(Ottawa) Les différents ordres de gouvernement qui tentaient de mettre un terme aux manifestations à Ottawa et à plusieurs postes frontaliers l’hiver dernier n’étaient pas toujours sur la même longueur d’onde, a reconnu mercredi Justin Trudeau.

Mais le premier ministre estime que l’important, c’est qu’en fin de compte, la Ville d’Ottawa et les gouvernements fédéral et provincial ont pu être unis, y compris sur la décision d’invoquer la Loi fédérale sur les mesures d’urgence, afin de mettre un terme aux évènements qui duraient depuis des semaines.

Il y a eu « bien sûr » certains moments, pendant le siège d’Ottawa, où les gouvernements « ne travaillaient pas aussi étroitement » que ce qu’on aurait pu souhaiter, a admis M. Trudeau. « Mais l’important est que nous nous soyons tous unis et que nous donnions la priorité aux Ontariens et aux Canadiens et que nous ayons résolu la situation », a soutenu M. Trudeau mercredi, avant la réunion du caucus libéral à Ottawa.

Les commentaires du premier ministre mercredi interviennent alors que la veille, la commission d’enquête publique sur le recours à la Loi sur les mesures d’urgence a produit des preuves suggérant qu’une dizaine de jours après l’arrivée du convoi à Ottawa, M. Trudeau ne pensait pas que le premier ministre ontarien Doug Ford faisait sa juste part pour dénouer l’impasse.

« Doug Ford s’est dérobé de sa responsabilité pour des raisons politiques, comme vous l’avez souligné », déclarait M. Trudeau au maire d’Ottawa, Jim Watson, selon un compte rendu d’un appel téléphonique entre les deux hommes le 8 février. « Il ne peut pas s’en tirer comme ça et nous avons l’intention de vous soutenir là-dessus. »

Le maire Watson, qui témoignait devant la commission d’enquête mardi, a déclaré qu’il partageait la frustration de M. Trudeau.

Un certain chaos

Après trois jours de témoignages à la commission, l’enquête commence à brosser le tableau d’une réponse chaotique de la police et des différents ordres de gouvernement.

Cette commission d’enquête est prévue en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence, afin de déterminer si les critères étaient réunis pour que le gouvernement invoque cette loi d’exception — ce qui n’avait jamais été fait depuis son adoption en 1988.

Cette loi a permis au gouvernement de mettre en œuvre des pouvoirs temporaires, mais exceptionnels, notamment le gel des comptes bancaires des participants au convoi et l’obligation pour les compagnies d’assurance de suspendre la couverture des véhicules impliqués.

L’opposition conservatrice, notamment, affirme que le gouvernement n’avait pas atteint le « seuil juridique » pour invoquer la loi, et qu’il s’agissait d’une mesure excessive pour faire face à ce qui était, au fond, un regroupement de citoyens qui exprimaient légalement leur mécontentement à l’égard du gouvernement.

Alors que les manifestations se poursuivaient, le gouvernement fédéral a tenté de maintenir un dialogue constant entre les trois ordres de gouvernement, mais le gouvernement provincial de Doug Ford n’a jamais accepté l’invitation.

M. Ford a finalement appuyé l’utilisation par le gouvernement fédéral de la Loi sur les mesures d’urgence et il a mis en œuvre ses propres mesures. Il a notamment décrété l’état d’urgence dans la province pour tenter de maîtriser à la fois l’occupation à Ottawa et les blocages à des postes frontaliers névralgiques.

« Main dans la main »

Lundi, avant que la transcription de la conversation téléphonique entre MM. Trudeau et Watson ne soit rendue publique, M. Ford était aux côtés des deux hommes lors d’une annonce à Ottawa. Il a déclaré aux journalistes qu’il avait travaillé main dans la main avec le gouvernement fédéral pendant les manifestations à Ottawa.

M. Trudeau a déclaré mercredi qu’il y aurait beaucoup plus de détails à venir au fur et à mesure que l’enquête se poursuivrait, mais que pour lui, il fallait s’attarder sur ce qui s’est passé pour mettre fin aux évènements.

« Doug Ford a invoqué sa loi sur les urgences. Nous avons invoqué notre loi sur les urgences, a-t-il déclaré. Nous avons fait passer les citoyens de l’Ontario, le bien-être des familles, le bien-être de notre économie avant les intérêts des manifestants illégaux, et nous étions heureux d’être unis là-dessus.

« Et comme vous l’avez vu lundi, nous continuons à rester unis là-dessus, alors même que nous faisons d’importantes annonces économiques pour l’avenir de l’Ontario. »