(Ottawa) Coup de balai au Cabinet à Ottawa : plusieurs ministres perdront leur voiture de fonction dans le cadre du remaniement opéré par Justin Trudeau, ce qui permettra à des recrues libérales de donner un nouvel élan au gouvernement.

La rumeur dans la capitale fédérale voulait que ce rebattage des cartes soit costaud. Elle se confirmera lors de la cérémonie de prestation de serment qui se tiendra ce mercredi matin à Rideau Hall. Au moins 5 ministres sur 38 ne seront plus à la table des décisions, et plus du tiers des portefeuilles changeront de mains.

Tour à tour, Omar Alghabra (Transports), Joyce Murray (Pêches, Océans et Garde côtière), Carolyn Bennett (Santé mentale) et Helena Jaczek (Services publics et Approvisionnement) ont annoncé, à l’approche de ce remaniement, qu’ils ne brigueraient pas de nouveau mandat.

À ce quatuor de ministres qui cèdent leur place s’ajoute le ministre de la Justice, David Lametti, en poste depuis 2019. Le principal intéressé, dont l’éjection pure et simple du Cabinet en a surpris plus d’un, ne s’était toujours pas manifesté, mardi.

Et selon CBC, le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino – pour qui on s’attendait à une forme de sanction en raison de ses déboires –, et la présidente du Conseil du Trésor, Mona Fortier – celle qui contrôle les cordons de la bourse fédérale –, passeront aussi à la trappe. La Presse n’a pas confirmé ces informations.

Le diffuseur public fait également état d’une mutation pour la ministre de la Défense nationale, Anita Anand, qui hériterait d’un poste économique. Là aussi, il y a un élément de surprise, car l’élue pilotait de nombreux dossiers majeurs, dont l’aide canadienne à l’Ukraine et la révision de la politique militaire.

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Anita Anand, ministre de la Défense nationale

Pour assurer une stabilité, Justin Trudeau maintient dans les mêmes fonctions les grosses pointures que sont Chrystia Freeland (Finances), Mélanie Joly (Affaires étrangères), François-Philippe Champagne (Industrie), Steven Guilbeault (Environnement) et Jean-Yves Duclos (Santé), selon nos informations.

Ceux qui partent

Le jeu des chaises musicales survient alors que le second gouvernement minoritaire libéral s’apprête à souffler deux bougies, en septembre. « Normalement, après deux ans, on serait en train de penser beaucoup à déclencher des élections », souligne la politologue Geneviève Tellier.

Or, en vertu de l’entente de collaboration et de soutien conclue avec les néo-démocrates, les libéraux peuvent espérer rester au pouvoir jusqu’en 2025. Mais l’opération n’en vise pas moins à bâtir une équipe prête à en découdre au prochain scrutin, et Justin Trudeau avait demandé aux ministres de préciser leurs intentions.

C’est Helena Jaczek qui a ouvert le bal, mardi matin, en annonçant sur Twitter qu’elle tirerait sa révérence. La ministre des Services publics et de l’Approvisionnement aura passé moins d’un an à ce poste, dont elle avait hérité en août dernier dans le cadre d’un remaniement mineur.

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Helena Jaczek

Ce fut ensuite au tour d’Omar Alghabra. « J’ai pris la difficile décision de ne pas me présenter à la prochaine élection. Je me retire aussi de mon rôle de ministre, car le premier ministre mérite un cabinet qui est prêt à se lancer dans la prochaine campagne fédérale », a-t-il affirmé dans une vidéo.

Selon des informations obtenues par La Presse, l’élu ontarien, qui a été dans l’arène fédérale pendant environ 11 ans, pourrait faire le saut sur la scène municipale en briguant la mairie de Mississauga, dans l’éventualité où l’actuelle mairesse Bonnie Crombie réussissait à prendre la barre du Parti libéral de l’Ontario.

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Omar Alghabra

Le député ne figurait pas sur la liste des ministres ayant confirmé qu’ils comptaient être sur la ligne de départ. Le nom de Carolyn Bennett, lui, y était. Mais lundi, l’élue de longue date, qui a commencé à servir sous Jean Chrétien, a dit qu’elle avait informé Justin Trudeau de son intention de ne pas solliciter de nouveau mandat.

Même chose pour Joyce Murray, ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, dont le nom était inscrit sur cette liste. Puis, mardi, ceci : « Après une longue réflexion, j’ai décidé de ne pas me représenter aux prochaines élections », a écrit sur Twitter l’élue de 69 ans.

Ces départs libèrent des postes de ministre dans le Grand Toronto, à Vancouver, à Montréal et à Ottawa. Les libéraux doivent minimalement conserver leurs acquis dans les centres urbains pour espérer battre les troupes conservatrices de Pierre Poilievre aux prochaines élections.

L’assermentation du Cabinet par la gouverneure générale Mary Simon se tiendra à Rideau Hall dès 10 h 30.

Des remaniements marquants

  • 10 janvier 2017 : L’ancien chef libéral Stéphane Dion est congédié de son poste de ministre des Affaires étrangères au profit de Chrystia Freeland, dans une tentative de composer avec l’arrivée de Donald Trump à la présidence des États-Unis.
  • 14 janvier 2019 : Le départ de Scott Brison provoque un jeu de chaises musicales qui verra la ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, être mutée aux Anciens Combattants. Elle annoncera sa démission moins d’un mois plus tard.
  • 26 octobre 2021 : Mélanie Joly aux Affaires étrangères, Steven Guilbeault à l’Environnement, Anita Anand à la Défense nationale : au lendemain de sa deuxième victoire minoritaire d’affilée, Justin Trudeau procède à des nominations qui retiennent l’attention.