À une semaine de l’échéance, le fédéral et Québec n’ont toujours pas décidé s’ils vont porter en appel un jugement qui interdit l’interception de véhicules sans motif valable par les policiers, car cette procédure mène au profilage racial.

« C’est un cas actif, a indiqué le ministre de la Justice du Canada, David Lametti, lors d’une conférence de presse vendredi. Nous sommes en train de regarder la décision du juge Yergeau. Je ne peux pas dire plus que ça. Je n’aimerais pas préjuger la position de qui que ce soit. »

Dans une décision étoffée de 170 pages, rendue le 25 octobre, le juge Michel Yergeau, de la Cour supérieure, a conclu que l’interception de véhicules sans motif valable était « un sauf-conduit de profilage racial à l’encontre de la communauté noire ».

La décision renverse une jurisprudence établie il y a un peu plus de 30 ans par la Cour suprême, l’arrêt Ladouceur, qui permettait l’interception sans motif réel pour des raisons de sécurité routière.

Le fédéral et Québec ont défendu la jurisprudence devant le juge Yergeau, qui, selon eux, permet d’intervenir dans les cas d’intoxication liée à l’alcool au volant. Les deux parties ont jusqu’au 25 novembre pour porter la décision en appel.

Au cabinet du ministre de la Justice du Québec, Simon Jolin-Barrette, on donne une réponse semblable à celle du fédéral. « Le jugement est toujours en analyse », répond la porte-parole Élizabeth Gosselin.

Au lendemain du jugement, le premier ministre François Legault affirmait qu’il était trop tôt pour décider si le gouvernement allait porter le jugement en appel. Il avait dit toutefois qu’il fallait « laisser les policiers faire leur travail ».

Des organismes de défense des libertés civiles et de lutte contre le racisme, ainsi que Québec solidaire, ont toutefois invité le gouvernement à ne pas contester la décision.

Pour la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ), la décision du juge Yergeau est perçue comme une « avancée majeure contre le profilage racial ».

« Pas de petits gestes » pour lutter contre le racisme

Le ministre Lametti a annoncé plus tôt vendredi une aide financière de 998 000 $ sur quatre ans à l’organisme montréalais La Maison Bleue afin d’offrir de l’aide juridique aux femmes enceintes racisées. « Il n’y a pas de petits gestes pour lutter contre le racisme et la discrimination », a dit le ministre.

Avec cette subvention, l’organisme viendra en aide à des femmes qui rencontrent des embûches lorsque vient le temps d’avoir un accès équitable au système de justice, explique Élizabeth Sigouin, avocate et directrice de projet à La Maison Bleue.

Elle a donné des exemples d’interventions possibles comme la question des pensions alimentaires, un litige avec un propriétaire ou un besoin d’assistance juridique dans des démarches d’immigration. « Quand une femme enceinte vient nous voir pour une question de moisissure dans son logement qu’un propriétaire ne veut pas prendre en charge, c’est sa santé et celle de son enfant à naître qui est en jeu. »