Stephen Harper a rencontré samedi son nouvel homologue ukrainien, devenant le premier dirigeant du G7 à se rendre sur la place de Kiev qui a été le théâtre du soulèvement pro-démocratie le mois dernier.

Durant sa visite de six heures en Ukraine, le premier ministre a appelé à un «renversement complet» de l'annexion par la Russie de la péninsule de Crimée. Il a également laissé entendre que la Russie devrait être expulsée du Groupe des huit (G8).

Après avoir tenu ces propos, M. Harper a déposé un grand bouquet d'oeillets rouges le long d'un mur de pierre près de la place de l'Indépendance, où des dizaines d'Ukrainiens ont perdu la vie durant le soulèvement, abattus par leur propre armée avant que l'ancien gouvernement ne soit délogé du pouvoir, le mois dernier.

La révolte a provoqué une série de réactions en chaîne, dont l'annexion formelle de la Crimée par la Russie, vendredi. Il s'agit de la pire crise en Europe de l'Est depuis la fin de la guerre froide.

Le premier ministre a incliné la tête devant le mur, qui sert maintenant de monument commémoratif pour les victimes. Il a été suivi du ministre des Affaires étrangères, John Baird, et du ministre de la Justice, Peter MacKay.

Alors que des Ukrainiens profitaient d'une journée radieuse et se promenaient sur la place, les ministres canadiens ont traversé des barrières improvisées faites de pneus, de briques et d'articles ménagers, qui protégeaient les manifestants des tireurs d'élite postés sur les toits il y a seulement quelques semaines.

Une multitude de bouquets de fleurs ajoutaient des touches de couleur à la chaussée endommagée et aux barricades. Les fleurs avaient été déposées aux endroits où des manifestants ont perdu la vie durant le soulèvement.

Une immense catapulte trônait au centre de la place, visant directement l'édifice du gouvernement.

«Il revient aux Ukrainiens, et seulement aux Ukrainiens, de décider de leur avenir», a déclaré M. Harper lors d'une conférence de presse en compagnie du premier ministre ukrainien, peu après sa visite sur la place de l'Indépendance.

«Le Canada ne renoncera pas à ce principe. Et nous ne ménagerons aucun effort pour aider le peuple ukrainien à se construire pacifiquement un avenir radieux de liberté.»

M. Harper a rencontré le premier ministre ukrainien, Arseni Iatseniouk, dans l'édifice du cabinet des ministres. Il lui a remis le drapeau ukrainien qui a flotté sur la colline du Parlement canadien pendant une partie de la révolte et a déclaré que les négociations de libre-échange entre le Canada et l'Ukraine seront relancées.

Le premier ministre canadien a ensuite rencontré en privé le nouveau président ukrainien au palais présidentiel.

Durant la conférence de presse, M. Iatseniouk a vivement remercié le Canada pour son appui indéfectible à l'Ukraine.

Il a paru agité en rappelant aux journalistes que son pays avait volontairement abandonné son arsenal nucléaire il y a plusieurs années, pour se retrouver aujourd'hui face au «vol armé de l'indépendance de l'Ukraine» par la Russie.

M. Iatseniouk a lancé à la blague que l'Ukraine pourrait remplacer la Russie au sein du G8.

«Si le G8 a un siège vide, nous sommes prêts à le prendre», a-t-il dit, provoquant l'hilarité des médias et des politiciens présents.

M. Harper, de son côté, n'a pas caché sa position quant à la place de la Russie dans le G8.

«Je pense qu'il ne faut pas beaucoup d'imagination pour comprendre quelle est mon opinion, mais je vais très certainement écouter ce que nos partenaires du G7 ont à dire avant que nous en arrivions à une décision finale», a-t-il déclaré.

Le Canada, qui a déjà octroyé une aide de 220 millions $ à l'Ukraine, a annoncé qu'il fournirait aussi 775 000 $ pour le financement d'une mission d'observation de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en Ukraine.

«Pour l'Ukraine, les conséquences des actions du régime Poutine sont évidentes et ne peuvent être corrigées que par leur renversement complet», a déclaré M. Harper.

«Tous ceux d'entre nous qui désirent la paix et la stabilité dans le monde doivent reconnaître que les conséquences de ces actions seront ressenties bien au-delà des frontières de l'Ukraine et même du continent européen.»

Le premier ministre canadien devrait livrer son compte-rendu de la situation en Ukraine à ses collègues du G7 lundi et les pousser à adopter une position plus ferme face à la Russie.