Dans la lutte qu'il entreprend pour éliminer le déficit d'ici 2014-2015, le gouvernement Harper a épargné d'emblée trois vaches sacrées: les transferts aux provinces, les transferts aux particuliers et les impôts qui ne seront pas augmentés.

Les autres dépenses de l'État environ 80 milliards sur un budget total de 280 milliards - seront donc passées au peigne fin afin de trouver des économies annuelles d'au moins 4 milliards. Dans son budget, Ottawa doit aussi mettre de côté une somme de 33 milliards pour payer les frais de la dette accumulée.

Selon des informations obtenues par La Presse, Stephen Harper a demandé à ses ministres avant le début de l'été de lui fournir deux plans de réduction de dépenses d'ici l'automne: le premier doit prévoir des compressions de 5% du budget de leur ministère et le deuxième doit arriver à une diminution des dépenses de 10%.

C'est au président du Conseil du Trésor, Tony Clement, qu'incombe cette opération du bistouri à l'échelle du gouvernement. Les compressions seront incluses dans le prochain budget du ministre des Finances Jim Flaherty, en février 2012.

«Nous avons reçu le mandat de la population d'éliminer le déficit et nous allons le faire. Des programmes jugés moins essentiels seront éliminés, c'est évident. Des groupes seront mécontents. Mais nous sommes déterminés à revenir à l'équilibre», a confié une source conservatrice à La Presse.

Les économies de 4 milliards que comptent dénicher les conservateurs s'ajoutent au gel des dépenses de deux ans imposé à tous les ministères l'an dernier. À lui seul, ce gel doit engendrer des économies de 1,8 milliard.

«C'est sûr que des gens vont crier à Ottawa. Il va peut-être y avoir des manifestations. Mais nous sommes prêts. L'important, c'est de faire le ménage rapidement, dès le prochain budget», a-t-on indiqué.

Attrition

Au cours des dernières semaines, plusieurs ministres ont confirmé que le couperet tomberait bientôt sur leurs ministères respectifs et qu'ils tenteraient de limiter les dégâts en ne remplaçant pas les employés qui prennent leur retraite.

Environnement Canada a annoncé la semaine dernière la suppression de 776 postes d'ici 90 jours. Le ministère des Pêches et Océans doit réduire ses dépenses de 53 millions. Le ministère de la Défense prévoit la suppression de 2100 postes au cours des trois prochaines années.

L'Alliance de la fonction publique du Canada, qui représente 172 000 employés de l'État, craint que les fonctionnaires fassent les frais de la lutte contre le déficit et que les services offerts à la population soient réduits.

Mais dans les rangs conservateurs, on juge essentiel de respecter l'échéancier prévu pour rétablir l'équilibre budgétaire d'ici trois ans étant donné la récente crise provoquée par l'endettement des pays d'Europe et des États-Unis.

On affirme aussi que, si le Canada s'est mieux tiré d'affaire que la majorité des autres pays durant la récession mondiale de 2008, c'est parce qu'il n'accusait pas de déficits avant la crise. Chose certaine, ils estiment qu'il est crucial de procéder aux compressions dès le début du mandat.

D'ailleurs, le ministre des Finances Jim Flaherty a exhorté encore cette semaine les pays comme les États-Unis et ceux de l'Europe à se doter d'un plan précis de réduction du déficit pour calmer la tempête sur les marchés financiers et assurer une reprise durable de l'économie mondiale.

M. Flaherty fera le point sur la situation économique du pays devant le comité des finances demain. Le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, doit aussi intervenir.

La semaine dernière, M. Flaherty avait affirmé que les turbulences économiques qui ont frappé plusieurs pays présentaient certains risques pour le Canada. Mais il avait aussi certifié que l'équilibre budgétaire d'ici 2014-2015 demeurait un objectif.