Le gouvernement Harper est coupé de la réalité quotidienne des Canadiens, estime le chef du Parti libéral, Michael Ignatieff. Il en veut pour preuve les milliards de dollars qu'il consacre à l'achat d'avions de chasse, à la construction de nouvelles prisons ou à de nouvelles baisses d'impôts aux entreprises.

Revigoré par une tournée estivale qui a permis à ses troupes de rivaliser avec les conservateurs dans les sondages, M. Ignatieff a tenté lundi de mettre le gouvernement conservateur sur la défensive en énumérant un certain nombre de dépenses controversées alors que le pays est toujours aux prises avec un déficit de 45 milliards de dollars.

Selon le chef libéral, le premier ministre a des comptes à rendre aux Canadiens pour toutes ces dépenses alors que la reprise économique demeure fragile et que les retraités craignent de ne pas avoir assez d'économies pour assurer leurs vieux jours.

Pour marquer la fin de sa tournée estivale et la reprise des travaux parlementaires, M. Ignatieff s'est rendu lundi midi sur la colline parlementaire à bord de L'Express libéral, l'autocar qui l'a conduit aux quatre coins du pays durant l'été. Ses députés et sénateurs l'ont accueilli en héros. «Avec plus de 56 000 km parcourus, nous avons une idée claire de ce que veulent les Canadiens. Ils veulent un gouvernement qui a la même priorité qu'eux, c'est-à-dire de renforcer l'économie pour les aider à faire face à l'augmentation du coût de la vie», a déclaré le chef libéral aux journalistes.

M. Ignatieff a ensuite dénoncé l'intention du gouvernement Harper de construire des prisons qui pourraient coûter 13 milliards de dollars aux contribuables et l'achat de 65 avions de chasse au coût de 9 milliards de dollars.

Il a de nouveau promis de suspendre ce contrat, accordé sans appel d'offres à Lockheed Martin, une société américaine, le temps d'évaluer les besoins des Forces armées canadiennes. Les avions de chasse F-35 doivent remplacer les CF-18 à partir de 2016.

Le chef libéral estime en outre irresponsable d'accorder de nouvelles baisses d'impôts aux entreprises (6 milliards de dollars) alors que leur taux d'imposition est parmi le plus bas des pays du G7.

«Les Canadiens sont extrêmement inquiets de voir que nous avons un déficit de 50 milliards de dollars et que nous nous apprêtons à acheter des avions de chasse sans appel d'offres et sans aucune garantie qu'il y aura des retombées économiques pour nos régions. Avons-nous besoin de ces avions? Devons-nous acheter ces avions maintenant alors que nous avons un déficit encore? Nous n'en sommes pas convaincus», a dit M. Ignatieff.

Aux Communes, le premier ministre Stephen Harper a riposté aux critiques du chef libéral en disant que la priorité de son gouvernement, à l'instar d'une forte majorité de Canadiens, demeure l'économie et la création d'emplois. Il a ensuite défendu la décision d'acheter les avions par le fait qu'un gouvernement qui envoie des troupes dans des zones dangereuses à l'étranger a l'obligation de leur fournir de l'équipement adéquat. Il a rappelé que c'est un gouvernement libéral, en 2001, qui a participé avec huit autres pays au projet de mise au point de cet avion et que Lockheed Martin était à l'époque la seule entreprise capable de le construire. Enfin, il a soutenu que si l'économie du Canada se porte mieux que les autres, c'est grâce aux mesures fiscales adoptées par son gouvernement.

«La priorité du gouvernement est l'économie. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons une performance supérieure de l'économie du Canada comparativement aux autres. J'ai voyagé aussi au pays. J'ai vu 16 000 projets créateurs d'emplois en cours. Une récente étude de l'OCDE a dit que les décisions prises en temps opportun par le gouvernement ont circonscrit les dommages financiers et économiques causés par la récession mondiale», a dit M. Harper sous les applaudissements de ses troupes.

Le premier ministre a ensuite dit préférer «avoir des criminels en prison plutôt que dans la rue» pour justifier les décisions de son gouvernement en matière de lutte contre la criminalité.