(Ottawa) Les sièges vacants s’accumulent au Sénat. À l’heure actuelle, on compte 16 sièges inoccupés à la Chambre haute sur un total de 105 sièges et au moins deux autres sénateurs devraient prendre leur retraite cette année.

Des experts estiment que cette situation risque de ralentir la cadence des travaux parlementaires si le premier ministre Justin Trudeau ne procède pas bientôt à de nouvelles nominations. Car le Sénat joue un rôle important dans l’étude des projets de loi qui sont proposés par le gouvernement et adoptés par la Chambre des communes. Les sénateurs doivent aussi passer au peigne fin tous les projets de loi avant qu’ils n’obtiennent la sanction royale par la gouverneure générale Mary Simon et entrent en vigueur.

« C’est préoccupant de voir qu’il y a autant de vacances. Cela peut ralentir les travaux du Sénat. Ce n’est pas normal qu’il y ait 16 sièges vacants sur 105 », a fait valoir Geneviève Tellier, professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa.

Il faudrait s’assurer que l’on remplace régulièrement les sénateurs au lieu d’avoir 16 nouveaux qui arrivent en même temps. Il y a cela aussi à gérer. Même les sénateurs qui ont été nommés il y a deux ou trois ans, ils ont encore des choses à apprendre.

Geneviève Tellier, professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa

Les sièges vacants risquent notamment de ralentir les travaux des comités, qui décortiquent les projets de loi du gouvernement et entendent des témoins.

Le bureau du premier ministre n’avait pas répondu aux questions de La Presse au sujet des sièges vacants au moment d’écrire ces lignes.

Toutes les provinces sauf le Manitoba comptent au moins un siège vacant. Les provinces atlantiques sont les plus touchées. À titre d’exemple, l’Île-du-Prince-Édouard, qui a droit à quatre sièges au Sénat, compte deux sièges vacants. Le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse comptent chacune trois sièges vacants, soit environ le tiers de leurs sièges. Ces deux provinces ont droit à 10 sièges chacune à la Chambre haute.

Pour le moment, on compte seulement un siège vacant au Québec et deux en Ontario. Les autres sièges inoccupés se trouvent en Alberta (2), en Colombie-Britannique (1), en Saskatchewan (1) et à Terre-Neuve-et-Labrador (1). En 2024, 10 autres sièges seront libérés par des sénateurs qui prendront leur retraite.

Après son arrivée au pouvoir, en 2015, Justin Trudeau a modifié la formule de nomination des sénateurs. Au lieu de nommer des personnes ayant milité pendant des années pour le parti comme des collecteurs de fonds ou des organisateurs de campagne électorale, le premier ministre a invité les Canadiens à postuler pour devenir sénateur. Jusqu’ici, M. Trudeau a nommé 59 sénateurs en utilisant cette formule.

« Le mode de nomination a changé. M. Trudeau fait des appels à tous. Ces derniers temps, il n’y a pas eu de problèmes. Les nominations ont plutôt été saluées. M. Trudeau voulait rajeunir et diversifier le Sénat, et c’est fait. Le pourcentage de sénateurs autochtones aujourd’hui est plus élevé que le pourcentage d’Autochtones dans la population. Beaucoup de cases ont été cochées. Mais si on n’est pas capable de nommer plus rapidement des sénateurs, ça peut être un problème », a souligné Mme Tellier.

« Déséquilibre »

Les 16 sièges vacants représentent 15,2 % de tous les sièges que compte le Sénat. À titre comparatif, si on appliquait la même proportion à la Chambre des communes, qui compte 338 députés, il y aurait 51 sièges vacants. Aux Communes, le premier ministre dispose d’un délai de six mois pour annoncer la tenue d’une élection partielle quand un député quitte son siège. Au Sénat, il n’existe pas de temps limite pour pourvoir les postes vacants.

À la fin de son dernier mandat, l’ancien premier ministre Stephen Harper avait décidé de ne pas nommer de nouveaux sénateurs à la suite d’un scandale des dépenses qui avait éclaboussé certains des sénateurs qu’il avait nommés.

L’ancien président du Sénat, le regretté Pierre-Claude Nolin, avait alors exhorté M. Harper à pourvoir les postes vacants. Il avait notamment affirmé que l’absence de sénateurs de certaines régions avait pour effet de créer un « déséquilibre » qui nuisait au bon fonctionnement de l’institution.

M. Harper avait fait la sourde oreille à cette requête. Résultat : on dénombrait 23 sièges vacants après la défaite des conservateurs aux élections de 2015. Justin Trudeau a ainsi pu nommer des sénateurs qui soutenaient généralement le programme de son gouvernement.

« Si le cannabis est légal aujourd’hui au Canada, c’est beaucoup à cause de Stephen Harper. S’il avait nommé des sénateurs conservateurs, jamais la législation de légalisation de la consommation du cannabis n’aurait été adoptée », a soutenu une source conservatrice qui a préféré garder l’anonymat.

Comment devenir sénateur ?

On peut soumettre sa candidature pour devenir sénateur en remplissant une demande en ligne.

Consultez le site du Gouvernement du Canada

Quel est le salaire d’un sénateur ?

Le salaire annuel d’un sénateur est de 169 600 $. Les sénateurs qui occupent certains postes ou certaines charges ont droit à une rémunération supplémentaire.

Quel est l’horaire de travail ?

Le Sénat siège en moyenne environ 84 jours par année, sauf lorsque le Parlement est dissous et que des élections générales sont déclenchées.