(Québec) La filière batterie que Québec veut développer « n’a pas besoin de Honda pour réussir », assure le ministre Pierre Fitzgibbon, qui estime avoir fait une offre « appropriée » pour séduire le géant nippon. L’accueil du mégaprojet d’électrification aurait par ailleurs posé « un enjeu » pour la disponibilité d’énergie.

« Ça aurait été intéressant. J’aurais aimé l’avoir, mais il y avait un prix, un support qu’il fallait donner », a fait valoir le superministre du gouvernement Legault à son arrivée à la période des questions, mardi. « Je regardais les autres filières, j’ai une liste [de projets] pour 13 000 mégawatts et je n’ai pas de mégawatts disponibles, alors un moment donné, tu gères ton risque », a ajouté M. Fitzgibbon.

Honda devrait effectuer un investissement d’électrification d’environ 15 milliards en Ontario, et le Québec souhaitait obtenir une partie du projet, soit la fabrication de cathodes. Or, il a été révélé lundi que la proposition du gouvernement du Québec était inférieure de quelques centaines de millions à celle de l’Ontario. M. Fitzgibbon a confirmé mardi avoir eu « plusieurs discussions » avec le géant nippon.

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« Si Honda avait été le premier projet de cathodes, j’aurais été plus agressif », a plaidé le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie. M. Fitzgibbon a rappelé que le Québec a maintenant trois projets sur la table avec ceux de Ford, General Motors (GM) et Northvolt.

« On a été approché », a admis le ministre. « J’ai offert ce que je considère qui était approprié, il y avait un enjeu au niveau des mégawatts, on manque de mégawatts, si j’avais donné des 300, 400 mégawatts à Honda, ça aurait été ça de moins à d’autres », a-t-il ajouté.

Selon lui, le Québec n’a pas besoin de Honda pour « réussir » le développement de la filière batterie – un projet cher au gouvernement Legault. « Ça aurait été le fun de l’avoir. Quand on va chasser, on aimerait ça avoir 100 % de succès, mais force est d’admettre que la filière batterie n’a pas besoin de Honda pour réussir », a résumé M. Fitzgibbon.

Depuis plusieurs mois

La Presse rapportait mardi que le gouvernement Legault discutait avec Honda depuis plusieurs mois. Le nom du constructeur automobile figure au registre québécois des lobbyistes depuis l’été dernier à propos de la « filière des véhicules électriques ». Québec souhaitait attirer Honda dans le parc industriel de Bécancour, où General Motors et Ford construisent actuellement des usines de matériaux de cathodes.

Dans un contexte budgétaire marqué par un déficit record au Québec (11 milliards), il était plus difficile de reproduire des aides financières aussi généreuses que par le passé. Pour l’usine québécoise de Ford, le gouvernement Legault avait offert 320 millions sous forme de prêt sans intérêt, dont une bonne partie risque de se transformer en prêt-subvention. Dans le cas de GM, l’aide de Québec atteint 152 millions.

Mardi dernier, à l’occasion de l’étude des crédits budgétaires du ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, le ministre Pierre Fitzgibbon avait laissé entendre que l’approche de Québec risquait de changer à l’endroit de la filière batterie, qui représente 16 milliards en projets annoncés jusqu’à présent.

« Ça pourrait arrêter à 16 [milliards], mais je crois que ça va aller à 20 milliards et là, on commencera à possiblement être plus rigoureux sur le [soutien] financier de par le fait qu’après avoir bâti notre notoriété, on sera capable d’être moins généreux. »

Avec Julien Arsenault, La Presse