(Ottawa) Le gouvernement Trudeau injectera 80 millions de dollars au cours des quatre prochaines années afin de soutenir la recherche, le développement et la commercialisation dans le domaine de la cybersécurité.

Le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne, doit confirmer cet investissement jeudi. Son objectif : développer les compétences et les talents afin de mettre sur pied un Réseau d’innovation pour la cybersécurité et ainsi faire du Canada un leader mondial dans ce domaine.

À terme, le but du gouvernement Trudeau est de créer un réseau national s’appuyant sur plusieurs centres d’expertise qui seraient affiliés à des établissements d’enseignement aux quatre coins du pays. Le secteur privé serait aussi mis à contribution, de même que les organisations sans but lucratif et les divers paliers de gouvernements.

Au Québec, l’Université Concordia est déjà reconnue comme un chef de file en matière de recherche sur la cybersécurité, non seulement dans la province, mais aussi à l’échelle du Canada.

« L’économie numérique continue de croître rapidement, et cet essor est d’autant plus accéléré en raison de la pandémie de COVID-19. Pour la population et les entreprises canadiennes, la cybersécurité est donc une question de plus en plus préoccupante », a indiqué une source gouvernementale.

Alors que les cyberattaques se multiplient dans plusieurs pays occidentaux et que le Canada n’échappe pas à ces incidents, le gouvernement Trudeau juge primordial de se doter d’un Réseau d’innovation pour la cybersécurité. « Un solide secteur dans le domaine permettrait de renforcer la confiance des Canadiens envers l’économie numérique », a-t-on fait valoir.

Un récent rapport publié par l’Observatoire des conflits multidimensionnels de la Chaire Raoul-Dandurand de l’UQAM a démontré que les cyberattaques sont à la hausse au Canada.

Les auteurs du rapport se sont concentrés sur 51 cyberincidents à caractère géopolitique ayant directement touché le Canada au cours des dix dernières années.

Dans leur rapport, ils ont noté qu’en 2017, le Centre de la sécurité des télécommunications révélait par exemple que le gouvernement fédéral à lui seul subissait chaque année près de 2500 tentatives d’intrusions informatiques de la part d’acteurs étatiques étrangers, tout en précisant que l’immense majorité de ces activités demeurent sans conséquence, mais qu’une petite fraction donne occasionnellement lieu à des brèches importantes.

Sur les 51 incidents, 19 étaient le fait de la Russie et 12 de la Chine. L’Iran (7 incidents) et Corée du Nord (5 incidents) représentent aussi des acteurs présents dans ce domaine.

Les auteurs soulignaient aussi que leur relevé n’était pas exhaustif et qu’il faut envisager que de nombreux incidents demeurent pour l’heure inconnus du grand public canadien et n’ont en conséquence pas été recensés dans le cadre de ce rapport, qui s’appuie sur des sources ouvertes.

Le comité permanent du Sénat des banques et du commerce a aussi sonné l’alarme dans le passé.

Le comité a conclu que le gouvernement fédéral ne parvient pas à protéger la population canadienne contre les cyberattaques de plus en plus sophistiquées qui ont déjà fait des millions de victimes.

« En 2017 seulement, plus de 10 millions de Canadiens et de Canadiennes ont vu leurs renseignements personnels compromis par des attaques ciblées et surtout par des cyberopérations dirigées contre des entreprises qui détiennent leurs renseignements personnels », avait-on relevé dans le rapport produit par le comité sénatorial.

« Renseignements bancaires, activités sur l’internet, numéros d’assurance sociale, photos de famille : cette mine de données personnelles est à la portée d’individus malveillants qui peuvent vous dérober votre vie depuis l’autre bout du monde. Mais ce ne sont pas que les particuliers qui sont attaqués. Des pirates informatiques ont aussi pris des hôpitaux en otage en cryptant leurs systèmes essentiels et en exigeant de l’argent pour les restaurer ».

Avec La Presse Canadienne