Steven Blaney veut freiner la «lente et sûre érosion du socle (identitaire) canadien» en interdisant le vote et la prestation du serment de citoyenneté à visage couvert et en proscrivant le port de voile dissimulant le visage pour les employés de la fonction publique fédérale.

Le candidat à la direction du Parti conservateur s'est lancé à pieds joints sur le terrain identitaire en consacrant aux valeurs canadiennes la première annonce officielle de sa campagne, lundi matin.

Il compte «renforcer le modèle d'intégration» en revenant à la charge avec un projet de loi qu'il avait déposé en 2011 sur le vote à visage découvert - une mesure législative qu'il bonifierait d'amendements pour contraindre les fonctionnaires fédéraux à exercer leur rôle à visage découvert.

«L'ensemble de la fonction publique, qu'elle soit en contact direct (ou non) avec la population, doit refléter les socles de la société canadienne», a-t-il offert en point de presse.

Et si la Cour suprême du Canada «devait s'opposer à la volonté du Parlement» en invalidant ces mesures, un gouvernement dirigé par Steven Blaney «n'hésiterait pas à recourir à la disposition de dérogation», a-t-il souligné.

Pour assurer la pérennité des valeurs canadiennes, il préconise également la mise en place d'un test de citoyenneté amélioré et suggère de modifier le serment de citoyenneté afin, par exemple, d'y inclure un passage sur le respect de l'égalité entre les hommes et les femmes.

«Nous devons nous assurer que ces nouveaux Canadiens que nous accueillons comprennent comment nous vivons. Nous ne voulons pas que notre pays devienne comme le pays qu'ils ont quitté», a soutenu le candidat Blaney.

L'élu conservateur n'a pas été en mesure d'identifier un problème précis justifiant l'élaboration des mesures dévoilées lundi. Mais selon lui, il est clair qu'un débat sur l'identité s'impose, voire qu'il «gagne de plus en plus de terrain» à travers le pays.

«On le voit depuis des années au Québec, et le Québec a joué un rôle de leader dans les débats sur ces enjeux ouvertement, a-t-il offert. Je crois que nous sommes prêts, au Canada, pour une discussion robuste, mature et sereine sur notre identité canadienne.»

Les «valeurs anticanadiennes»

Steven Blaney devient ainsi le second aspirant à la direction conservatrice à signaler qu'il fera de l'identité un enjeu de sa campagne, après sa collègue Kellie Leitch et son filtrage des «valeurs anticanadiennes».

La position de cette dernière a été désavouée par la majorité de ses adversaires dans la course, surtout dans la foulée d'une campagne électorale perdante où les conservateurs ont été accusés d'avoir mis de l'avant des politiques de division, notamment celle sur le port du niqab aux cérémonies de citoyenneté.

Dans un point de presse qui coïncidait avec celui de son nouveau rival québécois, lundi matin, le candidat Michael Chong a fait valoir que la population n'a pas plus d'appétit maintenant qu'elle n'en avait il y a un an pour les questions identitaires.

«C'est le message que le peuple a lancé dans les élections fédérales et provinciales au Canada», a fait remarquer le député ontarien.

«Quand les partis ont présenté des politiques sur des enjeux comme le niqab, les électeurs ont dit (qu'ils étaient plutôt préoccupés) par les enjeux économiques», a-t-il soutenu en marge de son annonce sur la réforme démocratique, qui a été éclipsée par celle de M. Blaney.

Il suggère une réforme de la gestion des partis, notamment en éliminant le droit de veto du chef de parti sur les candidatures, et de la façon dont se déroulent les travaux parlementaires, par exemple en instaurant l'élection par scrutin secret des membres et présidents de comités.

Le député Chong croit par ailleurs qu'il faudrait retirer au premier ministre le pouvoir d'élire le président du Sénat et le représentant du gouvernement au Sénat afin de le confier, plutôt, aux membres de la chambre haute.

Le premier débat entre les candidats à la chefferie du Parti conservateur, qui se déroulera exclusivement en anglais, aura lieu le 9 novembre à Saskatoon. Une joute oratoire bilingue est prévue le 6 décembre à Moncton.