Le Parti libéral a refusé, mercredi, de divulguer la formule qu'il favoriserait pour modifier la représentation à la Chambre des communes -et de dire si cette formule enlèverait des sièges au Québec.

Mais si l'on se fie à un discours prononcé par Stéphane Dion à Halifax le 3 novembre dernier, la province francophone verrait son nombre de députés diminuer.

Les troupes du chef intérimaire Bob Rae ont attiré l'attention en comité parlementaire, mardi, en proposant de s'en tenir à la limite actuelle de 308 députés dans l'effort mené à Ottawa pour équilibrer la représentation populaire aux Communes.

Elles ont pris position par rapport au projet de loi C-20 du gouvernement Harper, par lequel on créerait 30 nouvelles circonscriptions dans 4 provinces: l'Ontario (15), l'Alberta (6), la Colombie-Britannique (6) et le Québec (3).

Les conservateurs tentent ainsi de permettre aux provinces dont la population a beaucoup augmenté au cours des dernières années d'être représentées de manière proportionnelle au Parlement, sans pour autant trop diminuer le poids démocratique du Québec.

Les libéraux voient les choses autrement. «J'ai voyagé dans le pays depuis quatre mois et je n'ai pas trouvé quelqu'un qui me disait que la solution aux problèmes que nous avons au pays, c'est d'augmenter le nombre de politiciens qu'on a à Ottawa. Personne n'a proposé cette solution», a réitéré Bob Rae hier.

«Si on va sur cette voie, en 2030, il y aura 400 députés, puis 500 et 600... À quel moment est-ce que ça va arrêter?»

Selon les chiffres du gouvernement, un député coûte environ 640 000$ par an aux contribuables, 500 000$ de plus pour une année électorale.

Gardant ces préoccupations en tête, M. Rae croit qu'il est possible de «créer une formule qui respecte le caractère spécifique du Québec, qui respecte la Constitution canadienne et, en même temps, dont la proportion respecte les populations des provinces».

Mais quelle est cette formule et combien de sièges chaque province recevrait-elle? Ni le chef intérimaire ni ses députés n'ont voulu la divulguer. Ils se sont contentés de réitérer ce que leur collègue Marc Garneau a affirmé en comité parlementaire mardi: on peut, en se limitant à une Chambre des communes de 308 sièges, parvenir aux mêmes pourcentages avancés dans le projet de loi C-20.

Ces nouveaux pourcentages seraient de 23,28% des sièges pour le Québec (78 sièges), 36,12% pour l'Ontario (121 sièges), 12,54% pour la Colombie-Britannique (42 sièges) et 10,15% pour l'Alberta (34 sièges). À l'heure actuelle, ils sont de 24,59% (75 sièges), 34,75% (106 sièges), 11,8% (36 sièges) et 9,18% (28 sièges). Au dernier recensement, le Québec représentait 23,22% de la population, l'Ontario 38,91%, la Colombie-Britannique 13,31% et l'Alberta 11%.

«Essentiellement, le plan libéral ferait en sorte que le Québec perdrait des sièges, a réagi le ministre d'État responsable de la Réforme démocratique, Tim Uppal. Terre-Neuve-et-Labrador perdrait des sièges. La Nouvelle-Écosse perdrait des sièges. La Saskatchewan perdrait des sièges. Le Manitoba perdrait des sièges, en compensation pour l'Alberta, la Colombie-Britannique et l'Ontario. Nous ne croyons pas que c'est juste.»

Dans un discours prononcé il y a quelques semaines, le porte-parole du Parti libéral en matière de réforme démocratique, Stéphane Dion, a semblé lui donner raison: «Nous pouvons facilement rééquilibrer la proportion de sièges au bénéfice des provinces en forte croissance, maintenir la représentativité proportionnelle des autres provinces et protéger les moins nombreuses par la clause sénatoriale, sans pour autant augmenter le nombre de députés», a-t-il déclaré.

«Cela dit, il n'est pas sûr que nous puissions obtenir l'appui du Nouveau Parti démocratique. En effet, ce parti croit que, comme le Parlement a reconnu que les Québécois forment une nation distincte au sein du Canada, le taux de représentation du Québec à la Chambre des communes devrait être gelé au niveau actuel à perpétuité. Quant à moi, et comme de nombreux experts le pensent, je suis d'avis que le Parlement n'a pas le pouvoir constitutionnel d'enfreindre à ce point le principe de représentation proportionnelle, sans l'appui d'au moins sept provinces représentant au moins 50% de la population canadienne», a-t-il ajouté.

En d'autres termes, les 75 sièges du Québec à la Chambre des communes ne représentent pas un seuil immuable.

S'agit-il de la position du Parti libéral? Et, si oui, quels seraient ses calculs et à combien de sièges le Québec aurait-il droit? On a refusé de le préciser et M. Dion a décliné nos demandes d'entrevue.