Malgré les critiques qui ont suivi son élection, le nouveau chef du Bloc québécois, Mario Beaulieu, n'a pas l'intention de changer de cap ni de discours. Et lors de sa première journée à Ottawa, il a annoncé avec aplomb que la campagne pour la promotion de l'indépendance commençait immédiatement.

Mario Beaulieu est venu à Ottawa mercredi pour sa première réunion hebdomadaire avec le caucus bloquiste.

Même si les quatre députés de la formation politique n'ont pas voté pour lui samedi dernier, la première réunion se serait «très bien passée», a déclaré le chef fraîchement élu, en entrevue avec La Presse Canadienne.

Il ne s'inquiète pas que son équipe de députés ne l'ait pas choisi ni qu'ils aient plus d'expérience à Ottawa que lui.

Ils sont des militants d'abord et avant tout, dit-il. Et puis, ils n'ont pas plus d'expérience politique que lui, mais plutôt une plus grande expérience parlementaire, corrige-t-il.

«Et j'ai eu l'appui de plusieurs anciens députés», rappelle-t-il.

Mario Beaulieu a fait campagne en promettant de «remettre la souveraineté à l'avant-plan» et de mettre fin à la «stratégie étapiste et attentiste qui a été utilisée depuis 20 ans». Faisant contraste, l'autre aspirant-chef, le député André Bellavance, jugeait qu'il fallait plutôt commencer par élargir la coalition de militants en incluant non pas uniquement ceux qui sont souverainistes, mais aussi tous ceux qui sont, selon ses mots, «dédiés à l'avancement du Québec».

Le discours de victoire de samedi de M. Beaulieu en avait irrité plus d'un: ceux qui ont perçu qu'il critiquait le travail de ses prédécesseurs et ceux qui n'ont pas digéré qu'il ait cité un slogan associé au FLQ.

Après son élection, les députés bloquistes l'ont invité à tenir compte des autres points de vue et à se faire plus conciliant. Ils jugeaient évidemment que son approche n'est pas la meilleure pour faire élire plus de députés à Ottawa.

«Tout changement important de stratégie peut susciter des inquiétudes», a ainsi confié M. Beaulieu lors de l'entrevue, réfléchissant aux derniers jours.

Mais ses idées demeurent inchangées.

«Depuis 1995, il n'y a pas vraiment eu une offensive majeure pour l'indépendance. C'est ce que les gens attendent, les indépendantistes, ils ont soif d'action», maintient-il pour expliquer qu'il garde le cap.

Le député Jean-François Fortin confirme l'ambiance positive qui a entouré leur rencontre de mercredi.

«Ce n'était pas unilatéral. Il y a eu des échanges francs et ouverts», dit-il.

«Et ça nous a permis de lui faire part de la réalité parlementaire et de clarifier certaines positions», ajoute-t-il.

M. Fortin croit qu'il est normal que certains se soient un peu échauffés lors de la course à la direction, mais affirme ne pas être inquiet pour le moment.

Choisi par les militants alors que la session parlementaire est pratiquement terminée, M. Beaulieu prépare son «offensive indépendantiste» en prévoyant faire du porte-à-porte, des assemblées de cuisine et organiser une tournée des cégeps et des universités à l'automne.

«On va commencer dès maintenant la campagne de promotion de l'indépendance», dit-il.

Car le nouveau chef croit que sa tâche première est d'être sur le terrain.

Il promet toutefois d'être à Ottawa plusieurs jours par semaine, pour défendre les intérêts du Québec, comme la nomination des juges à la Cour suprême, dit-il.

Ses dossiers prioritaires seront ceux qui toucheront à l'économie, comme le transport du pétrole, mais il n'a pas été plus précis, affirmant que l'ensemble de la stratégie du parti «n'a pas encore été déterminé».

Le chef admet qu'il est difficile pour le Bloc d'être très visible, avec si peu de députés et avec un chef qui n'est pas élu et qui ne peut donc pas intervenir à la Chambre des communes. Un handicap que son prédécesseur, Daniel Paillé, avait également.

«C'est pourquoi on va travailler fort avec l'aile parlementaire», explique-t-il.

Il n'a d'ailleurs pas l'intention de prendre le siège d'un député, a-t-il confirmé en entrevue. Son but est de se faire élire aux élections générales de 2015.

Mario Beaulieu dit avoir hâte de rencontrer les autres chefs à Ottawa, mais admet du même souffle qu'aucune rencontre n'a été organisée.

Le chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair, et celui du Parti libéral, Justin Trudeau, se sont tous deux dits disposés à discuter avec le nouveau chef bloquiste, sans toutefois montrer d'empressement.