(Québec) Le gouvernement Legault a déposé deux projets de loi à la dernière minute, alors que les travaux de l’Assemblée nationale prennent fin vendredi et que la campagne électorale sera déclenchée officiellement à la fin du mois d’août. Il a l’intention de réviser à la hausse les redevances sur l’eau et de plafonner l’indexation des tarifs d’Hydro-Québec.

Ces deux projets de loi ne pourront être adoptés cette session-ci, faute de temps. Ils deviendront donc des promesses électorales de la Coalition avenir Québec (CAQ).

Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a déposé mercredi le projet de loi « visant principalement à s’assurer de la révision des redevances exigibles pour l’utilisation de l’eau », comme La Presse le révélait lundi.

Le ministre a toutefois reconnu lui-même que sa pièce législative ne sera pas adoptée avant les élections. Aucun montant n’y est mentionné, et M. Charette ne veut pas faire de prédiction sur le juste prix de l’eau et préfère consulter, après le scrutin. « C’est réellement une réflexion sur la valeur de l’eau que l’on devra avoir comme société à travers l’étude du projet de loi si, naturellement, la Coalition avenir Québec devait être réélue », a dit l’élu caquiste.

Une révision tous les trois ans est prévue dans le texte législatif, et le gouvernement est également ouvert à l’idée de rendre publiques les quantités d’eau prélevée par les industriels, même si ce n’est pas dans la loi. « Je pense que les Québécois sont en droit de savoir quelles sont les quantités d’eau qui sont prélevées, et comment cet usage-là est fait, et à quelles fins », a affirmé M. Charette. Par le passé, la CAQ était opposée à une hausse des redevances sur l’eau, mais l’expérience de l’Ontario montre qu’elle peut se faire sans pénaliser le consommateur. « Regardez en Ontario si la bouteille d’eau se vend plus cher qu’au Québec. La réponse, c’est non. Ça veut dire qu’on peut aller chercher une redevance qui est plus conséquente sans que ce soit forcément le consommateur qui en paie le prix », a dit M. Charette.

100 fois plus cher pour l’eau, dit QS

Rappelons que les trois principaux partis d’opposition réclament depuis des années un accroissement des redevances et que le gouvernement avait toujours refusé de le faire jusqu’ici. C’est Québec solidaire que demande la hausse la plus importante : le parti de gauche la multiplierait par plus de 100, et ferait passer les revenus de l’État de près de 3 millions à plus de 480 millions par année. Le Parti québécois réclame quant à lui « un rehaussement substantiel au moins au niveau de l’Ontario ».

Dans les deux cas, les députés Émilise Lessard-Therrien (QS) et Sylvain Gaudreault (PQ) estiment que le projet de loi du ministre n’est qu’une parade pour essayer de renforcer le bilan environnemental caquiste. « La CAQ est déjà en campagne électorale, elle fait des grandes promesses en espérant de nous faire oublier son bilan des quatre dernières années. Mais les gens ne sont pas dupes. Ce projet de loi là, c’est une coquille », a déploré Mme Lessard-Therrien.

photo érick labbé, archives le soleil

Jonatan Julien, ministre des Ressources naturelles

Inflation des tarifs d’électricités

De son côté, le ministre des Ressources naturelles, Jonatan Julien, a présenté le projet de loi « visant notamment à plafonner le taux d’indexation des prix des tarifs de distribution d’électricité ». Il corrige ainsi sa propre loi qui avait été adoptée sous le bâillon en décembre 2019 et qui visait à augmenter les tarifs d’Hydro-Québec en fonction de l’inflation. Or, cette inflation, galopante depuis des mois, ferait bondir les tarifs de 4 % ou 5 % au 1er avril 2023.

Jonatan Julien avait déjà indiqué que son projet de loi limiterait la hausse à un maximum de 3 %. Le texte législatif propose plutôt que l’augmentation soit fixée en fonction du taux le plus bas entre l’inflation et « le taux supérieur de la fourchette de maîtrise de l’inflation de la Banque du Canada », taux qui n’a pas dépassé 3 % depuis plus de 20 ans selon le ministre.

« On vient dire : on va plafonner au montant maximum de leur courbe. Je ne peux pas présumer qu’elle va être de même ad vitam aeternam, mais dans un avenir rapproché ça sera 3 %. Si ça devait être entre 2 et 4 en 2028, bien ça serait 4 % », a expliqué M. Julien.

Il n’y aurait pas de problème à adopter le projet de loi seulement cet automne si le gouvernement est réélu, puisque la révision des tarifs d’Hydro-Québec a lieu au printemps 2023, souligne-t-on au gouvernement.