(Québec) Les professeurs en francisation du ministère de l’Immigration accusent le gouvernement Legault de vouloir les appauvrir en proposant de ne plus établir leur salaire en le comparant à celui des professeurs du réseau collégial.

En négociation pour le renouvellement de leur convention collective, les travailleurs du Syndicat des professeurs de l’État du Québec (SPEQ), qui représente quelque 600 professeurs de francisation du ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI), estiment que la dernière proposition salariale du gouvernement ferait d’eux « les enseignants de l’État les moins payés ».

Le travail fait par les professeurs de francisation est extrêmement important. C’est un travail difficile. Il faut connaître les cultures, il faut connaître la nôtre, pour jumeler les deux et faire en sorte que les nouveaux arrivants puissent s’intégrer. C’est un mandat important

Jean Vallières, président du Syndicat des professeurs de l’État du Québec

En avril dernier, Québec a proposé aux syndiqués une nouvelle grille salariale qui leur donnerait une rémunération de 88 950 $ au 17e échelon, et de 90 062 $ pour ceux qui sont titulaires d’un brevet d’enseignement au 18e et dernier échelon. À titre comparatif, affirme le Syndicat des professeurs de l’État, un enseignant du réseau collégial obtient un salaire d’un peu plus de 92 000 $ au 17e échelon de sa grille.

« Nous voulons être reconnus pour notre travail. En regardant le comparable avec les centres de services scolaires et le collégial, nous devenons les professeurs les moins payés de l’État du Québec. On trouve ça profondément injuste », affirme Aline Gagnon, professeure en francisation depuis 2001.

La francisation, une priorité ?

Jean Vallières ne s’explique pas la position de Québec, alors que le ministre de la Langue française, Simon Jolin-Barrette, a fait adopter dans les dernières semaines la loi 96 sur la langue française, qui prévoit entre autres la création de Francisation Québec. Le gouvernement Legault a également martelé que la francisation était incontournable pour que l’immigration soit une réussite.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Simon Jolin-Barrette, ministre de la Langue française

« Avec autant de fermeté dans la loi, autant d’emphase dans le discours, on s’attendrait évidemment à ce que le gouvernement fasse des experts en francisation des immigrants des partenaires de premier ordre. Pourtant, non ! Dans une incohérence absolue, le gouvernement cherche plutôt à appauvrir les professeurs en francisation », s’exclame M. Vallières dans une lettre ouverte.

« La dernière proposition salariale du gouvernement ferait des professeurs en francisation les enseignants de l’État les moins payés. Le manque à gagner serait très important, environ 3000 $ au terme de la convention pour les professeurs ayant le plus d’années de services, par rapport aux professeurs du réseau collégial qui ont toujours été notre référence », ajoute-t-il.

Mettre fin à la précarité

Les professeurs de l’État demandent également au gouvernement d’accorder davantage de permanences pour mettre fin à une précarité d’emploi, disent-ils. Lors de l’étude du projet de loi 96, qui réforme la Charte de la langue française, leur syndicat a rappelé qu’il y a « actuellement environ 600 professeurs en francisation employés par le MIFI : de ce nombre, 500 ont le statut d’occasionnel, et plus de 400 d’entre eux vivent sous le statut dit de professeurs sur appel ».

« Leurs conditions d’embauche sont donc considérablement au-dessous de celles des occasionnels de la fonction publique québécoise. Comme les contrats sont d’une durée de 11 semaines, cette forte majorité des ressources enseignantes du Ministère se retrouve donc dans l’incertitude complète quant au renouvellement de leur contrat, [toutes les] 11 semaines », déplorait-il.

Plusieurs avancées auraient depuis été faites à ce sujet à la table de négociation entre le gouvernement Legault et le syndicat des professeurs de l’État. Au cabinet de la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, on affirme désormais que « les négociations se poursuivent, notamment sur la question salariale. Nous n’allons pas commenter davantage afin de laisser place aux négociations ».