(Ottawa) Les conservateurs accusent le gouvernement Trudeau de se précipiter imprudemment pour qu’il soit plus facile pour les Canadiens éprouvés par des souffrances intolérables de recevoir une aide médicale pour mettre fin à leurs jours.

Le gouvernement libéral a déposé la semaine dernière un projet de loi qui modifierait la loi sur l’aide médicale à mourir pour la mettre en conformité avec un jugement rendu l’automne dernier par la Cour supérieure du Québec.

Cette décision a invalidé une disposition de la loi qui restreignait l’accès à l’aide à mourir aux personnes dont la mort naturelle est raisonnablement prévisible.

« Cela n’aurait pas dû être ainsi, […] et il est regrettable que ce gouvernement nous ait si imprudemment mis dans cette position en adoptant rapidement une loi qui pourrait sans doute mettre en danger des Canadiens vulnérables et qui supprime des mesures de protection essentielles », a déclaré le député conservateur Michael Cooper aux Communes.

Le gouvernement a présenté le projet de loi pour la première fois en février, mais il n’a pas dépassé la phase d’ouverture du processus législatif avant l’ajournement du Parlement en raison de la pandémie de COVID-19 à la mi-mars. Le projet de loi a été retiré lorsque le premier ministre Justin Trudeau a prorogé le Parlement en août. Le gouvernement l’a réintroduit la semaine dernière.

Le projet de loi supprimerait la mort raisonnablement prévisible comme une exigence pour une aide médicale à mourir, mais conserverait le concept d’établir des règles d’admissibilité moins lourdes pour ceux qui sont proches de la mort et des règles plus strictes pour ceux qui ne le sont pas.

Pour les personnes jugées proches de la mort, le gouvernement propose de supprimer l’exigence selon laquelle une personne doit attendre 10 jours après avoir été approuvée pour une aide à mourir avant de recevoir la procédure. Cela réduirait également le nombre de témoins nécessaires à un plutôt que deux.

Il propose également de supprimer l’exigence selon laquelle une personne doit pouvoir donner son consentement une seconde fois immédiatement avant de recevoir la procédure.

Les gens qui ne sont pas près de la mort feraient face à des obstacles plus importants.

Ces personnes seraient confrontées à une période minimale de 90 jours pour évaluer leurs demandes d’aide à mourir. L’un des deux médecins qui évaluent une demande devrait avoir une expertise dans l’état de santé particulier de la personne. Et la personne devrait être en mesure de donner son consentement définitif immédiatement avant l’aide à mourir.

Le projet de loi interdirait également explicitement l’aide à mourir dans les cas où la maladie mentale est la seule condition médicale sous-jacente.

Une « transformation radicale »

M. Cooper a soutenu vendredi que le projet de loi était « une transformation radicale » de la loi approuvée par le Parlement il y a quatre ans à peine, qui envisageait l’aide à mourir comme « une exception à la règle » uniquement pour ceux qui approchent déjà de la fin de leur vie.

« Avec cette législation, il serait désormais approprié de mettre fin à la vie humaine même en l’absence d’une maladie en phase terminale et même dans des circonstances où la souffrance est médicalement gérable », a-t-il déclaré.

De plus, le député conservateur a soutenu que le projet de loi va « bien au-delà » de ce qu’exigeait la décision du tribunal québécois.

Faire appel de la décision du tribunal aurait donné au Parlement la possibilité d’examiner la complexité des questions et aurait fourni une certaine clarté sur le cadre juridique dans lequel le Parlement peut légiférer, a-t-il fait valoir.

Appuis du Bloc et du NPD au projet de loi

Les députés du Bloc québécois et du Nouveau Parti démocratique ont manifesté leur appui aux principes du projet de loi. Mais M. Cooper et d’autres conservateurs ont soutenu que le projet de loi ne protège pas les droits de conscience des professionnels de la santé qui, pour des raisons morales ou religieuses, refusent de participer à une aide médicale à mourir ou même de diriger les patients vers quelqu’un qui le fera.

Le député du Bloc québécois, Alexis Brunelle-Duceppe, s’est demandé si les conservateurs subissaient des pressions pour s’opposer au projet de loi de la part de groupes religieux — une accusation rejetée par Michael Cooper.

Mais la position des conservateurs sur le projet de loi est conforme à une promesse faite par le chef Erin O’Toole, qui a courtisé les conservateurs sociaux lors de la récente course à la direction de son parti en jurant de protéger les droits à la liberté de conscience dans de tels cas.