(Québec) Alors que le Parti libéral du Québec (PLQ) amorce un virage résolument plus vert et plus à gauche, la cheffe Dominique Anglade promet 100 milliards en investissements publics et privés dans une économie verte alliant électricité et hydrogène vert. Son « projet ÉCO » pourrait générer « deux Baie-James d’énergie » afin d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050.

C’est la première fois que Dominique Anglade, couronnée en pleine pandémie, rencontre ses militants en personne depuis qu’elle a pris les rênes du parti. Les membres du PLQ sont réunis en congrès tout le week-end à Québec. Après 18 mois aux commandes, la cheffe cherchera à apporter sa couleur à un parti qui cherche à se redéfinir d’ici aux élections de 2022.

Le Parti libéral « traverse un moment de redéfinition », de son propre aveu.

Les libéraux veulent s’identifier comme un parti plus « progressiste », mais rejettent tout rapprochement avec les propositions de Québec solidaire. « On n’est une pâle copie de personne », a tranché Mme Anglade devant les médias. Québec solidaire est un adversaire ayant des « idées assez radicales » et « la CAQ, c’est le siècle dernier », a-t-elle résumé.

Malgré ses ambitions de changement, la nouvelle cheffe veut renouer avec la recette libérale des « grands projets de société », comme le Plan Nord de Jean Charest ou la construction de la Baie-James sous Robert Bourassa. Celui de Dominique Anglade sera le « projet ÉCO », qui pourrait générer des investissements de 100 milliards (publics et privés) d’ici 2050. Elle n’a pas voulu préciser quelle proportion viendrait du privé.

« ÉCO », dont le nom évoque l’écologie et l’économie, alliera la nationalisation de l’hydrogène vert et l’augmentation de la production d’électricité renouvelable, comme l’hydroélectricité, pour soutenir le développement de cette nouvelle filière et atteindre la carboneutralité d’ici 2050. La Presse a révélé vendredi qu’un éventuel gouvernement libéral nationaliserait l’hydrogène vert.

Deux fois la Baie-James

« Si on additionne l’électrification de l’économie et le développement de l’hydrogène vert, nous aurons deux Baie-James d’énergie à construire d’ici 2050 », a lancé Dominique Anglade devant des militants revigorés.

Sans parler de nouveaux barrages hydroélectriques, elle a affirmé que le Québec devait « repartir à la conquête de l’énergie renouvelable la plus propre et rentable, qu’elle soit hydroélectrique, éolienne ou solaire, afin de répondre à nos besoins ». On sait que les surplus d’Hydro-Québec pourraient disparaître d’ici 2027.

« Les barrages, c’est une autre époque », a-t-elle précisé en mêlée de presse. « Il va falloir qu’on soit extrêmement créatifs en matière d’innovation dans le domaine de l’éolien, le solaire et dans le domaine de l’économie d’énergie également, c’est un pilier extrêmement important de ce qui s’en vient », a-t-elle ajouté.

Un futur gouvernement libéral s’engagerait à réduire le « gaspillage énergétique » des deux tiers d’ici 10 ans. « C’est une diminution de près de 10 % de la facture énergétique […] Cette cible, c’est l’équivalent de l’énergie de deux fois le complexe La Romaine à transformer en richesse », a-t-elle fait valoir.

Un projet ambitieux – c’est également le thème du congrès – qui a semblé plaire aux militants. « Un projet de société comme ça, […] ça touche tout le monde, c’est notre avenir », a affirmé une militante de la Beauce, Line Gilbert. Elle estime qu’un virage environnemental marqué est nécessaire et essentiel.

Éli Chevrier, des Îles-de-la-Madeleine, est militant depuis plus de 20 ans. Il vit l’effet des changements climatiques au quotidien. « C’est un beau projet d’avenir, c’est une solution qui paraît réaliste […] On est beaucoup affectés [par les changements climatiques] sur notre petit territoire, donc [ce nouveau projet] est une grande partie de la solution pour nous, assurément », a-t-il expliqué.

Les quelque 800 militants réunis ce week-end à Québec débattront ce samedi de nombreuses propositions regroupées autour de quatre axes :

  • l’environnement et les changements climatiques
  • les services aux citoyens 
  • la modernisation de l’agriculture 
  • la pénurie de main-d’œuvre et le progrès économique

Une large place est accordée aux propositions environnementales. Les militants voteront notamment pour atteindre une cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre plus élevée que celle du gouvernement Legault, fixée à 37,5 % d’ici 2030.

Les vétérans de l’aile parlementaire libérale rencontrés en marge du congrès se sont tous dits prêts à embrasser le changement plus progressiste et vert que veut opérer Dominique Anglade.

« Le Parti libéral a toujours été le parti de son temps, et le temps d’aujourd’hui […] c’est l’environnement », a affirmé le député libéral Carlos Leitão. « Je suis quelqu’un de progressiste et quelqu’un qui est dans la lignée des libéraux. L’environnement est fondamental, ça va être la neuvième valeur de notre formation politique, il était temps de le faire. Je ne vois pas comment les militants peuvent être contre ça », a pour sa part indiqué le président du caucus, Pierre Arcand.