Une délégation de politiciens du sud et du nord du Soudan a mis la touche finale à sa visite canadienne, vendredi dernier, avec une série de rencontres à l'Université d'Ottawa.

Ces ténors du parti du président soudanais Omar el-Béchir et des ex-rebelles sudistes sont venus au pays pour apprendre de l'expérience canadienne lors des deux référendums sur l'indépendance du Québec. Ils souhaitaient ainsi se préparer au plébiscite sur la sécession du Sud-Soudan.

La tournée d'une semaine, organisée par le gouvernement canadien et l'Institut d'administration publique du Canada, a mené le groupe à Montréal, Québec et Ottawa. La délégation a entre autres pu rencontrer le parrain de la Loi sur la clarté, Stéphane Dion, et l'ex-député péquiste Daniel Turp.

À la faculté de droit de l'Université d'Ottawa, vendredi, les politiciens soudanais ont écouté l'ancien ministre des Affaires intergouvernementales du Québec Benoît Pelletier leur expliquer certaines nuances entre nationalisme, fédéralisme et séparatisme, ainsi que l'évolution du débat sur l'unité nationale au pays.

M. Pelletier a insisté tout particulièrement sur l'importance de la décision de la Cour suprême dans son renvoi sur la sécession de 1998.

«Ça a changé le débat, a-t-il fait valoir. Et maintenant, quand nous parlerons de la sécession du Québec, nous devrons considérer non seulement les aspects politiques, mais aussi, pour avoir un portrait plus global, les aspects légaux.»

«Ça me semble être dans l'intérêt des fédéralistes, pour protéger le fédéralisme, afin que les Québécois n'essaient pas une autre fois», a noté la Dr Ann Itto Leonardo, secrétaire générale adjointe du Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM), et qui dirigeait la délégation du Sud. «Ce ne sont pas des mots que j'utiliserais moi-même», a répliqué Benoît Pelletier en riant.

Les Sud-Soudanais doivent se prononcer en janvier prochain à l'occasion d'un référendum dans lequel ils auront à choisir entre leur indépendance ou leur maintien au sein du pays.

Selon la loi référendaire soudanaise, l'indépendance du Sud-Soudan sera reconnue si cette option récolte une majorité absolue (50% plus une voix) avec une participation de 60% des inscrits au registre des électeurs.

Ce référendum est l'élément clé de l'accord de paix global (CPA) qui a mis fin en 2005 à deux décennies de guerre civile entre le Nord, majoritairement musulman, et le Sud, en grande partie chrétien. Ce conflit à l'origine de deux millions de morts était nourri par des différends politiques, religieux, ethniques et économiques.

«Nous pensons que la situation du Québec est très similaire à celle du Soudan», a indiqué le Dr Gotbi ElSanousi, député du parti au pouvoir et conseiller du président lors des négociations qui ont mené à l'accord de paix.

«Nous sommes venus étudier la loi sur les référendums, le processus et la situation politique. Nous voulions savoir comment les gens au Québec et dans le reste du Canada se sont comportés à la suite des résultats.»

Le contexte politique et la question de la sécurité demeurent la grande différence entre les deux pays, croit pour sa part Ann Itto Leonardo. Or, selon elle, la capacité du Soudan d'imiter l'exemple canadien et de tenir l'exercice démocratique sans éruption de violence est loin d'être acquise.

Avec l'Agence France-Presse