(Alma) Devant « l’urgence de la situation », le Parti québécois propose un plan d’aide aux médias qu’il décrit comme un « service essentiel ». La formation politique veut notamment décourager les annonceurs de s’afficher sur les géants du web.

« L’État finance 100 % des fonctions comme les policiers, les pompiers. Il y a plein de fonctions essentielles où l’État intervient », a expliqué jeudi le chef Paul St-Pierre Plamondon.

« Du moment où on s’entend que [le journalisme] est un service essentiel, il n’y a pas d’enjeux à ce que l’État intervienne, à condition qu’il n’y ait pas de conditions ni d’ingérence », a-t-il ajouté.

Le leader péquiste a présenté un plan d’aide aux médias en clôture d’une réunion de deux jours de son caucus à Alma, au Lac-Saint-Jean. M. St-Pierre Plamondon a d’ailleurs souligné l’importance de « préserver l’information régionale » aux quatre coins du Québec.

Le Parti québécois mentionne la perte de 19 postes à l’antenne de TVA, à Saguenay, et la fin de l’impression des journaux des Coops de l’information, dont fait partie Le Quotidien. Ce virage entraîne la suppression d’une centaine de postes, soit environ le tiers de l’effectif de l’organisation.

Le parti souverainiste propose entre autres la création d’un fonds d’urgence pour « faciliter » la transition des modèles d’affaires vers le numérique. Le Parti québécois ne l’a pas chiffré pour l’instant, pas plus que les autres mesures de son plan d’aide.

« Ce n’est pas nous le gouvernement, donc, on donne ces mesures-là dans l’espoir qu’elles soient reprises. C’est à la discrétion ensuite du gouvernement de chiffrer le fonds. Si jamais ce n’est pas fait, ça veut dire qu’en campagne électorale en 2026, on arrivera avec des chiffres », a-t-il nuancé.

Avant les Fêtes, Québecor avait également annoncé que 547 employés perdraient leur emploi à Groupe TVA, ce qui représente 31 % de son effectif actuel. D’autres médias ont également procédé à des compressions budgétaires et à des abolitions d’emplois ces derniers mois.

CBC/Radio-Canada a annoncé en décembre la suppression de 600 emplois et l’abolition de 200 postes vacants au pays. En juin dernier, Bell (propriétaire de CTV et de Noovo, entre autres) a également supprimé 1300 postes à l’échelle du Canada.

« Notre objectif, c’est la démocratie, on ne veut pas du journalisme affaibli », a lancé M. St-Pierre Plamondon. La situation est « urgente », selon le chef péquiste, qui presse le gouvernement Legault de présenter le plus rapidement possible son plan d’aide temporaire.

Le ministre Mathieu Lacombe planche, en concertation avec Ottawa, sur un « plan d’aide temporaire aux médias ». Pour l’instant, cette aide viserait essentiellement la presse écrite.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Le ministre de la Culture et des Communications, Mathieu Lacombe

Moins de pub sur les géants du web

Le Parti québécois propose notamment de modifier le régime fiscal pour ajouter des mesures incitatives aux dépenses publicitaires faites auprès d’entreprises de presse et entreprises québécoises. A contrario, il limiterait aussi la déductibilité d’impôt des publicités achetées par les entreprises lorsque les dépenses ne sont pas faites auprès de partenaires québécois.

« C’est de donner des incitatifs fiscaux à dépenser de la publicité auprès de nos médias québécois », a expliqué le chef péquiste. « Le message qu’on passe, c’est qu’on devrait favoriser les entreprises québécoises et ne pas donner d’incitatifs d’aucune nature quand il s’agit de dépenses auprès de multinationales des GAFAM », a-t-il ajouté.

Le PQ propose aussi d’élargir le crédit d’impôt pour soutien à la presse d’information écrite aux entreprises médiatiques radio et télé. « Notre critère c’est de s’assurer qu’il y a suffisamment de journalistes et mode d’expression différents », a précisé le chef péquiste.

« Les journalistes et les médias s’expriment de diverses manières, il y a la télé, l’écrit, l’électronique. Toute forme de contribution à notre démocratie à mon avis doit être [admissible] », a-t-il ajouté.

Québec offre déjà le crédit d’impôt pour soutien à la presse d’information écrite, qui équivaut à rembourser 35 % du salaire des employés admissibles au programme (maximum 75 000 $ par année). Les médias électroniques réclament d’y avoir également accès.

Mesures du plan d’aide du Parti québécois

  • Mettre en place une politique officielle pour mettre fin aux dépenses publicitaires du gouvernement, de ses organismes et des sociétés d’État dans les géants du web.
  • Appliquer le décret gouvernemental de 1994 incitant les organismes gouvernementaux à dépenser 4 % de leur budget publicitaire au sein des médias communautaires
  • Débloquer des fonds pour soutenir la transition de la distribution des hebdos touchés par la fin du Publisac.
  • Déposer un projet de loi jetant les bases d’un Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications québécoises.

La liste des médias admissibles aux différentes mesures pourrait être déterminée par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), a avancé M. St-Pierre Plamondon.

« C’est un peu délicat si l’État, le gouvernement commence à lui-même déterminer qui est un journaliste et qui ne l’est pas, je trouve qu’on ouvre la porte à des dérives. Je ne veux aucune implication du politique sur le pouvoir médiatique », a-t-il expliqué.

Par ailleurs, le Parti québécois « n’a pas différencié Radio-Canada » de son exercice. En novembre dernier, le ministre Mathieu Lacombe a demandé à Ottawa d’exclure le diffuseur public des redevances que versera Google aux médias canadiens.

Le ministre de la Culture et des Communications est aussi d’avis que Radio-Canada devrait se retirer du marché publicitaire, une question que n’a pas encore tranchée le Parti québécois.

Paul St-Pierre Plamondon est aussi enclin à réduire le coût du loyer des bureaux de la Tribune de la presse à l’Assemblée nationale. En août, Québecor a cessé de payer son loyer dans l’édifice André-Laurendeau, citant un contexte financier difficile. Le Devoir rapportait en décembre que les correspondants parlementaires de l’entreprise n’auraient plus de bureaux à eux à la reprise des travaux parlementaires.