(Ottawa) Le Parti libéral du Canada (PLC) et le Nouveau Parti démocratique (NPD) ont entrepris des pourparlers « informels » qui assureraient au gouvernement minoritaire de Justin Trudeau trois ans de tranquillité parlementaire.

Le but : donner aux libéraux les appuis nécessaires à la Chambre des communes pour se maintenir au pouvoir lors des votes de confiance durant la session. En coulisses, on ne veut pas s’avancer sur les paramètres des discussions menées par les échelons supérieurs des deux partis ni sur les chances d’en arriver à une entente.

Le premier ministre Justin Trudeau et le chef du NPD, Jagmeet Singh, ont chacun donné leur bénédiction à ces discussions qui pourraient avoir des conséquences sur le rapport des forces à la Chambre des communes.

Les libéraux doivent obtenir l’appui d’au moins un parti de l’opposition pour assurer l’adoption de projets de loi aux Communes.

Selon nos informations, la cheffe de cabinet du premier ministre, Katie Telford, et la cheffe de cabinet de M. Singh, Jennifer Howard, ont eu des échanges sur cette délicate opération politique qui offrirait une stabilité politique à Ottawa pour les trois prochaines années.

En moyenne, un gouvernement minoritaire dirige le pays pendant une période de 18 à 24 mois.

Méfiance

Le magazine Maclean’s a rapporté en premier la tenue de ces discussions, vendredi dernier. La Presse a réussi à confirmer que ces discussions avaient lieu auprès de sources indépendantes.

Ce sont les libéraux de Justin Trudeau qui ont lancé les discussions.

« Il y a loin de la coupe aux lèvres », a tenu à souligner une source dans le camp néo-démocrate, insistant pour dire qu’il existe une méfiance certaine à l’endroit des libéraux, qui font des promesses en campagne électorale pour mieux les écarter une fois au pouvoir. La réforme du mode de scrutin et la création d’une assurance médicaments nationale en sont deux exemples.

Selon Maclean’s, l’objectif des pourparlers n’est pas de conclure une coalition formelle qui entraînerait la nomination d’un député du NPD au cabinet, par exemple, mais d’en arriver à une entente qui permettrait au gouvernement Trudeau de faire avancer les priorités que partage le NPD.

Les libéraux veulent s’inspirer de l’accord qui a été conclu en 1985 en Ontario entre les libéraux de David Peterson et le NPD, qui était alors dirigé par Bob Rae. L’entente serait d’une durée de trois ans et verrait le NPD offrir les appuis nécessaires aux libéraux pour faire adopter les budgets annuels et le discours du Trône, notamment.

Pour la « stabilité du Parlement »

Reconnu pour soutenir des politiques de gauche au sein de son parti, le député libéral de la région de Toronto Nathaniel Erskine-Smith a déclaré qu’il appuyait sans équivoque une telle démarche.

« Quand je parle à des gens qui sont plus influents que moi, je dis que nous devrions en quelque sorte travailler sur un accord avec le NPD », a-t-il déclaré à Maclean’s.

« Il y a tellement de priorités que nous partageons. […] Nous devrions établir un accord pour la stabilité au Parlement, et veiller à ce que nous mettions en œuvre nos priorités communes au cours des trois prochaines années », a-t-il ajouté en évoquant la lutte contre les changements climatiques, la réconciliation avec les Premières Nations et l’assurance médicaments.

En retour, le gouvernement Trudeau s’engagerait à reprendre certaines des priorités du NPD en matière de logement abordable, de lutte contre les changements climatiques et d’aide aux familles à faible revenu, entre autres.

Ce sont des pourparlers informels. Mais l’objectif est de respecter le mandat que nous a donné la population canadienne. Et ce mandat, c’est de travailler avec le gouvernement pour obtenir des résultats concrets pour les Canadiens.

Une source néo-démocrate anonyme, s’adressant à La Presse

Ces pourparlers ont lieu au moment même où le gouvernement de Justin Trudeau doit rédiger un discours du Trône dans lequel il énoncera ses grandes priorités de la nouvelle session parlementaire. Le discours du Trône sera lu au Sénat vraisemblablement le 23 novembre par la gouverneure générale, Mary Simon.

Les travaux parlementaires reprendront officiellement le 22 novembre, mais la première journée de session sera consacrée à l’élection du président ou de la présidente de la Chambre des communes, comme c’est toujours le cas après la tenue d’élections générales.

Au dernier scrutin, les électeurs ont essentiellement opté pour le statu quo parlementaire en confiant au Parti libéral un deuxième mandat minoritaire de suite. Les libéraux ont remporté 160 sièges, soit 10 de moins que la majorité requise. Le NPD a pour sa part obtenu 25 sièges, tandis que le Parti conservateur a remporté 119 sièges, le Bloc québécois, 32 sièges et le Parti vert, 2 sièges.