(Ottawa) Des présumées victimes de harcèlement de l’ancien sénateur Don Meredith estiment qu’elles se butent toujours à « l’inaction, l’ignorance et le silence du Sénat » au moment où elles tentent d’obtenir une forme de compensation pour les torts subis.

La Presse canadienne a obtenu une copie de la lettre envoyée à tous les sénateurs par l’avocat de ces deux femmes, plus tôt cette semaine.

Dans sa missive envoyée dans les deux langues officielles mercredi, Me Brian Mitchell déplore la lenteur des procédures du Sénat pour ces présumées victimes qui reprochent à l’ancien sénateur Meredith des gestes de harcèlement et de violence psychologique remontant à aussi loin que 2013.

« Les Canadiens n’ont pas de patience pour les institutions qui stagnent sans cesse et qui ne traitent pas de ces questions délicates. De nombreuses autres institutions, tant ecclésiastiques que publiques, ont traité ces questions, que ce soit sur le plan judiciaire ou par règlement à l’amiable », écrit Me Mitchell.

Les faits reprochés au sénateur déchu ont fait l’objet de deux rapports. Le premier, réalisé par une firme externe et remis en juillet 2015, n’a jamais été remis aux victimes. Le deuxième, réalisé par le conseiller sénatorial en éthique Pierre Legault, a été rendu public le 28 juin 2019.

Se fondant sur les témoignages de six anciens employés du sénateur, il en venait à la conclusion que M. Meredith entretenait un « environnement de travail empoisonné ».

En parallèle, des sénateurs indépendants se sont penchés sur des nouvelles politiques sur la prévention du harcèlement en milieu de travail au Sénat. Elle contient notamment une définition élargie du harcèlement et un processus d’examen impartial par un tiers.

Selon Me Mitchell, qui s’exprime au nom de ses deux clientes, ces réformes à venir ne seront que de la poudre aux yeux tant que les personnes qui ont inspiré ces changements ne seront pas dédommagées.

Il déplore le fait que le dossier de ses clientes « traîne » depuis près de sept ans et que l’institution a « contribué a les revictimiser » en leur demandant de témoigner à de nombreuses reprises.

« Tant et aussi longtemps que ce dossier n’est pas réglé à la hauteur des attentes et des dommages subis des survivantes de l’ex-sénateur Meredith, votre désir de modernisation, autant face à votre institution que celle liée à votre nouvelle politique sur le harcèlement sexuel, ne sera qu’un discours vide et portera l’odieux de ceux et celles qui ont abandonné et trahi mes clientes, vos employées », poursuit l’avocat dans la version française de la lettre.

Don Meredith, un pasteur pentecôtiste, avait été nommé au Sénat par l’ex-premier ministre conservateur Stephen Harper en 2010. Il avait volontairement cédé son siège en 2017, après être tombé en disgrâce en raison d’une relation sexuelle entretenue avec une adolescente.

Il avait remis sa démission après que le comité sénatorial sur l’éthique et les conflits d’intérêts eut recommandé son expulsion – ce qui aurait constitué une première dans l’histoire de la Chambre haute.