Air Canada et le syndicat des agents des services à la clientèle ont 48 heures pour parvenir à une entente, faute de quoi le gouvernement canadien présentera un projet de loi pour mettre fin à la grève des 3800 agents des centres d'appels et des comptoirs d'enregistrement.



Durant la période des questions, mardi, à Ottawa, la ministre du Travail, Lisa Raitt, a affirmé que cette grève perturbe le transport aérien et risque de nuire à la reprise économique, qui demeure fragile.

Selon les règles parlementaires, la ministre pourra déposer le projet de loi d'ici 48 heures. Le gouvernement Harper devra obtenir la collaboration des partis de l'opposition pour l'adopter rapidement, ce qui est plutôt improbable étant donné la position traditionnelle du NPD pour les droits des travailleurs syndiqués.

Résultat: le gouvernement Harper pourrait utiliser le bâillon pour forcer l'adoption de son projet de loi. En principe, la session parlementaire doit prendre fin le 23 juin.

Les 3800 agents des services à la clientèle d'Air Canada se sont mis en grève à 0h01 dans la nuit de lundi à mardi. Air Canada a assuré qu'elle maintiendra ses activités grâce à un plan de contingence qui met à contribution plus de 1700 cadres. Le transporteur a toutefois incité les passagers à utiliser les bornes libre-service et l'enregistrement en ligne.

Les représentants d'Air Canada et de la section locale 2002 des Travailleurs canadiens de l'automobile se sont brièvement rencontrés mardi matin dans un hôtel du centre-ville de Toronto.

«Il n'y a pas de moment établi pour une nouvelle rencontre. Mais comme les deux parties sont toujours à l'hôtel, on peut dire que les discussions sont en cours, a commenté le coordonnateur des communications de la section locale 2002, Darryl Bink. Nous serons prêts à discuter lorsque l'entreprise sera prête à discuter.»

Le régime de retraite

Le conflit porte essentiellement sur le régime de retraite. Air Canada souhaite reporter de 55 à 60 ans l'admissibilité à la préretraite et remplacer le régime à prestations déterminées par un régime à cotisations déterminées pour les nouveaux employés.

«Cette proposition aurait des effets dramatiques sur nos membres», estime M. Bink.

Air Canada a expliqué que, après 75 ans d'histoire, il a un passif d'environ 13 milliards de dollars au titre des régimes de retraite. Il rappelle que 26 000 employés actifs soutiennent 29 000 retraités.

Au 1er janvier 2011, le déficit des régimes de retraite d'Air Canada s'établissait à 2,1 milliards de dollars. Selon l'entreprise, ce déficit met en danger la viabilité d'Air Canada et la retraite de tous ses employés.

«Nous sommes conscients que les employés ont fait des sacrifices au cours des dernières années, a déclaré le chef de l'exploitation d'Air Canada, Duncan Dee, au cours d'un point de presse à l'aéroport d'Ottawa mardi après-midi. C'est pour cela que nous avons offert d'augmenter les salaires et de protéger le régime de retraite.»

Il n'a pas voulu commenter la possibilité d'une loi forçant de retour au travail, sinon pour reconnaître qu'il s'agit d'un geste «rapide» de la part d'Ottawa.

«Nous sommes prêts à revenir à la table des négociations en tout temps, a déclaré la porte-parole d'Air Canada à Montréal, Isabelle Arthur. Bien que de telles négociations constituent un réel défi, nous espérons que nos efforts aboutiront à la négociation d'un contrat à l'avantage des deux parties selon le processus normal.»

Toutefois, sans loi d'exception, le conflit pourrait se prolonger parce que le syndicat des agents des services à la clientèle subira des pressions de la part des autres syndicats du transporteur pour résister à l'affaiblissement du régime de retraite.

«Les Travailleurs canadiens de l'automobile sont les premiers à être en position de grève, a rappelé l'analyste Cameron Doerksen, de la Financière Banque Nationale. Tout ce qui sera négocié servira donc de point de référence pour les autres syndicats. La pression sera forte.»

Air Canada est actuellement en négociations avec 3000 pilotes, représentés par l'Association des pilotes d'Air Canada, 4000 techniciens d'entretien, représentés par l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale, et 6800 agents de bord, représentés par le Syndicat canadien de la fonction publique.

«Accepter l'offre actuelle serait néfaste pour nos membres et néfaste pour les autres syndicats», a déclaré M. Bink.