(Ottawa) Le député bloquiste René Villemure réclame la tenue d’une enquête d’un comité des Communes pour faire la lumière sur l’utilisation de logiciels espions par la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

« Franchement, je trouve qu’espionner des Canadiens possiblement sans mandat, c’est quelque chose qui est inacceptable. La surveillance, aujourd’hui, c’est rendu quelque chose de gros », argue l’éthicien de formation à l’autre bout du fil.

Il a envoyé mardi une lettre au président du comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique pour demander que les élus se réunissent pour quatre rencontres, à compter du 8 août, afin de se pencher sur le recours aux logiciels espions.

Le député Villemure estime qu’il est impératif de convoquer, entre autres, des hauts responsables de la GRC, l’actuel commissaire à la protection de la vie privée ainsi que son précédesseur, et peut-être aussi le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino.

Si la police fédérale a admis qu’elle utilisait des logiciels espions depuis cinq ans, via des documents déposés à la Chambre des communes à la fin de juin, elle a jusqu’à présent refusé de dire de quels logiciels il s’agit. La GRC soutient cependant que leur utilisation est limitée et ciblée, et encadrée par la justice.

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Face au « refus de répondre de la GRC », le comité doit étudier la question dès le 8 août afin d’identifier « les “outils d’enquête sur appareil” utilisés par la GRC, dont les capacités technologiques s’apparentent à celles de Pegasus », écrit M. Villemure dans sa missive au président du comité, le conservateur Pat Kelly.

Pour réussir, la démarche du bloquiste doit être approuvée par une majorité de ses collègues du comité.

Tollé éthique

Dans les documents remis au Parlement, la GRC a affirmé que ses « outils d’enquête sur appareil » (logiciels espions) lui permettaient d’activer instantanément les caméras et micros des téléphones portables piratés, et d’avoir accès à pratiquement toutes les données de l’appareil (textos, photos, vidéos, entrées de calendrier).

Des organisations comme Amnistie internationale, l’Association canadienne des libertés civiles et le Citizen Lab sont préoccupées. Elles aimeraient obtenir l’assurance que le logiciel Pegasus, du NSO Group, n’est pas utilisé comme arme d’espionnage par le corps policier.

Elles s’inquiètent aussi du fait que la GRC n’a pas informé le commissaire à la protection de la vie privée du Canada qu’elle avait cela dans sa boîte à outils. Tous les partis de l’opposition se posent la même question et ils pourraient vouloir des réponses en comité.

Le controversé logiciel Pegasus a été développé par NSO Group, une société israélienne. Il a été utilisé afin d’épier dirigeants politiques, militants et journalistes, parfois au profit d’États totalitaires comme l’Arabie saoudite. Il a été banni aux États-Unis, mais pas de manière officielle au Canada.