Le gouvernement Trudeau ne cédera pas plus de pouvoirs en immigration au Québec, comme l’avait réclamé cette semaine le premier ministre François Legault, en plaidant qu’il serait ainsi possible d’être « plus exigeant sur la reconnaissance du français ».

« On est toujours prêts à répondre aux besoins et à avoir plus d’immigration, y compris plus d’immigrants francophones au Québec et au Canada. Et c’est pour ça qu’on travaille avec les provinces, avec Québec », a répondu Justin Trudeau aux questions de La Presse vendredi, lors d’une conférence de presse tenue à Montréal pour annoncer l’arrivée d’une usine de production de vaccins de Moderna.

Mercredi dernier, pendant l’étude des crédits budgétaires du Conseil exécutif, François Legault avait laissé entendre que la sauvegarde du français devrait ultimement passer par un rapatriement de « tous les pouvoirs en immigration » à Québec. Dans son « Plan nationaliste », qui se veut le document de référence du parti quant à sa position constitutionnelle, la Coalition avenir Québec en fait une revendication majeure.

« Ce qui est important, c’est de récupérer tous les pouvoirs », avait martelé le premier ministre, en « incluant le regroupement familial », et ce, afin d’« être plus exigeant sur la reconnaissance du français ». « C’est là qu’il y a du travail à faire », avait-il enchaîné, en réponse aux questions du péquiste Pascal Bérubé.

S’il reconnaît que la pénurie de main-d’œuvre, la reprise économique et « tous les défis auxquels on fait face » en marge de la pandémie imposent d’« en faire plus pour l’immigration », M. Trudeau n’entend pas pour autant céder davantage de pouvoirs à Québec.

« On va continuer d’être des bons partenaires là-dedans. C’est une compétence sur laquelle on va continuer de travailler ensemble et en partenariat », s’est-il contenté de dire, fermant ainsi la porte à toute forme de transfert de responsabilités supplémentaires.

Demande souvent formulée

La demande de M. Legault de rapatrier le programme de réunification familiale et d’obtenir plus de pouvoirs en immigration n’est pas nouvelle en soi.

Il y a quelques mois, durant la dernière campagne électorale canadienne, le chef caquiste avait clairement demandé – dans une lettre envoyée à tous les chefs fédéraux – d’obtenir plus de pouvoirs en immigration, en réclamant là encore le plein contrôle en matière de regroupement familial. Il avait alors parlé d’une « question de survie pour la nation québécoise ».

Cette multiplication de sorties prouve l’importance de cet enjeu aux yeux du Québec. La fin de non-recevoir de Justin Trudeau aura donc un effet important dans le plan d’action du gouvernement Legault en immigration.

Au cabinet de François Legault, vendredi, on a réitéré l’intention du gouvernement de « rouvrir l’entente Canada-Québec pour rapatrier au Québec plus de pouvoirs du gouvernement fédéral ». « Le Québec peut et doit gérer seul l’ensemble des programmes de travailleurs économiques. Il y a un dédoublement inutile et coûteux pour des milliers de Québécois, qui attendent des mois, voire des années pour le traitement de leur dossier », a écrit l’attaché de presse Ewan Sauves.

L’immigration demeure un champ de compétence officiellement partagé entre Québec et Ottawa. Au provincial, le gouvernement Legault peut établir ses propres seuils d’immigration, mais c’est au gouvernement Trudeau que revient le gros bout du bâton, en fixant notamment la limite démographique à l’échelle nationale.

C’est aussi à Ottawa que revient la gestion du programme de réunification familiale que voudrait rapatrier François Legault. Au total, ce programme représente près d’un nouvel arrivant sur quatre pour 2022 au Québec, dont la moitié ne parleraient pas français.

Avec la collaboration de Tommy Chouinard, La Presse