(Ottawa) Justin Trudeau compare la publication des caricatures de Mahomet à l’acte de crier « au feu » dans un cinéma bondé.

C’est ainsi que le premier ministre du Canada a précisé sa pensée sur ces caricatures qui ont servi de prétexte à deux attaques sur le territoire français depuis deux semaines.

M. Trudeau ne partage donc manifestement pas l’opinion du président français, Emmanuel Macron, qui, lui, réclame le droit de se moquer des religions.

Le 16 octobre, l’enseignant Samuel Paty a été décapité en pleine rue. Jeudi, ce sont deux femmes et un homme qui ont été égorgés dans une église de Nice.

Après la première attaque, le président Macron a défendu le droit à la caricature. Jeudi, arrivé sur les lieux de l’attaque terroriste, il persistait, déclarant que les Français étaient attaqués pour leurs « valeurs », leur « goût de la liberté » et leur choix de « ne céder à aucun esprit de terreur ».

« Je le dis avec beaucoup de clarté une fois encore aujourd’hui : nous n’y céderons rien », a-t-il lancé, jeudi soir à Nice.

Pendant ce temps, à Ottawa, M. Trudeau condamnait cette attaque « injustifiable » de Nice, mais évitait de dire s’il partageait l’opinion de M. Macron sur la caricature du prophète musulman.

Vendredi, le premier ministre a été obligé de revenir sur la même question en conférence de presse.

« La liberté d’expression n’est pas sans limites. On n’a pas le droit, par exemple, de crier au feu dans un cinéma bondé de monde », a-t-il dit après avoir assuré qu’il est un défenseur de la liberté d’expression.

« Dans une société pluraliste, diverse et respectueuse comme la nôtre, nous nous devons d’être conscients de l’impact de nos mots, de nos gestes, sur d’autres, particulièrement ces communautés, ces populations qui vivent énormément de discrimination encore », a-t-il poursuivi.

Selon lui, il ne faut pas chercher à « blesser, de façon arbitraire ou inutile, ceux avec qui on est en train de partager une société et une planète ».

Il s’est défendu de céder ainsi à la terreur.

« C’est une question de respect », a-t-il répondu.

« C’est une question de ne pas chercher à déshumaniser ou à blesser délibérément. Je pense qu’il y a toujours un débat extrêmement important, extrêmement sensible, à avoir sur de possibles exceptions (à la liberté d’expression) », a-t-il argué.

Il a tout de même tenu à conclure en répétant que les deux crimes des deux dernières semaines, en France, sont « injustifiables » et que les terroristes qui les ont commis « ne représentent aucunement une religion, ne représentent pas du tout les musulmans ici au Canada ou partout dans le monde ».