(Djerba, Tunisie) François Legault veut doter le Québec d’un « plan » pour « doubler et éventuellement tripler » les échanges commerciaux avec la France, qui totalisent environ 5 milliards par année. « Comme on dit au Québec, c’est des peanuts », a-t-il lancé devant un parterre de 500 invités.

Le premier ministre a clos sa participation au 18Sommet de la Francophonie – sa première mission à l’étranger depuis sa réélection – en livrant un discours lors de l’ouverture du Forum économique francophone, qui lui s’amorce dans l’île tunisienne de Djerba. Une importante délégation du milieu des affaires québécois est d’ailleurs présente.

M. Legault a pris la parole immédiatement après le président tunisien, Kaïs Saïed, et la secrétaire générale de la Francophonie – tout juste reconduite dans ses fonctions –, Louise Mushikiwabo.

Il faut être capable d’avoir des résultats, il faut que les entreprises de la Francophonie se parlent, fassent des affaires ensemble et qu’on améliore notre position, tout le monde, ensemble et en même temps, on va protéger cette belle langue [le français].

François Legault, premier ministre du Québec

M. Legault a précisé les pourtours de sa pensée en conférence de presse. « Les exportations du Québec vers la France, on parle d’à peu près un milliard et demi par année. Comme je le disais tantôt, c’est des peanuts, franchement. Il faudrait doubler et éventuellement tripler ça », a-t-il dit. La France exporte en revanche pour trois milliards et demi par année au Québec.

« Ce dont on a besoin, c’est de se donner un plan, d’être capable d’identifier des secteurs, des entreprises et de s’assurer que le [Mouvement des entreprises de France] travaille bien avec le Conseil du patronat [du Québec] », a ajouté M. Legault, sans préciser d’échéancier. Québec recevra par ailleurs la Rencontre des entreprises francophones, qui réunit des gens d’affaires de toute la Francophonie, en 2023, a-t-il annoncé.

« Un petit bout de fait »

En janvier 2019, le premier ministre avait tenu le même discours lors d’une visite officielle à Paris. Il voulait alors « doubler » les échanges commerciaux avec la France, qui plafonnent à moins de 5 milliards au total pour les deux États. « C’est rien », avait-il lancé à l’époque.

« On est passé [depuis] de 1,5 à 1,7 milliard. Il y a un petit bout de fait », a rétorqué dimanche M. Legault.

« En 2019, on ne s’était pas donné effectivement d’horizon […], c’est certain que la pandémie n’a pas aidé », s’est-il défendu. Il a expliqué que des cibles avaient néanmoins été fixées par Investissement Québec et que certains secteurs avaient accru leurs exportations en France, sans les nommer.

François Legault a cité devant le Forum économique l’exemple des sociétés Alstom – de qui la Caisse de dépôt et placement du Québec est le plus important actionnaire – et Airbus, qui emploient « plus de travailleurs francophones » que leurs compétiteurs respectifs.

« On comprend qu’il y a des règles internationales, qu’il faut de la compétition, mais il faut être capable de multiplier ces exemples-là […], il faut, les pays de la Francophonie, faire davantage ensemble », a-t-il dit.

Devant la presse, M. Legault a évoqué le Buy American Act, qui impose des quotas de contenu américain dans la réalisation de contrats. « Dans notre entente Canada-Europe, c’est 25 %. On a peut-être avantage, que ce soit dans une loi ou une entente, que quand c’est possible, de s’encourager [plus] entre nous », a-t-il indiqué.

« J’ai atteint les objectifs »

François Legault revient au Québec ce lundi avec le sentiment d’avoir « atteint les objectifs » de sa première mission à l’étranger. Le premier ministre a fait valoir « le contexte » entourant sa loi 96 et l’importance de « prendre des actions » pour freiner le déclin du français à Montréal.

Il a par ailleurs plaidé notamment auprès de Mme Mushikiwabo la nécessité que les pays de la Francophonie s’unissent pour financer davantage la production de contenu francophone sur les plateformes numériques.

M. Legault a pu brièvement s’entretenir avec le président français, Emmanuel Macron, dans le cadre d’un échange informel, samedi. Dimanche, il a rencontré le président tunisien, dont le régime est contesté. « Je lui ai dit qu’on a des préoccupations concernant la démocratie », a-t-il précisé.

Après avoir hésité à participer au Sommet, le gouvernement Legault a choisi de « donner une chance au coureur » en rencontrant M. Saïed. A contrario, Justin Trudeau, qui a manœuvré pour reporter de nouveau le Sommet pour des raisons politiques, a de son côté passé son tour.

Le prochain Sommet de la Francophonie se tiendra en France en 2024.