateurs dans les toilettes», Michelle Rempel avait rappelé que «les recherches indiquent qu'ils sont, au contraire, vulnérables, dans ces endroits publics».

Le spectre de la prédation sexuelle et de la pédophilie dans les toilettes et les vestiaires avait déjà été agité par le sénateur conservateur Donald Plett en 2015, alors qu'un comité de la chambre haute se penchait sur un projet de loi d'initiative parlementaire similaire à C-16.

La mesure législative C-279 parrainée par le néo-démocrate Randall Garrison était finalement morte au feuilleton - un sort qu'ont subi d'autres projets de loi sur les transgenres au cours des dernières années au Parlement - après avoir été adoptée aux Communes en 2013.

Cette fois-là, en 2013, seule une petite poignée de conservateurs, soit 18 élus sur une possibilité de 164, avait appuyé le projet de loi en troisième lecture. Michelle Rempel faisait partie de la majorité des députés de sa formation qui avait voté contre le projet de loi.

«J'avais conclu qu'il ne serait rien de plus qu'une action symbolique pour la communauté transgenre», a-t-elle expliqué, en entrevue à sa sortie des Communes, vendredi.

«J'avais tort. Au cours des trois dernières années, j'ai vu cette communauté subir de l'intolérance et encore plus de discrimination. (...) C'est pour cela que le Parlement doit selon moi adopter ce projet de loi», a offert l'élue de Calgary.

Il y a trois semaines, en comité parlementaire, son collègue manitobain Ted Falk a soutenu que le gouvernement tentait de régler un problème qui n'existe pas en élaborant une mesure législative essentiellement parce que «des gens ont été efficaces dans leur militantisme».

Il avait reproché à la ministre Wilson-Raybould de n'avoir pu fournir, de mémoire, des données sur la discrimination dont sont victimes les transgenres.

Reste à voir si les sénateurs conservateurs auront raison de C-16 comme ils avaient saboté sa version précédente. Toutefois, les conservateurs ne contrôlent plus la majorité des sièges au Sénat.

Le projet de loi C-16 amenderait le Code criminel pour clarifier «qu'une infraction motivée par des préjugés ou de la haine fondés sur l'identité ou l'expression de genre constituent une circonstance aggravante que le tribunal doit prendre en compte lorsqu'il détermine la peine à infliger».