(Ottawa) Sans aller jusqu’à demander un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, Justin Trudeau réclame une pause humanitaire « significative » – non seulement pour acheminer de l’aide humanitaire et faire sortir ceux qui sont pris au piège à Gaza, mais également afin que le contexte se prête à un retour aux négociations sur la solution à deux États.

S’il faut faire « tout ce qu’on peut pour réduire la violence », et permettre l’accès dans l’enclave palestinienne à une « aide réelle, substantielle », il faut aussi commencer à penser à des solutions pour l’avenir, a plaidé le premier ministre mercredi en mêlée de presse, à son arrivée à la rencontre hebdomadaire de son caucus.

« Nous avons besoin aussi de commencer les conversations sur ça va être quoi la solution [à] moyen et long terme – comment on va établir ces deux États prospères, en sécurité, viables. Un État palestinien responsable qui protège et prend soin des citoyens, un État d’Israël, un État juif, protégé, en sécurité », a-t-il insisté.

Tout en dénonçant les attentats « inimaginables » perpétrés en Israël il y a un mois et un jour par le Hamas, Justin Trudeau a condamné « la mort » et « la dévastation, la destruction de familles, d’aînés, d’enfants, de mères » qui ont suivi dans la bande de Gaza, où le bilan a franchi le cap des 10 000 victimes.

Il s’est tout de même réjoui que le Canada ait réussi à évacuer 75 personnes mardi par le poste frontalier de Rafah, qui sépare l’enclave de l’Égypte. Mais « il reste des centaines de gens et de familles à sortir », sans parler des otages que retient le Hamas depuis les attaques du 7 octobre, a-t-il rappelé.

Des citoyens et des résidents permanents du Canada ainsi que leurs proches figuraient sur une liste de personnes à évacuer mercredi, mais la fermeture du poste de Rafah a contrecarré leurs plans, a indiqué Affaires mondiales Canada dans son bilan quotidien de la situation.

« Nous espérons que le poste frontalier sera de nouveau ouvert [jeudi] », a écrit le ministère, en prévenant que l’interdiction de passage de mercredi pourrait « engendrer des retards » dans l’opération d’évacuation de la bande de Gaza.

Des gestes haineux « épouvantables » au Canada

Dans sa prise de parole énergique devant les caméras, mercredi matin, le premier ministre a aussi appelé à une désescalade des tensions et des divisions au pays.

La montée de l’antisémitisme et de l’islamophobie sont « épouvantables », a-t-il affirmé.

Si on n’arrive pas à mieux s’entendre au Canada – à mieux, pas juste s’entendre, s’écouter –, dans quel pays au monde vont-ils pouvoir se rapprocher ?

Justin Trudeau, premier ministre du Canada

Ainsi doivent cesser les gestes haineux visant des synagogues, des entreprises, des garderies et des centres communautaires juifs, de même que la « récrimination de quiconque ose montrer un drapeau palestinien », a-t-il sommé.

Le Bloc réclame un cessez-le-feu

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, qui jugeait un cessez-le-feu irréaliste il y a environ deux semaines, a changé son fusil d’épaule, mercredi.

Lors de la période des questions à la Chambre des communes, il a fait valoir que les « demandes répétées de trêve » devaient faire place à un « geste fort par la communauté internationale ».

PHOTO ADRIAN WYLD, LA PRESSE CANADIENNE

Le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet

Car « devant l’attitude déplorable » de l’État hébreu, qui « envisage une occupation durable de la bande de Gaza » et qui a échoué à faire preuve de retenue à l’égard des civils, un cessez-le-feu s’impose, a-t-il plaidé.

Le caucus bloquiste joint ainsi sa voix à celle de l’entièreté de la députation du Nouveau Parti démocratique, qui a réclamé la cessation des hostilités le 1er novembre dernier.

À la fin de la période des questions, la néo-démocrate Heather McPherson a voulu déposer une motion pour exiger un cessez-le-feu, mais elle n’a pas obtenu l’unanimité requise pour ce faire.

Deux motions libérales ont, en revanche, été adoptées à l’unanimité.

PHOTO SEAN KILPATRICK, LA PRESSE CANADIENNE

Le député libéral Anthony Housefather

La première, du député de confession juive Anthony Housefather, dénonçait l’attaque « terroriste haineuse » commise par le Hamas et appelait à la libération immédiate des otages que détient le groupe terroriste.

La deuxième, de son collègue de confession musulmane Sameer Zuberi, demandait l’acheminement de l’aide humanitaire à Gaza, et réitérait la position canadienne en faveur d’une solution à deux États.

Si on inclut les députés libéraux et verts qui ont exigé une cessation des hostilités, ils sont maintenant 82 élus sur les 338 députés fédéraux.