(London) Le contraste est difficile à ignorer. Le rideau vient de tomber sur un congrès conservateur à l’ambiance survoltée, et voici que les libéraux malmenés dans les sondages convergent vers London pour leur réunion de caucus. Les discussions seront franches, signale-t-on, et Justin Trudeau devra prouver qu’il est toujours en contrôle, selon un expert. Survol.

Dégringolade dans les sondages

« La culture du caucus de se laisser entraîner dans des décisions stupides » fera en sorte qu’il « n’y aura pas d’étincelles à la réunion cette semaine, mais il devrait y en avoir », a écrit lundi dans un billet de blogue aux allures de mise au défi la conservatrice Michelle Rempel Garner. On verra si les bruissements de couloir lui donneront raison. Ce qui est certain, cependant, c’est qu’il y a de la nervosité dans les rangs libéraux en raison de la dégringolade estivale dans les sondages, note Jeremy Ghio, ancien stratège libéral. « Des mauvais sondages, ça fait des députés mécontents. Ça délie les langues. Justin Trudeau devra leur prouver qu’il est encore l’homme de la situation », estime-t-il.

« Un chef formidable »

Des langues se sont déliées récemment dans des reportages du Toronto Star et de CBC – anonymes, les langues. Sans vouloir s’étendre sur ces confidences, Brenda Shanahan, qui préside le caucus national, fait valoir que « ces personnes qui font des commentaires à l’extérieur du caucus savent très bien que M. Trudeau est un chef formidable ». Y a-t-il au sein de la députation beaucoup de « Nervous Nellies », comme Jean Chrétien appelait ses députés inquiets de perdre leur circonscription ? « Ils ont entendu les frustrations de leurs commettants cet été […] sur le coût de la vie et l’accès au logement […], mais tous sont derrière notre leader », affirme Mme Shanahan.

« Tous les indicateurs au rouge »

Même si l’entente de collaboration entre les libéraux et les néo-démocrates tient jusqu’à 2025, ce que le premier ministre semble vouloir, la montée en flèche des conservateurs dans les sondages devrait être un signal d’alarme, croit le spécialiste Philippe J. Fournier. « Tous les indicateurs sont au rouge. Chez les libéraux, on plaide que Justin Trudeau est revenu de l’arrière contre Andrew Scheer et Erin O’Toole, mais là, c’est différent, car on parle de l’approbation du gouvernement et du chef », expose le créateur de l’agrégateur 338Canada. « Les libéraux ont le luxe du temps, mais si l’élection avait lieu demain, mon modèle donne un gouvernement [conservateur] presque majoritaire ou majoritaire », ajoute-t-il.

Oublier le « méchant » Poilievre

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Pierre Poilievre, chef du Parti conservateur du Canada, lors du congrès national de sa formation, vendredi dernier, à Québec

Les militants conservateurs réunis en congrès à Québec le week-end dernier ont fourni de nouvelles munitions aux libéraux. Il y a eu la tentative avortée de mettre aux voix une résolution pour couper les vivres à Radio-Canada, l’adoption d’une résolution encadrant la transition de genre pour les mineurs. D’après Jeremy Ghio, il faut résister à la tentation de se laisser distraire : « Chez les libéraux, on dirait qu’on est en mode : “Pierre Poilievre est méchant, et moi, j’ai un bon bilan”. Mais ce n’est pas avec le bilan que tu vas obtenir la confiance des Canadiens pour un quatrième mandat. C’est avec un plan pour ce qui s’en vient – l’incertitude économique et la crise du logement. »

Une annonce sur le logement

On l’a vu à l’Assemblée nationale dès le jour un de la rentrée parlementaire : l’enjeu du logement met les gouvernements sur la sellette. Celui de Justin Trudeau n’y échappera pas, et c’est d’ailleurs avec une annonce sur le logement que le premier ministre donnera le coup d’envoi à la rencontre du caucus, mercredi, aux côtés du ministre responsable du dossier, Sean Fraser. Parce que oui, Justin Trudeau a fini par rentrer au pays, lui qui avait été coincé pendant deux jours à New Delhi en raison d’un problème technique de l’avion gouvernemental.