Le ministre de l’Immigration, Marc Miller, reconnaît qu’un « tour de vis » s’impose pour freiner la hausse du nombre de demandeurs d’asile, notamment en provenance du Mexique.

Ce qu’il faut savoir

  • Le gouvernement Trudeau a levé l’obligation de visa pour entrer au Canada pour les ressortissants mexicains le 1er décembre 2016.
  • Depuis trois ans, le nombre de Mexicains qui réclament l’asile après avoir foulé le sol canadien a explosé.
  • Le gouvernement Legault presse Ottawa de réimposer le visa pour freiner la hausse du nombre de demandeurs d’asile.

Diverses options sont à l’étude pour y arriver, notamment l’imposition d’un visa aux ressortissants mexicains. Mais avant d’arrêter une telle décision, le gouvernement Trudeau tient à discuter de ce dossier par les canaux diplomatiques avec l’un de ses principaux partenaires commerciaux, a indiqué le ministre Miller lundi en mêlée de presse à Montréal.

« C’est clair que l’on regarde les mesures que l’on peut prendre comme pays pour assurer qu’on fait notre travail. En ce qui a trait aux demandeurs d’asile qui viennent du Mexique, on a vu un flux énorme de gens qui viennent du Mexique et qui réclament le statut d’asile. C’est clair qu’un tour de vis s’impose. Est-ce que c’est un quart de tour, un demi-tour ou deux tours ? C’est à déterminer. Nous sommes encore en train de réfléchir à l’approche à prendre », a commenté le ministre, avant de prendre part à la retraite du cabinet fédéral à Montréal.

Sachez aussi que lorsque l’on parle du Mexique, c’est un de nos partenaires économiques principaux et qu’une démarche diplomatique s’impose et c’est une démarche qui n’est pas encore terminée.

Marc Miller, ministre fédéral de l’Immigration

Pour réduire le nombre de demandeurs d’asile qui arrivent au Québec, le gouvernement Legault a demandé à Ottawa de prendre les moyens qui s’imposent, notamment en réimposant un visa aux ressortissants mexicains. Un tel visa avait été imposé par le gouvernement Harper, mais les libéraux de Justin Trudeau l’ont aboli peu de temps après leur arrivée au pouvoir en 2015.

Durant les neuf premiers mois de 2023, un total de 17 490 Mexicains ont réclamé l’asile après avoir foulé le sol canadien. C’est plus du double qu’en 2022 (7483) et trois fois plus qu’en 2019 (5634). L’augmentation est telle que le Mexique occupe maintenant le deuxième rang des pays d’où proviennent les demandeurs d’asile, selon l’Agence des services frontaliers du Canada.

Étudiants étrangers

Le ministre Miller a fait ces commentaires après avoir annoncé trois mesures pour contenir l’explosion du nombre d’étudiants étrangers qui viennent au pays ces dernières années. Il a confirmé qu’un plafond temporaire de deux ans sera imposé au nombre d’étudiants étrangers pour mettre fin à l’abus relevé dans certains établissements d’enseignement privés, en particulier en Ontario, et réduire les pressions sur la demande de logements.

Il a expliqué que ce plafond temporaire permettra de réduire d’environ 35 % le nombre d’étudiants étrangers qui obtiennent un permis d’études en 2024 par rapport à 2023. Ottawa prévoit approuver 360 000 permis d’études cette année.

Selon Statistique Canada, le nombre d’étudiants étrangers qui se trouvent au pays a dépassé le million, et la moitié d’entre eux sont en Ontario. Au Québec, ils étaient environ 117 000 en 2023.

Le plafond temporaire sera imposé au prorata de la population des provinces. Résultat : ces mesures toucheront essentiellement quatre provinces, soit l’Ontario, la Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick, où le nombre d’étudiants étrangers a bondi au cours des dernières années. En Ontario, des étudiants étrangers s’inscrivent pour fréquenter des collèges privés sans jamais y mettre les pieds. Mais ils obtiennent ainsi un droit de venir au pays et d’entreprendre les démarches pour y demeurer.

Ces mesures feront en sorte que le nombre d’étudiants qui viennent s’installer en Ontario sera réduit de moitié. Le Québec, lui, pourrait en théorie en accueillir davantage s’il le souhaitait.

Seuls les étudiants étrangers qui poursuivent des études de maîtrise et de doctorat ne seront pas touchés par ce plafond, a précisé M. Miller.

« Pour que le Canada conserve sa réputation mondiale, nous devons nous attaquer aux problèmes récents qui ont rendu certains étudiants vulnérables et ont porté atteinte à l’intégrité de notre programme pour les étudiants internationaux. Il est inacceptable que certaines institutions privées se servent des étudiants internationaux pour augmenter leurs revenus sans leur offrir le soutien nécessaire », a dit le ministre.

Québec insatisfait

À Québec, la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, a affirmé que les mesures annoncées par son homologue fédéral n’auront aucun effet au Québec.

« Encore une fois, le gouvernement fédéral rate la cible », a lancé la ministre.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La ministre de l’Immigration, Christine Fréchette

« L’urgence pour Ottawa, c’est d’agir rapidement sur le dossier des demandeurs d’asile. Il doit mieux répartir l’accueil de ces personnes à travers l’ensemble des provinces du Canada et rembourser le Québec pour les dépenses encourues au cours des dernières années. L’annonce du ministre Marc Miller n’aura qu’un effet limité sur la situation au Québec », a-t-elle ajouté.

« Tout d’abord, les quotas d’émission de permis d’études annoncés ne toucheront pas le Québec, a-t-elle dit. Depuis le 1er septembre 2023, nous avons mis en place des mesures qui visent à contrer les stratagèmes d’immigration rapportés depuis plusieurs années dans certains établissements privés non subventionnés. »

Avec la collaboration de Tommy Chouinard, La Presse, à Québec