L'une des pierres angulaires de la stratégie gouvernementale dans l'Arctique est enlisée en raison d'un nettoyage environnemental avançant à pas de tortue et les risques de poursuites judiciaires, révèlent des documents fédéraux.

Le port en eaux profondes de Nanisivik, au Nunavut, demeure sous le contrôle de Pêches et Océans Canada, six ans après que le premier ministre Stephen Harper eut annoncé la création d'une station de ravitaillement maritime très loin dans cet archipel nordique. Le port doit être transformé par l'armée afin de renforcer la souveraineté canadienne dans le Nord.

Mais une entreprise privée qui exploite une mine de zinc désormais abandonnée dans la région, Breakwater Resources, qui appartient à Nyrstar N.V., doit d'abord compléter le nettoyage d'un terrain contenant des réservoirs de carburant. L'armée fait pression depuis quatre années pour que ce soit fait.

Une remise en état de l'endroit, qui appartient au gouvernement fédéral, est nécessaire avant que la Défense ne puisse en prendre possession.

«La propriété est encore sous l'administration du ministère des Pêches et Océans, et le moment du transfert sera déterminé dans un avenir rapproché», a déclaré par courriel le major Andre Salloum, porte-parole de la Défense.

«Nyrstar N.V. n'a pas complété la remise en état», a-t-il dit.

Malgré cela, la Défense a récemment dû fournir une nouvelle étude d'impact environnemental au gouvernement territorial du Nunavut. Des documents fédéraux révèlent que des responsables de la défense s'inquiètent depuis longtemps de ce qu'ils considèrent comme de la mauvaise volonté de la part de l'entreprise, notant qu'aucun nettoyage n'avait eu lieu lors de la saison de la construction estivale de 2009.

«Les délais de la compagnie pour exécuter les travaux est un important risque en ce qui concerne le calendrier et les coûts du projet», mentionne une note d'information préparée à l'intention de l'ex-ministre de la Défense Peter MacKay, à l'automne 2009.

L'armée a clairement indiqué son absence d'intérêt pour le terrain et ses réservoirs qui faisaient partie de la propriété minière, et qu'elle voulait que les vieilles structures soient démolies.

La compagnie a toutefois effectué des démarches pour faire changer d'avis la Défense, une option à laquelle s'opposent vertement des responsables, puisque cela signifierait que le ministère «assumerait la responsabilité et l'imputabilité» du nettoyage.

La facture du projet a déjà gonflé à 116 millions $, après des coûts initiaux estimés à 100 millions $.

Le port doit être transformé pour accueillir les six à huit brise-glace légers, ou navires de patrouille dans l'Arctique, que le gouvernement conservateur envisage de construire, afin de renforcer la souveraineté canadienne dans le Nord.

Tout comme les installations de Nanisivik, le projet des navires accuse du retard, et les bateaux ne seront pas fonctionnels avant plusieurs années.

De l'autre côté du cercle polaire, les Russes ont quant à eux investi des centaines de millions de dollars pour relancer jusqu'à 10 bases dans l'Arctique afin de les utiliser pour des missions de recherche et de sauvetage le nord de leur route maritime arctique. Des ports sont également mis à jour.