(Québec) La vie parlementaire reprendra mercredi un semblant de normalité à l’Assemblée nationale. Après une pause historique de deux mois, les députés et les chefs de l’opposition franchiront les portes du Salon bleu, où ils pourront questionner – en chair et en os – le premier ministre François Legault. II s’agira aussi du baptême de la nouvelle cheffe du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade.

« Je suis fébrile », a lancé la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Couronnée à la tête du PLQ lundi, après le retrait inattendu du seul autre candidat en lice, Alexandre Cusson, Dominique Anglade brisera la glace ce mercredi matin lors de la tenue de deux séances de questions consécutives de 45 minutes.

« Mon ton ne sera pas différent de celui que vous avez vu jusqu’à présent. Je vais vouloir être constructive, saluer le travail accompli, mais il va falloir que l’on pose les questions qui méritent d’être posées », prévient celle qui était en route vers la capitale nationale au moment de l’entretien avec La Presse.

Elle a bien l’intention de confronter le gouvernement Legault sur des « décisions pas suffisamment » axées sur la science et « des changements de cap » difficilement explicables, notamment pour la stratégie de tests et les proches aidants. 

Je pense qu’il y a deux mots qui sont importants : la cohésion et la cohérence.

Dominique Anglade, nouvelle cheffe du Parti libéral du Québec

Comme Mme Anglade, plusieurs députés n’ont pas remis les pieds à Québec depuis l’ajournement des travaux le 17 mars dernier. La rentrée parlementaire se déroulera dans le respect de consignes sanitaires strictes.

Le premier ministre a aussi demandé que le drapeau du Québec sur la tour centrale de l’hôtel du Parlement soit mis en berne, de l’aube au crépuscule mercredi, à la mémoire des 3131 victimes de la pandémie de COVID-19. M. Legault prendra part à la première période des questions uniquement, à 9 h. Il tiendra aussi son traditionnel point de presse à 13 h.

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François Legault, premier ministre du Québec

Les travaux se dérouleront exceptionnellement à quorum réduit. Un groupe de 20 députés de la Coalition avenir Québec seulement formera le gouvernement. Ce nombre diminue à 8 pour l’opposition officielle et à « 3 au plus » pour le Parti québécois et Québec solidaire. Des députés pourront aussi alterner au Salon bleu.

Retour « pas prématuré »

« Il n’est pas prématuré de pouvoir exercer notre fonction de régulateur de l’action gouvernementale », a fait valoir le chef péquiste, Pascal Bérubé.

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Pascal Bérubé, chef du Parti québécois

« La reprise des travaux parlementaires dans une forme plus conventionnelle va nous permettre de questionner plusieurs décisions importantes, des aspects qui nous ont été soulignés depuis le début de la crise [par nos concitoyens] et certainement qu’on va faire appel à la responsabilité ministérielle », a-t-il souligné.

Parce que si, lors des premières semaines de la pandémie, les partis de l’opposition ont été plus timides dans leurs critiques à l’endroit du gouvernement Legault, devant l’urgence d’agir à l’unisson, le début du déconfinement laisse davantage de place aux débats, estiment-ils. « C’est beaucoup plus politique », admet Manon Massé, cheffe parlementaire de Québec solidaire.

« Toutes les décisions de l’après-crise de la relance. On n’est plus dans des mesures d’urgence, ce sont des choix politiques qui sont faits. […] J’entendais que le gouvernement voulait mettre la pédale au fond pour le troisième lien à Québec. » 

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Manon Massé, cheffe parlementaire de Québec solidaire

Que le gouvernement investisse pour s’assurer que l’économie [reprenne], on n’a rien contre, mais ce sont des choix pour lesquels il faut être capable de s’exprimer.

Manon Massé

Québec solidaire fera valoir ses préoccupations sur la « santé et la sécurité des travailleurs » qui reprennent du service et ceux dans le domaine de la santé.

Le Parti québécois questionnera le gouvernement à propos de l’endroit où se trace la ligne entre le politique et la santé publique. La formation réclamait lundi que les points de presse du Dr Horacio Arruda et de M. Legault soient distincts.

« Jusqu’à maintenant, ça ne demeure pas clair pour nous là où s’arrête la santé publique et là où commence la politique, souligne-t-il. Si on veut être capables d’évaluer l’action du gouvernement, il faut savoir ce qui relève des décisions politiques et ce qui relève des indications de la santé publique. »

L’appel bihebdomadaire entre le premier ministre et les chefs de l’opposition pour faire le point sur l’état de la situation n’aura plus lieu avec la reprise partielle des travaux. Depuis deux semaines, par ailleurs, on avait déjà réduit la fréquence de cette réunion téléphonique à une fois par semaine.

Les commissions parlementaires virtuelles se poursuivent jusqu’au 22 mai. La reprise des travaux de façon plus intensive est prévue pour le 25 mai, toujours à quorum réduit. L’étude des crédits en commissions parlementaires se tiendra au mois d’août prochain.