(Ottawa) Près d’un fonctionnaire fédéral sur dix n’avait toujours pas rempli une attestation de vaccination à deux jours de la date butoir du 29 octobre, mais au gouvernement, on n’a pas l’intention de reporter l’échéancier. Pendant ce temps, les membres du Parti conservateur contestent l’obligation d’être pleinement vacciné pour entrer dans les édifices parlementaires.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor a indiqué mercredi que « plus de 240 000 » des 268 000 employés de la fonction publique assujettis à cette politique, soit environ 91 % du nombre total de fonctionnaires, avaient dévoilé leur statut vaccinal en date du 27 octobre.

À ceux qui résistent, la présidente du Conseil du Trésor, Mona Fortier, a adressé une mise en garde sur les ondes de la station de radio locale de Radio-Canada : « Non », a-t-elle tranché, il n’est pas question de laisser plus de temps.

Le couperet tombera le 15 novembre. À compter de cette date, les récalcitrants seront suspendus sans salaire. Cette date est aussi « ferme », selon ce qu’a indiqué à La Presse une source gouvernementale qui a demandé l’anonymat pour s’exprimer librement.

Au Secrétariat du Conseil du Trésor, en début de semaine, on n’a pas voulu préciser si certains employés avaient demandé à être exemptés en invoquant des motifs médicaux ou religieux.

De son côté, l’Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC), qui avait reproché au fédéral de ne pas l’avoir suffisamment consultée avant d’annoncer cette mesure, a refusé de dire si des membres avaient déposé des griefs ou manifesté une intention de s’adresser aux tribunaux.

En revanche, dans une déclaration écrite transmise à La Presse, le président national du syndicat, Chris Aylward, a signalé que si des membres de l’AFPC « choisissent de ne pas se faire vacciner et se tournent vers [le syndicat, celui-ci examinera] leur cas ».

Et « dans les situations où la politique est appliquée de façon déraisonnable ou si leurs droits sont bafoués, nous les représenterons », a ajouté le chef syndical.

Des questions sans réponse

Quel impact pourrait avoir le départ de milliers de fonctionnaires sur la bonne marche de l’État, ou encore sur les services gouvernementaux à la population ? Y a-t-il un plan de contingence ? Ces questions demeurent sans réponse.

Les fonctionnaires non vaccinés qui ne bénéficient d’aucune exemption demeureront en congé jusqu’à ce que leur statut vaccinal change ou que la politique ne soit plus requise, tandis que ceux qui en ont obtenu une devront se faire tester deux fois par semaine.

Lorsqu’il a annoncé cette mesure, le 6 octobre dernier, le premier ministre Justin Trudeau a prévenu que les exemptions seraient « rares » et difficiles à obtenir, et qu’une « conviction personnelle » antivaccin ne constituerait pas un motif valable pour s’en prévaloir.

Les conservateurs résistent

Là où la vaccination obligatoire ne passe pas, c’est au Parti conservateur.

Le chef Erin O’Toole a signalé mercredi, à l’issue de la réunion de son caucus, que la décision d’imposer cette contrainte, qui a été prise par le Bureau de régie interne (BRI), serait contestée dès que possible lorsque les travaux reprendront à la Chambre des communes.

« Une question de privilège sera soulevée le plus rapidement possible […] pour contester la conduite inappropriée et le précédent créé par le Bureau de régie interne, car seule la Chambre des communes peut déterminer sa composition et sa conduite », a-t-il déclaré en conférence de presse au parlement.

Martelant que Justin Trudeau devrait « vraiment avoir honte de politiser la question des vaccins et de diviser les Canadiens », Erin O’Toole a fait valoir qu’il encourageait « tous les Canadiens, tous les Québécois » à se faire vacciner contre la COVID-19.

Il a toutefois refusé de dire ce qui arrivera aux députés qui ne sont pas vaccinés, se bornant à dire que « tous les députés vont être vaccinés à la Chambre des communes [parce que] c’est très important », et il a encore une fois écarté l’option d’un format hybride pour la conduite des travaux parlementaires.

Les autres partis favorables

Le BRI a annoncé il y a un peu plus d’une semaine qu’à partir du 22 novembre, jour de l’ouverture de la 44e législature, personne ne pourra entrer dans un édifice de la cité parlementaire sans être pleinement vacciné, suscitant l’ire de l’opposition officielle, qui a dénoncé l’opacité du processus décisionnel.

Les libéraux, les bloquistes et les néo-démocrates sont tous favorables à la vaccination obligatoire des élus.

Il est donc d’ores et déjà clair que les conservateurs seraient minoritaires si la question était soumise à un vote.

Invité à dire ce qu’il adviendrait, Erin O’Toole s’est borné à répéter que ses députés allaient « respecter toutes les règles et les consignes sanitaires en place », avant et après un verdict de la Chambre ou de son président.