(Québec) La hausse du nombre de plaintes et de signalements pour maltraitance n’est pas le signe d’une détérioration des soins et des services aux aînés, estime le premier ministre François Legault.

Cette augmentation de 50 % en un an et de 200 % depuis 2018-2019, comme l’a révélé La Presse, témoigne plutôt selon lui des effets de la Loi visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité. Adoptée en 2017, elle a été bonifiée en 2020, puis en 2022.

Il est désormais « plus facile de déposer une plainte », a-t-il expliqué lors d’un point de presse mercredi en marge de la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres. Que les plaintes et les signalements soient en hausse, « je ne pense pas que ça suppose une détérioration des soins ».

La ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, Sonia Bélanger, ne fait elle non plus « aucun lien [entre] les services et les situations de maltraitance » en hausse. Cette augmentation n’est « pas du tout » un signe que la qualité des services se dégrade, a-t-elle affirmé. Elle a ajouté que la maltraitance a plusieurs visages. Les auteurs de maltraitance ne sont pas toujours des employés, il peut s’agir de proches, a-t-elle précisé.

« Je m’attendais à ce qu’il y ait une augmentation des dénonciations, c’est ce qu’on veut avec la loi », a-t-elle ajouté.

« Ce n’est pas une bonne nouvelle d’avoir une augmentation du nombre de plaintes de 50 %, mais ça me sécurise comme ministre parce que je me dis que maintenant, on dénonce rapidement et on agit rapidement. […] Pour moi, c’est le signe de la transparence, c’est le signe de la lucidité, c’est le signe que la maltraitance, c’est tolérance zéro. »

Sonia Bélanger a lancé un appel à la population pour que les gens dénoncent tout acte de maltraitance dont ils sont témoins. Elle a rappelé que les employés du réseau de la santé en ont l’obligation en vertu de la loi. Les victimes de maltraitance ne doivent pas hésiter à porter plainte, a-t-elle ajouté.

Amendes prévues

Lors d’une rencontre statutaire avec les PDG des CISSS et des CIUSSS, la ministre leur a rappelé « l’obligation » de bien former leur personnel au sujet des dispositions de la loi et de soutenir leurs commissaires locaux aux plaintes et à la qualité des services. Elle entend d’ailleurs « augmenter les moyens » à la disposition des commissaires, qui sont chargés de traiter les plaintes et les signalements pour maltraitance, notamment. « C’est normal qu’avec une hausse des plaintes, les commissaires soient davantage surchargés. On va travailler pour faire en sorte que les ressources soient au rendez-vous », a-t-elle indiqué.

Québec solidaire et le Parti libéral du Québec jugent inacceptable que les amendes prévues à une loi adoptée il y a neuf mois ne soient toujours pas appliquées pour les situations de maltraitance. Le cabinet de la ministre Sonia Bélanger réplique que le travail se poursuit en vue d’arriver à imposer des sanctions.

La loi prévoit des amendes pour les auteurs de maltraitance : de 5000 $ à 125 000 $ dans le cas d’une personne physique, de 10 000 $ à 250 000 $ pour un établissement ou une personne morale. Pour des membres du personnel qui omettent de dénoncer la maltraitance dont ils sont témoins ou qu’ils soupçonnent, les amendes sont de 2500 $ à 25 000 $.

Ils ont dit

Je ne suis pas surpris de l’augmentation. Ça fait longtemps qu’on mentionne que ces formes d’âgisme et de maltraitance se produisent, mais qu’à un moment donné, il n’y a pas assez de cas qui sont rapportés. Je suis alarmé et très inquiet tout de même de cette augmentation effarante.

Pierre Lynch, porte-parole de la Coalition pour la dignité des aînés

Il y a une prise de conscience collective, et la COVID a exacerbé ça. [Pendant la crise], on s’est rendu compte que des personnes âgées avaient des soins de piètre qualité dans certaines ressources. Les gens ont compris avec la COVID que c’est assez et qu’il faut de la bientraitance.

Sylvie Tremblay, directrice générale du Regroupement provincial des comités des usagers