(Québec) Le modèle économique mis de l’avant par François Legault, sans perspective d’ensemble, est complètement dépassé, selon la cheffe libérale Dominique Anglade.

Ce dont le Québec a besoin en 2020, c’est plutôt d’une approche globale, intégrée, moderne, qui mise sur ses forces, sur le savoir et la technologie, en lui permettant de se démarquer à l’étranger, prône la cheffe de l’opposition officielle.

Traditionnellement, le Parti libéral du Québec (PLQ) était vu comme le parti de l’économie, une étiquette que Mme Anglade tente de se réapproprier, depuis que François Legault a fait de l’économie une priorité de son parti, et offert aux gens d’affaires une place de choix dans son équipe.

Partisan de la production locale et de l’achat local, M. Legault a affirmé récemment en entrevue qu’il voulait troquer l’appellation « Fabriqué en Chine » par « Fabriqué au Québec », une approche qui l’a laissée de glace.

Le premier ministre adopte en matière de développement économique « une manière de voir les choses qui est passée, et dépassée, qui est d’une autre époque », a estimé Mme Anglade, en entrevue récemment à La Presse Canadienne.

À son avis, il ne sert à rien de vouloir concurrencer des géants comme la Chine ou l’Inde sur leur terrain.

Qu’on pense, dit-elle, aux coûts de la main-d’œuvre, bien plus élevés chez nous, aux marchés qu’il faudrait développer en prenant une place déjà occupée, ce qui supposerait une aide massive de l’État, si on veut offrir un produit à un coût compétitif. Ou bien, il faudrait moderniser les équipements, auquel cas on ne créerait pas d’emplois, plaide-t-elle.

Au lieu de cela, propose Mme Anglade, « investissons dans les produits dans lesquels nous sommes déjà bons, où on peut aller beaucoup plus loin et se démarquer sur la scène internationale ».

Le Québec doit « concurrencer là où il a vraiment une valeur ajoutée », selon la cheffe libérale, qui dit vouloir miser sur certains secteurs, dont l’agroalimentaire, l’intelligence artificielle et la lutte aux changements climatiques.

Il faut « choisir dans quoi on est les meilleurs », dit-elle.

Or, ce n’est pas le cas actuellement, à son avis, en raison de la vision d’un autre âge adoptée par le gouvernement, citant en exemple le défunt projet de loi 61 de relance économique, qui ne misait en fait que sur les projets d’infrastructures.

Elle reproche surtout au gouvernement Legault de traiter cet enjeu à la pièce, en investissant dans des entreprises « à droite et à gauche », sans vue d’ensemble.

« Il faut aller au-delà de ça », dit-elle, et réfléchir en vue de favoriser « une relance qui intègre les impacts sociaux, les impacts environnementaux, les impacts sur les femmes, les impacts sur l’ensemble de la société ».

Par exemple, elle rejette l’approche en silos en matière d’environnement. Les projets en ce domaine ne devraient pas relever du ministère de l’Environnement uniquement, mais « de l’ensemble des portfolios », donc de tous les ministères. Pourtant, ce n’est « pas là du tout qu’on est », avec le gouvernement actuel.

L’ancienne ministre de l’Économie dans le cabinet Couillard se dit convaincue qu’économie et environnement doivent aller de pair pour « opérer une véritable transformation de notre société ».

Pour ce qui est du secteur agroalimentaire, « l’industrie la plus importante du Québec », il ne suffit pas de dire qu’il faut augmenter la production locale comme le fait M. Legault, plaide la leader libérale, pour accroître l’autonomie alimentaire du Québec.

Elle soutient que le gouvernement doit en fait mieux soutenir financièrement ses agriculteurs, les aider à miser sur l’innovation, la haute technologie, l’acquisition de machineries et de techniques plus performantes, avec un développement des cultures biologiques. Les producteurs agricoles ont « besoin d’un accompagnement » du gouvernement. C’est « extrêmement important », dit cette partisane de l’aide directe aux entreprises.

Dans tous les secteurs, il faut miser davantage sur l’innovation, ajoute-t-elle, « c’est le nerf de la guerre », et sur la présence partout au Québec d’internet haute vitesse.

La cheffe libérale promet de proposer d’ici deux ans un plan élaboré, « à partir d’une vision totale et intégrée » de relance économique du Québec, à temps pour la prochaine campagne électorale de 2022.

Ce plan devra aussi tenir compte de l’impact énorme de l’actuelle pandémie sur l’économie, un impact qui pourrait s’étirer « sur une génération probablement », soit pendant 20 ans, « peut-être plus », selon elle.