(Ottawa) Le ministre des Affaires étrangères François-Philippe Champagne se rendra la semaine prochaine en Europe où il rencontrera notamment la leader de l’opposition en exil de la Biélorussie et s’entretiendra du conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie.

M. Champagne se dit déterminé à projeter l’image de politique étrangère du Canada en tant que défenseur des droits de la personne tout en forgeant des alliances avec des alliés de confiance et de longue date. L’annonce faite vendredi d’une tournée européenne dans quatre pays — son deuxième voyage à l’étranger dans plusieurs pays en moins de deux mois au milieu d’une pandémie mondiale — semble souligner cet engagement.

M. Champagne part dimanche pour un voyage qui le mènera en Grèce, en Autriche, en Belgique et en Lituanie. Il rencontrera la leader de l’opposition biélorusse en exil et tiendra des discussions sur les combats entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie dans la région du Haut-Karabakh.

Il clôturera le voyage par une escale à Vilnius, en Lituanie, où il rencontrera l’opposante biélorusse Svetlana Tikhanovskaya. Elle y cherche refuge après ce que M. Champagne a lui-même qualifié de victoire électorale frauduleuse du chef autoritaire de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko, l’été dernier.

« Il n’y a vraiment qu’une poignée de pays qui ont pris la parole et se sont levés pour défendre les droits des minorités, pour défendre les droits de l’homme, pour parler aussi d’enjeux comme le Haut-Karabakh, la Biélorussie, Hong Kong, les Ouïghours, a affirmé le ministre dans une récente entrevue. Si vous regardez les déclarations et les mesures qui ont été prises, vous tomberez toujours soit sur le Canada, le Royaume-Uni, l’Australie, les États-Unis, l’Allemagne ou la France — citez-moi en un autre ? — La Nouvelle-Zélande parfois. »

Bessma Momani, spécialiste des affaires internationales à l’Université de Waterloo, a souligné qu’il y a des limites à ce que les ministres des Affaires étrangères peuvent faire en ce qui a trait à la diplomatie derrière un écran d’ordinateur, et qu’il est donc facile de comprendre le désir de M. Champagne d’effectuer des déplacements à l’étranger.

Selon Mme Momani, il est également judicieux pour le Canada de trouver des alliés pour travailler sur des questions en tandem, que ce soit la reprise de la violence entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, ou le différend avec la Chine qui a vu la République populaire emprisonner deux Canadiens dans ce qui est considéré comme une mesure de représailles pour l’arrestation par le Canada de la dirigeante de Huawei.

Malgré l’impasse concernant les détentions de Michael Kovrig et Michael Spavor, M. Champagne a pris la parole pour critiquer la Chine sur les questions de droits à Hong Kong et la situation des Ouïghours musulmans dans la province du sud-est du Xinjiang.

« Il faut trouver de nouvelles coalitions en l’absence d’unité mondiale sur un certain nombre de crises des droits de l’homme, comme au Xinjiang et au Haut-Karabakh », a déclaré Mme Momani. « De plus, il y a un pouvoir et une sécurité à agir de concert, en particulier face à des pays puissants comme la Chine, dans quels cas il est difficile et risqué pour le Canada de se trouver seul. »

M. Champagne s’est récemment associé à son homologue britannique, Dominic Raab, pour imposer des sanctions qui visent directement Alexander Loukachenko, sa famille et ses ministres, concernant la violente répression contre les manifestations massives ayant suivi la défaite de Mme Tikhanovskaya aux élections d’août.

Mme Tikhanovskaya, âgée de 37 ans, est une néophyte politique qui a défié Alexander Loukachenko après que son mari, qui prévoyait de briguer la présidence, eut été emprisonné. L’ancienne professeure d’anglais est parvenue à se rapprocher des Bélarussiens qui en ont assez du régime autoritaire de Loukachenko et d’une économie en déclin au cœur de la pandémie.

Mme Momani a soutenu que la rencontre de M. Champagne avec l’opposante mettra en lumière les sanctions que le Canada a imposées à la Biélorussie de concert avec la Grande-Bretagne au moment où Alexander Loukachenko s’accroche à l’espoir que le monde abandonne « le mouvement social démocratique naissant » qui s’oppose à lui.

« Bien que Mme Tikhanovskaya ne soit qu’une figure de proue, la rencontre est une occasion pour le Canada de démontrer son soutien à une opposition biélorusse en difficulté. »

Le Haut-Karabakh

À Vienne, M. Champagne rencontrera des représentants de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui appelle à des négociations pacifiques entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie après la récente flambée de leur long différend sur la région du Haut-Karabakh.

M. Champagne a également appelé conjointement avec M. Raab à un cessez-le-feu entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie.

Le ministre canadien se rendra probablement compte qu’il sera difficile de faire des progrès importants sur cette question, a déclaré Mme Momani.

« À moins qu’ils ne parviennent à amener les acteurs régionaux de Turquie, de Russie, d’Iran et d’Israël, qui opèrent tous dans ce conflit, à la table. La barre est donc beaucoup trop élevée pour que le Canada fasse une différence dans ce dossier », a-t-elle soutenu.

À Bruxelles, les rencontres de M. Champagne comprendront des entretiens en face à face avec son homologue de l’Union européenne, Josep Borrell et le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg.

« Grâce au dialogue et à la coopération avec nos partenaires européens, nous pouvons et devons relever les défis actuels en Méditerranée orientale, en Biélorussie et au Haut-Karabakh, en plus de trouver des solutions pacifiques durables. Comme notre sécurité et notre prospérité sont étroitement liées à celles de l’Europe, nous accordons une grande importance au maintien de relations transatlantiques étroites. Nous serons toujours unis dans la promotion et le respect du droit international, de la paix, des droits de la personne et de la démocratie », a déclaré le ministre par communiqué vendredi.

À Athènes, M. Champagne rencontrera le premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis et son ministre des Affaires étrangères, Nikos Dendias, pour discuter des dangereux voyages que les réfugiés effectuent à travers la mer Méditerranée pour atteindre l’Europe.

M. Champagne sera en isolement pendant 14 jours au Canada après ce voyage, sa deuxième incursion transatlantique de l’ère COVID-19 après un voyage dans quatre pays en août qui comprenait une escale au Liban.