Le Nouveau Parti démocratique s'est vu refuser par le Bureau du Conseil privé le mois dernier, en pleine campagne électorale, une demande anodine d'accès à l'information sur les notes transmises au premier ministre Stephen Harper par ses fonctionnaires sur le déroulement de la campagne présidentielle américaine.

Un employé du NPD, Scott Harris, a déposé en effet en juillet dernier une demande d'accès au Bureau du Conseil privé - le ministère du premier ministre - afin d'obtenir les documents d'informations préparés pour M. Harper sur le déroulement des primaires démocrates en avril et en mai 2008. Le Bureau du Conseil privé a transmis ces documents au NPD, mais ceux-ci ont d'abord été caviardés en quasi-totalité, même lorsqu'il s'agissait de sondages sur les candidats, des sondages pourtant publics.

 

Le gouvernement a invoqué l'article 15 de la loi sur l'accès à l'information pour justifier son refus, un article qui précise que les documents qui peuvent nuire à la conduite des affaires internationales du Canada ou à sa défense peuvent être refusés au demandeur. «Le gouvernement n'a aucune raison valable pour nous refuser ces documents, a soutenu à La Presse le député néo-démocrate d'Outremont, Thomas Mulcair. Ils nous ont donné un petit bout qui nous apprend la victoire d'Hillary Clinton en Pennsylvanie. Ils ne nous ont refilé que cela. Tout le reste est complètement caviardé. C'est inimaginable.»

Les documents qui totalisent une trentaine de pages, également obtenus par La Presse, fournissaient en plus au premier ministre des informations rédigées par l'ambassade du Canada à Washington sur le marché régional du carbone aux États-Unis, sur les nouvelles politiques environnementales de George W. Bush, sur la course à la présidence et sur des sondages relatifs à cette course. Il ne reste de ces informations soigneusement masquées que les entêtes.

«Qu'y a-t-il de secret dans tout cela?» demande Thomas Mulcair.

Le NPD va porter plainte

Le NPD a bel et bien l'intention de porter plainte au commissaire à l'information. «Les procédés du Bureau du Conseil privé sont abusifs, dénonce M. Mulcair. Tout cela est pour nous le reflet de cette culture du secret dont M. Harper ne s'est jamais départi. Je pense que cela fait partie de ses problèmes. Non seulement il est une personne qui veut contrôler ses propres ministres et ses députés, mais, même pour un truc aussi banal que de donner les résultats des sondages qui lui sont communiqués, afin qu'il apprécie ce qui se passe aux États-Unis, il met des bâtons dans les roues.»

Les plaintes des partis de l'opposition au sujet du traitement des demandes d'accès par le gouvernement Harper ont été nombreuses et permanentes pendant le précédent mandat des conservateurs.

La députée bloquiste, Carole Lavallée, rappelait en ces pages, il y a près d'un an, que le gouvernement conservateur s'était fait élire avec la promesse d'être transparent, mais qu'il n'avait rien fait pour respecter cet engagement. Mme Lavallée, à l'instar de ses collègues de tous les partis de l'opposition, reprochait à l'époque au ministre de la Justice son refus de rencontrer les députés de l'opposition afin de les entendre sur leur volonté de réformer la Loi sur l'accès à l'information.

L'un des exemples les plus risibles de l'opacité du gouvernement à cet égard fut lorsque La Presse a demandé à connaître le prix de la bouteille de vin de glace offerte par le ministre des Affaires étrangères du Canada à l'époque, Peter MacKay, à la secrétaire d'État américaine, Condoleezza Rice, lors de la visite de cette dernière à Ottawa, en février 2007. On nous répondit qu'il s'agissait d'un secret d'État dont la divulgation risquait de porter préjudice à la conduite des affaires internationales du pays.

Il a fallu plus d'une année de plaintes et de pressions pour enfin apprendre, il y a un mois, que la fameuse bouteille de vin de glace (un Riesling de Henry of Pelham) a coûté au Trésor public 30,22$.