(Montréal) L’ouverture d’un bureau du Québec à Tel-Aviv n’est « en rien » une prise de position du gouvernement dans le conflit israélo-palestinien, a défendu la ministre des Relations internationales et de la Francophonie, Martine Biron.

« En rien, l’ouverture du bureau du Québec à Tel-Aviv, dont l’annonce est bien antérieure au début des hostilités, ne peut être interprétée comme une prise de position de la part du Québec », a déclaré la ministre lors d’une allocution, vendredi, devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM).

L’ouverture de cette représentation diplomatique a suscité de vifs débats à l’Assemblée nationale. En février, Québec solidaire (QS) avait déposé deux pétitions totalisant près de 12 000 signatures contre l’ouverture du bureau.

Le député Haroun Bouazzi accusait la Coalition avenir Québec (CAQ) d’être « complice » de « crimes contre l’Humanité » et de « nettoyages ethniques ». Les propos solidaires avaient toutefois été critiqués par le Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA).

Le conflit a une charge émotive forte au Québec qui accueille d’importantes communautés juive et palestinienne. Des membres de la communauté juive observent une recrudescence de l’antisémitisme tandis que des détracteurs d’Israël estiment que son intervention militaire viole le droit international et accusent le Canada de fermer l’œil sur les souffrances des Palestiniens.

Samedi, près de 200 organisations de la société civile tiendront une manifestation à Montréal pour dénoncer l’intervention israélienne.

Dans ce conflit, Mme Biron juge que la position du Québec est « équilibrée ». « Je pense qu’on est tous horrifiés de ce qui se passe, mais on est aussi horrifiés de savoir que toujours des otages sont détenus par le Hamas », a commenté la ministre en mêlée de presse après sa présentation.

Elle souligne que la décision d’ouvrir un bureau à Tel-Aviv a été prise avant l’attaque sanglante du Hamas le 7 octobre, qui a entraîné une riposte militaire de la part d’Israël.

Mme Biron souligne que le bureau ne sert pas qu’aux relations avec Israël, mais avec l’ensemble du Moyen-Orient. « C’est vraiment la porte d’entrée du Moyen-Orient. Puis, il y a des affaires qui se font en Turquie, au Liban, aux Émirats arabes. Ce n’est pas juste Israël. »

Le bureau joue un rôle principalement économique plutôt que diplomatique, selon elle. « En fait, le Québec accompagne les entreprises qui veulent faire affaire à l’étranger. C’est sûr qu’on a des contacts politiques, mais dans ce cas-là, nous, ce qu’on veut, c’est accentuer les échanges économiques. »

À cet égard, l’économie israélienne a des atouts qui jouent en sa faveur, selon elle. « Israël a beaucoup à offrir, notamment en cybersécurité et en technologie. »

Dans les faits, le bureau de Tel-Aviv est opéré à partir de Montréal pour des raisons de sécurité, a précisé Mme Biron. « En fait, quand on va pouvoir y aller, le bureau va être dans l’ambassade canadienne, mais actuellement on travaille de Montréal. »

De nouvelles représentations « à coût nul »

La ministre Biron a également profité de son allocution pour annoncer des changements « à coût nul » dans les différentes délégations et bureaux à l’étranger.

Certaines représentations seront fermées ou verront leurs effectifs réduits, tandis que d’autres prendront du galon. Des projets d’ouvertures sont également dans les cartons.

Québec va augmenter sa force diplomatique aux États-Unis, en y augmentant ses effectifs de 20 %. Les bureaux de Washington et Miami seront rehaussés au statut de délégation. La ministre a également le projet d’établir une délégation à Seattle.

« Moi, j’ai besoin de gens aux États-Unis, explique-t-elle en mêlée de presse. On a des mesures protectionnistes qui s’en viennent. »

Québec compte renforcer sa présence au Mexique et en Colombie, mais le bureau à La Havane à Cuba sera fermé.

En Europe, la ministre veut également ouvrir un bureau à Stockholm en Suède. Elle souligne que les projets à Seattle et à Stockholm n’ont pas encore obtenu le feu vert du conseil des ministres et qu’il s’agissait de projets pour le moment. À quel moment espère-t-elle l’ouverture de ces bureaux ? « J’aimerais ça l’année prochaine », répond-elle.

Après avoir analysé l’organisation de ses activités en Chine, le gouvernement Legault a pris la décision de fermer son bureau à Hong Kong. Au total, les effectifs du Québec seront réduits de six personnes en Chine.

Mme Biron souligne « qu’il y a moins de mains » qui se lèvent pour brasser des affaires en Chine « compte tenu de ce qui s’est passé pendant la pandémie, de la répression, etc. ». Elle insiste pour dire que la présence du Québec y reste « rentable » et qu’il est essentiel de maintenir les relations avec la deuxième économie mondiale, qui est en avance sur le plan technologique, notamment du côté des voitures électriques.

En Asie, le Québec veut renforcer sa présence dans la zone indo-pacifique. Les bureaux de Corée du Sud et de Singapour passeront au statut de délégation générale.

Malgré le froid diplomatique entre le Canada et l’Inde, Québec veut une présence autonome à Mumbai. Le bureau du Québec se trouvait dans les bureaux du consul du Canada à Mumbai.

Le Canada a suspendu ses activités en personne au consulat de Mumbai dans la foulée du meurtre d’un militant sikh en Colombie-Britannique. Ottawa accuse l’Inde d’être responsable du meurtre en sol canadien, ce que dément New Delhi.

Québec veut ouvrir ses propres bureaux en Inde afin d’être opérationnel sur le terrain. « C’est un projet qui est en cours. J’ai rencontré le consul de l’Inde qui est basé ici à Montréal, à quelques reprises. On avance dans ce dossier-là. »