(Ottawa) Le processus de ratification de l’ACEUM, nouvel accord de libre-échange entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, chemine aux Communes sans que ne soit réglé le problème de l’aluminium québécois.

Jeudi, les élus ont débattu en deuxième lecture la Loi de mise en œuvre de l’accord.

Le débat sur C-4 a commencé par un discours de Chrystia Freeland qui a réitéré les effets positifs de l’entente qu’elle a elle-même négociée.

Les députés bloquistes, les seuls à avoir dit non à un premier vote sur l’ACEUM mercredi après-midi, ont repris, eux, leurs doléances, exprimant une fois de plus leurs inquiétudes pour l’aluminium produit au Québec.

En point de presse à sa sortie des Communes, la ministre Freeland a d’abord remercié les trois autres partis d’opposition — conservateur, néo-démocrate et vert — qui ont donné un premier appui au processus de ratification.

« L’atmosphère, je pense, était collaborative et cordiale », a-t-elle aussi dit à propos des premiers échanges en comité parlementaire.

Puis, elle a tenté de rassurer les Québécois.

Selon elle, les États-Unis et le Canada ont maintenant un intérêt commun pour éviter le dumping d’aluminium d’outre-mer dans leurs marchés. Elle assure qu’elle continue à discuter de protection pour l’aluminium québécois avec les Américains.

« C’est un enjeu […] perpétuel. Et c’est même une chose qu’on ne peut pas complètement régler par une décision, avec un accord. […] On doit regarder toujours ce qui se passe sur le marché, un marché qui est aujourd’hui commun », a-t-elle argué.

Mardi soir, le Bloc québécois a soumis une proposition au gouvernement libéral pour offrir une meilleure protection à l’aluminium produit au Québec. Aux bureaux de Justin Trudeau et d’Yves-François Blanchet, on refuse, pour l’instant, de divulguer le contenu exact de cette proposition.

« Les deux éléments clés de notre proposition, c’est que ça ne demande pas d’ouvrir le libellé actuel et ça fait appel à des mécanismes qui sont inclus dans l’entente telle qu’elle existe présentement », a simplement révélé M. Blanchet, en point de presse au foyer des Communes.

Il a refusé de dire comment le gouvernement a reçu cette proposition.

« Ils ont un certain nombre de choses à vérifier en termes de faisabilité », s’est-il contenté de préciser.

La ministre Freeland maintient qu’on ne peut rien ajouter à l’ACEUM qu’il faut ratifier au plus vite. Les États-Unis et le Mexique ont déjà ratifié l’entente.

En Chambre, le député bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe insistait et dénonçait la différence de traitement obtenu par l’acier et l’aluminium dans cet accord de libre-échange.

« Je l’ai expliquée à ma petite fille de huit ans hier et elle a compris. Donc, je me dis, avec tout respect, que c’est possible pour eux aussi de comprendre la différence entre les deux », a lancé le député dont la région dépend de l’industrie de l’aluminium.

Lorsque le débat sur C-4 a pris une pause, le temps de la période de questions quotidienne, les attaques bloquistes ont redoublé, poussant la ministre Freeland à reprocher aux députés du Bloc de ne pas comprendre les mathématiques.

« 70 % c’est mieux que 0 % », a-t-elle répété, faisant allusion à l’exigence, inscrite dans l’ACEUM et absente de l’ALENA, pour que 70 % des pièces en aluminium dans les autos construites en Amérique du Nord soient nord-américaines.

« On va parler mathématiques alors, lui a répondu le député Brunelle-Duceppe. La vérité, c’est qu’il y a zéro % de protection de l’aluminium québécois dans l’ACEUM. »

Les bloquistes croient que le Mexique peut importer à faible coût de l’aluminium chinois, lui faire subir une petite modification dans ses usines pour qu’il soit considéré comme nord-américain.

Toutefois, si on se fie à la dernière sortie de la journée du chef bloquiste, on pourrait croire que tout ce bombage de torse ne sera que passager.

« J’ai bon espoir que la ministre Freeland va compléter la réflexion dans les prochains jours et peut-être qu’on pourra […] faire en sorte que le Parlement […] aille un peu plus vite », a déclaré M. Blanchet, se montrant prêt à voter en faveur de la ratification de l’ACEUM.