Le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, a réclamé mercredi que le Parlement soit rappelé « rapidement » pour s’attaquer à plusieurs dossiers urgents, moins de 48 heures après les élections fédérales. Selon lui, la population a clairement fait savoir qu’une configuration minoritaire est son souhait, et il faudra le respecter.

« J’espère que le Parlement sera rappelé rapidement. Il y a des choses que Justin Trudeau a lui-même dit être urgentes. Et l’urgence dans une démocratie, ça se règle dans l’institution démocratique », a martelé M. Blanchet, à Montréal, lors de sa première apparition publique depuis le jour du vote, lundi dernier.

Ayant jusqu’ici réussi à faire élire 34 députés, deux de plus qu’en 2019, le chef du Bloc – qui avait dit vouloir en obtenir 40 – s’est tout de même montré très satisfait de la performance ses troupes. « Est-ce que c’est la victoire que nous espérions ? Pas tout à fait, non. Mais est-ce que c’est une victoire ? Oui », a-t-il offert, en citant « une participation déficiente » et une « élection qui ne devait pas avoir lieu » comme probables facteurs responsables du nombre presque identique de sièges.

À ceux qui affirment que la question controversée de Shachi Kurl au débat des chefs en anglais n’a pas eu l’effet escompté, M. Blanchet rétorque que « ç’a été un évènement important qui a sûrement provoqué une certaine indignation, mais que le reste, quant à son poids réel, est peut-être spéculatif ». « Ça a bien sûr défrayé la manchette pendant plusieurs jours, mais je n’accrédite pas du tout cette idée qu’avant cet évènement-là, la campagne n’allait donc pas bien, et après, la campagne allait donc bien. C’est une fabrication complète », a-t-il jugé.

« On est très loin d’une prochaine élection », a aussi glissé M. Blanchet. À ses yeux, en choisissant un Parlement sensiblement identique au précédent, le Canada a clairement indiqué aux élus fédéraux qu’il juge cette configuration minoritaire capable de fonctionner et qu’il s’attend à ce que les dossiers poursuivent leur chemin de façon normale.

En s’adressant à M. Trudeau, le député de Belœil–Chambly a dit « présumer » que ce dernier « a bien compris qu’il n’a pas du tout reçu le mandat de s’obstiner dans sa volonté d’empiéter sur les juridictions du Québec et des provinces en matière de santé, d’infrastructures ou de toutes autres espèces de matières ».

Il faisait ainsi référence aux nombreuses promesses faites par les libéraux en santé pendant la campagne, en demandant des conditions en retour qui, bien souvent, prennent la forme de l’atteinte de certaines cibles. Les bloquistes, eux, réitèrent depuis le départ qu’Ottawa doit « verser l’argent » à Québec, sans condition.

« Trois petits amis »

M. Blanchet a par ailleurs refusé d’évaluer le rapport de force du Bloc aux Communes, alors que la menace de faire tomber le gouvernement et de provoquer d’autres élections peut difficilement être utilisée, même s’il partage toujours la balance du pouvoir avec le Nouveau Parti démocratique. « On vient encore de coûter la majorité aux libéraux. J’espère qu’ils y apprendront quelque chose », a-t-il toutefois illustré.

« La responsabilité d’obtenir des appuis, c’est celle du premier ministre, ce n’est pas la mienne. Il est dans une situation singulièrement avantageuse, parce qu’il a trois petits amis dans la classe. Il suffit qu’il y en ait un des trois qui soient d’accord avec lui, et il est correct. Cela dit, la responsabilité de faire survivre le gouvernement de Justin Trudeau, soyez assurés que ce ne sera pas ma priorité première », a-t-il insisté.

Yves-François Blanchet a aussi profité de sa conférence de presse, mercredi, pour demander à M. Trudeau de convoquer le plus rapidement possible ses homologues provinciaux à un sommet sur la santé, qui est la question la plus urgente à traiter, selon lui.

Le chef bloquiste dit avoir parlé au premier ministre François Legault, et affirme que ce dernier lui a fait part de sa volonté de s’attaquer en priorité au dossier des transferts fédéraux en santé. M. Blanchet a eu le même message du premier ministre ontarien Doug Ford, avec qui il s’est également entretenu.

Son parti a globalement fait valoir que Justin Trudeau devait prendre acte que la population lui avait refusé une majorité, et qu’il devait donc tenir compte des partis de l’opposition dans sa gouvernance.

Avec La Presse Canadienne