(Ottawa) L’étau se resserre autour des manifestants qui paralysent le centre-ville d’Ottawa depuis 21 jours et ceux qui ont bloqué trois postes frontaliers au pays. Des comptes appartenant à des gens qui participent ou soutiennent les « blocages illégaux » ont déjà été gelés par les institutions financières, selon la ministre des Finances, Chrystia Freeland. Elle s’est toutefois gardée de dire combien pour ne pas nuire à l’opération policière qui se prépare à Ottawa.

« De l’information est présentement partagée avec les institutions financières canadiennes par les forces de l’ordre, a-t-elle soutenu en conférence de presse jeudi avant-midi. Ces institutions sont déjà passées à l’action en s’appuyant sur cette information. »

La ministre n’a pas voulu dire s’il s’agissait de dizaines ou de centaines de comptes bancaires qui ont été gelés au pays. « J’ai ces chiffres ici, devant moi », a-t-elle affirmé, ajoutant qu’ils avaient été révisés par la cellule de crise hier soir. « Mais je ne vais pas les partager avec vous présentement parce que des actions opérationnelles sont en cours et nous voulons faire très attention de ne pas les compromettre, a-t-elle poursuivi. Je veux vous assurer que des gestes sont posés, nous le voyons, et que d’autres gestes seront posés au cours des prochains jours. »

Le gouvernement Trudeau veut couper le financement qui a permis les occupations illégales au centre-ville d’Ottawa et devant plusieurs postes frontaliers au pays. Le décret pour la mise en œuvre de Loi sur les mesures d’urgence est entré en vigueur mardi. Les plateformes de sociofinancement et les services de paiement en ligne doivent désormais rapporter toute transaction importante ou suspecte, incluant les transactions en cryptomonnaie, au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada.

Les banques et autres institutions financières pourront geler les comptes personnels ou commerciaux de tout participant aux blocages illégaux sans ordre de la cour et leurs actifs, numériques ou non. Ces institutions pourront procéder après avoir obtenu de l’information de la police sans craindre les poursuites judiciaires. Elles devront également signaler ces personnes à la Gendarmerie royale du Canada et au Service canadien du renseignement de sécurité.

Les conservateurs craignent certaines dérives. La députée Michelle Rempel Garner a écrit au commissaire à la protection de la vie privée, Daniel Therrien, pour lui demander d’enquêter dès maintenant sur ces pouvoirs extraordinaires. « La Loi sur les mesures d’urgence n’a jamais été utilisée auparavant, rappelle-t-elle. Par conséquent, la capacité de la Charte des droits et libertés et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques d’atténuer la portée de l’atteinte aux droits des Canadiens n’a pas encore été testée. »

La veille, la cheffe intérimaire du Parti conservateur, Candice Bergen, avait également soulevé certaines inquiétudes. « Si quelqu’un a fait un don à la manifestation il y a trois ou quatre semaines, est-ce que son compte bancaire sera gelé ? Est-ce que cela affectera leur cote de crédit ? Il y a beaucoup de questions autour des implications financières. »

La ministre Freeland a expliqué jeudi qu’il revient aux institutions financières de prendre la décision en collaboration avec les forces de l’ordre. « Nous avons souligné très clairement que ces blocages et ces occupations sont illégaux, a-t-elle réitéré. Il est maintenant temps pour les gens de s’en aller à la maison, de rapporter leurs camions chez eux et de cesser de financer des blocages illégaux et ces occupations. »

Des armes à Ottawa ?

Le ministre de la Sécurité publique Marco Mendicino n’a pas été en mesure de confirmer jeudi qu’il y aurait à Ottawa des armes à feu similaires à celles saisies à Coutts en Alberta. « Je n’ai pas dit qu’il y a des informations qu’il y a des armes à feu à Ottawa, a-t-il précisé en transmettant la question aux corps policiers. J’ai dit hier qu’il y a des reportages qui démontraient qu’il y a une motivation idéologique extrémiste entre les blocages. » Il a noté les similarités entre les cibles visées par les convois de camions, comme les frontières ou les parlements, leurs tactiques et leurs propos publiés dans les réseaux sociaux.